dimanche 29 septembre 2013

Plaisirs de Tulle , LAURENT DERACHE TRIO




Une des attentes du programme des Nuits de Nacre était sans nul doute pour moi le concert du Trio de Laurent Derache
J’ai déjà écrit combien nous aimons leur musique…
En revanche « si on me demande pourquoi je l’aime, je crois que ça ne peut se dire qu’en répondant, parce que c’est Elle parce que c’est moi !!!! »

Le concert se situait au Magic Mirrors
Lieu dont l’agrément est fort irrégulier suivant les moments de la journée et peut-être le type de musique joué
L’après midi c’est souvent une sorte de lieu ouvert. Sa forme circulaire et la galerie qui entoure la piste centrale incite à la déambulation, et le bar à l’entrée et les tables en bordure au pique-nique joyeux et bruyant…
On peut dire qu’à ce moment là on n’y voit bien nulle part à cause des piliers et des promeneurs et on entend partout assez mal…
Pour peu que l’éclairage choisi soit le jeu des « mirrors » on dirait une averse de neige magique dans laquelle on a envie de courir, de danser  et de jouer…
Et c’est ce qui s’est produit le 14 septembre à 18 heures !
Il y avait un grand nombre d’enfants et tous se sont mis à courir en ronde  sur la piste  qui s’est mise à ressembler à une patinoire des Jeux d’enfants à la Brueghel…tandis que les cris enfantins sur mélodies mélancoliques auraient pu rappeler, si on avait pu les écouter vraiment Les Minots de Daniel Mille…
Arrivés de bonne heure pour être « bien placés » !-la quadrature du cercle en somme ! -nous étions catastrophés …..Comme cela nous est parfois arrivé au Show Case !!!!

Néanmoins nous nous sommes efforcés de nous absorber dans les réglages des « balances », et peu à peu, nous avons réussi à nous isoler au coeur de cette musique .
NoUs avons choisi de nous approcher sur le devant de la scène et, petit à petit , des couples sont venus se grouper avec nous et nous sommes restés là, debout, puis assis par terre dans un îlot  de musicalité !!!
J’ai pensé alors que j’avais jadis intitulé mon post sur Life of Venus : Laurent Derache Trio , « le pouvoir de la musique »…
C’est effectivement une musique envoûtante, qui  capte  l’écoute et l’ émotion, qui joue sur les nerfs ou la sensibilité.
 D’aucuns diront, ça me prend la tête, d’autres, -moi ! – sont captivés…
Les thèmes que Laurent introduit sont superbes, très mélodiques, plutôt mélancoliques et lancinants...Leur  structure est  une reprise « obstinée » d’un motif qui progresse par infimes variations et décalages . Le rôle de la rythmique, la basses de Ouriel Eller et la batterie de Martin Wangermee, scande remarquablement cette obsession, en en soulignant  les variations…
Il y a une sorte d’unité car tous les morceaux assez longs relèvent de cette même structure, et  les thèmes se ressemblent tout en étant différents, mais toujours sur le même mode mineur,  créateur du même climat, presque une incantation lancinante ou mélancolique..


Les Minots avaient fini par s’envoler, le public par écouter, fasciné …
 Et la musique avait affirmé son emprise…




vendredi 27 septembre 2013

« ELLE S'EN VA », C.Deneuve toujours présente !


Car sa présence est stupéfiante !
Jeune ou plus vieille, mince ou moins mince, elle crève l’écran !!!
C’est son film !
Elle se joue, elle se regarde vieillir, elle se donne à regarder …
Elle est belle…
 A nos yeux, aux yeux de l’amant d’une nuit qui rêve en lui faisant l’amour à ce qu’elle a dû être, « Splendide » !

Est-elle belle aux yeux du gamin, son petit fils qui la découvre ?
Ou aux yeux du nouvel homme qu’elle rencontre ?
Ou leurs regards sont-ils d’un autre ordre ? de l’ordre de la fascination  amoureuse aveugle  ou indifférente aux rides ?

