Ceux qui nous gouvernent ne cessent de
criailler à nos oreilles que si telle ou
telle mesure, tel ou tel projet de loi, nous semblent ne pas nous convenir, la
faute en est à un défaut de pédagogie de leur auteur , et que si pédagogie il y
avait, leur bien fondé nous apparaîtrait immédiatement …!
Leur péremptoire assurance finit par m’irriter et par réveiller en
moi un soupçon de pédanterie !
Eh quoi ? Gens de la politique, pensez-vous donc que
nous n’avons pas compris et que seule cette incompréhension est responsable de
notre résistance ?
Tout d’abord, "pédagogie" contient la racine du mot « enfant »
, et cet état de jeunesse candide qu’il suppose nous concernant, est plus vexant que
laudatif..Sommes- nous donc d’éternels adolescents, des rebelles de l’âge ingrat,
auxquels il convient de bien expliquer les choses ?
J’omettrai de signaler
ce que ce soin pédagogique explicatif relève d’une attitude plutôt "transmissive ":
parole magistrale , « Homo Politicus » dixit !
Et tant qu’on est en « Pédanterie »
, j’aimerais de surcroît rappeler un trait de culture latine que j’ai toujours
aimé. Il y a deux termes en latin qui
veulent dire « conduire » , ducere et agere…tous deux liés à l’origine
au beau métier de pasteur , de conducteur de troupeaux, bucolique donc !
Ducere, cf le « Duce », c’est conduire en prenant
la tête de la troupe des animaux , comme souvent la peinture imagine le bon pasteur…
Agere c’est mener en les poussant les bêtes
devant soi, en les guidant, tout en les laissant frayer leur chemin et redressant
leur trajectoire quand elle oblique ou
se fourvoie…
Ainsi
parlait Montaigne dans l’ « Institution des enfants »
"On ne
cesse de criailler à nos oreilles, comme qui verserait dans un entonnoir, et
notre charge ce n’est que redire ce qu’on nous a dit. Je voudrais qu’il(le maître) corrigeât cette partie, et que, de belle arrivée, selon la portée de l’âme
qu’il a en main, il commençât à la mettre sur la montre, lui faisant goûter les
choses, les choisir et discerner d’elle-même ; quelquefois lui ouvrant chemin, quelquefois le lui laissant ouvrir. Je
ne veux pas qu’il invente et parle seul, je veux qu’il écoute son disciple
parler à son tour. (c) Socrate et, depuis Archésilas faisaient
premièrement parler leurs disciples, et puis ils parlaient à eux.[…]31 Il est
bon qu’il le fasse trotter devant lui pour juger de son train, et juger jusques
à quel point il se doit ravaler pour s’accommoder à sa force.
Si donc ceux qui nous gouvernent utilisent le
mot pédagogie en toute connaissance de cause je ne peux qu’applaudir.. !!!
Mais je doute,
quand ils prêchent aux ouailles que nous sommes, la Parole
explicative de leurs décisions et orientations, que ce soit à ce sens qu’ils se réfèrent !!!!
Et je n’aime guère la connotation que cet
élément de langage, largement utilisé, rattache à la notion de Pédagogie !
Je doute que cet usage contribue à souligner la
beauté complexe du mot… !
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