C’est un road- movie comme l’affichent tous les articles qui présentent le film, et le film en a les conventions aussi bien que  les ressorts…
La  structure d’ensemble est peut-être un peu beaucoup conventionnelle !
Le lâchage de l’amant déclenche la fugue, et la rencontre d’un nouvel amant inverse la situation et la dénoue…
Je ne devrais pas m’en plaindre moi qui exige absolument des happy ends pour les histoires que je lis, mais peut-être y-a-t-il pour les happy ends d’autres ingrédients possibles …
Plus original et aussi caractéristique de Catherine que ses beaux cheveux , à la fois drôle et un peu douloureux,  le  fil conducteur secondaire , la cigarette , « la quête » de la cigarette, le paquet de cigarette comme pass entre personnages…
J’ai aussi beaucoup aimé, en filigrane, à travers le regard des autres , la mère, le petit fils , la fille , l’autre grand père… le dévoilement de son histoire d’amour intime et sous jacente : une histoire tragique et romanesque, en  contraste avec les éléments burlesques savoureux de sa vie officielle , l’os de poulet déclenchant la mort du mari qui soupe avec sa maîtresse qui se trouve être la femme du médecin appelé en urgence.. !

Et puis bien sûr, les rencontres, les  échecs successifs de la résolution des problèmes, organisent les rebondissements .
Si certaines séquences  sont attendues et traditionnelles :  la boîte de nuit , le dragueur ,le petit fils qui s’échappe , la carte bancaire qui bloque, le chemin qui s’égare, le malaise
vagal…certaines rencontres sont savoureuses : le vieux qui roule ses cigarettes et en roule une pour Catherine, assise, bien droite et polie sur sa chaise, tendue à l’extrême par le manque et l’attente,  le vieil homme en face, sa cuisine pauvre de solitaire, ses doigts gonflés, déformés et maladroits à rouler le papier à cigarette.. Mon grand père avait ces mains là !
Le gardien de nuit du Fly, accueillant dans son salon de démonstration comme un hôte bienveillant , attentif au récit de Catherine.
Le groupe des buveuses de bières bruyantes et démonstratives, camarades à boire chaleureuses dans ce décor surréel,  les vieilles misses ressurgies du passé, leur projet de calendrier, tous  donnent  une saveur particulière au film, tendre et burlesque à la fois..
Et ces personnages secondaires souvent simplement serviables et « vrais » échappent aussi au conventionnel…

Et le petit fils je sais c’est un peu rebattu, la thématique grands parents/ petits enfants mais c’est ma thématique intime ! j’ai donc  aimé ce gamin, sa chanson tonitruante et ses écouteurs, cet autre univers qui n’est pas forcément étranger à celui de sa grand-mère auquel il s’intéresse et qui le concerne…

C’est peut-être pour Catherine Deneuve un partenaire assez insolite …
Et pour moi, c’est le plus beau dénouement cette rencontre-là ! 









Rencontres à Tulle, HIROKO ITO

Hiroko Ito était le fil rouge choisi pour le festival des Nuits de Nacre.

Un bien séduisant fil rouge, et nous ne l’avions jamais entendue en live, même si Michel avait déjà ,  grâce à Françoise Jallot  découvert et acheté deux CD …
En fait, je suis parfois dépassée par le foisonnement de ses découvertes et je n’avais que peu écouté ces CD avec lui, pour avoir une idée de cette musique et la partager, mais jamais comme j’aime à le faire, encore et encore,  avec un ressassement obstiné… !

Ma première rencontre avec Hiroko ce fut donc à Tulle, au théâtre des sept collines le 12 septembre…
Dans la belle orchestration de Peyrièras, et remarquablement entourée par le piano de celui-ci, la contrebasse de Marc Michel Le Bévillon, Christian Lété à la batterie, et trois accordéonistes talentueux, Thierry Roques, Sébastien Debard, Aurélien Noël , un rien raidie et solennelle, elle a joué une magique musique , un peu étrange pour moi, dont je perçois sans savoir l’analyser, que « les modes et les intervalles » sont de couleur japonaise.


« Rendez-vous sous les cerisiers », comme son titre le veut, nous embarque vers un autre soleil,comme son titre le veut, nous embarque vers un autre soleil, mais je suis aussi fascinée par  "Place de la Boca », « Le retour du chat », « Histoire nostalgique », « Okuribi »…, quelque chose de délicieusement ralenti, d’un peu nostalgiquement mineur, de notes égrenées parfois à la limite de l’acidité, …





Et puis, un autre volet du programme, un hommage à l’accordéon français et à sa capitale, l’air de Paris,...
... et je n’ajouterai rien à ce qu’en dit Michel  tant la pertinence de son texte que je trouve piquant, me convient..

« Le style d'Hiroko Ito en effet s'apparente à une relecture des romances et des airs d'un Paris  plein de tendresse et de nostalgie. Relecture qui donne une saveur mi-sucre mi-citron à ces romances.
Autre particularité de l'album : sa lenteur. On est dans un monde où le temps dure, dure, dure et cette durée est pour moi source d'étonnement. Au bout du compte, cette particularité fait style. Au fur et à mesure que les morceaux se suivent, on se sent de plus en plus en apesanteur et c'est agréable. Entre vigilance et rêve, un état de rêverie s'installe.  »
Michel Rebinguet

Mais la vraie rencontre, fascinante, celle d’une femme étonnante, ce fut le lendemain à l’espace Galliano, où toujours accompagnée de son mentor Patrice Peyrièras, elle nous raconta , dans un français délicieux, à la fois précis, complexe, et savoureux de variations de  registres de langue, elle nous raconta ce que j’appellerai son PROJET de vie : jouer de l’accordéon !


Et je l’ai trouvée passionnante et superbe…
Son point de départ, l’affirmation philosophique de sa foi dans l’existence d’un destin. On aurait pu en attendre fatalisme et résignation. Or en même temps, à première vue contradictoire, s’affirmait avec force et tranquillité une détermination obstinée à construire sa vie , à tracer sa route vers un projet choisi … l’accordéon !
Je ne sais d’où lui vient ce positif mélange…
De ses parents issus de la guerre (et quelle guerre !!!) et donc désireux  que leurs enfants profitent de toutes choses, la culture en particulier ?
De rencontres , que j’ai l’habitude d’appeler  de  « hasard objectif » d’après Breton, des rencontres qui résultent de la coïncidence entre le désir humain et les forces mystérieuses qui agissent en vue de sa réalisation …?
Il y eut Azzola puis par lui  Joe Rossi, et par lui de Barbara, Gréco, Moustaki ou Montand, notre ami J. Pellarin et Baïkal duo , aujourd’hui Fabrice Peyrièras… 

D’un volontarisme absolu qui la pousse à aller à Paris et à s’installer à quelque pas de Joe Rossi pour obtenir de lui des cours d’accordéon ?

D’une sorte de perfectionnisme exigeant qui force le respect et amène les profs de musique à l’accepter dans les cours contre toutes limites d’âge, et malgré des échecs…?

Il y a en Hiroko Ito une surprenante énergie qui convertit le destin en force positive.
C’est ainsi,- aveu aussi saisissant que bouleversant-, qu’elle interprète le cataclysme de Fukushima , comme une chance pour elle, alors que, vaincue par la difficulté à arriver, elle était décidée à renoncer, à quitter Paris, et à rentrer définitivement dans son pays !
La peur oriente positivement son destin …
Les morceaux Délivrance, impressionnant,  et L’espoir –Inori, encadrent Accordéon 33 !!! pour moi l’un des plus remarquables morceaux…
…Et éclairent un peu à mes yeux le trajet de vie de cette femme attachante dont le moindre charme n’est pas sa capacité à s’exprimer dans des visages divers, sourire et accueil chaleureux et spontané, tristesse profonde et solennelle , gaieté parisienne et musette, chansons sous les cerisiers…

Et toujours l’accordéon comme fil d’Ariane obstiné et multiple qui la relie au pays des cerisiers en fleurs, son pays,  à l’air de Paris, le pays du musette,  mais encore  au tango et au jazz, qui en jouent …pour un style bien à elle, tissé de tous ces mélanges…



lundi 23 septembre 2013

Plaisirs de Tulle ... KISS & BYE !


 J’écris aujourd’hui devant ma fenêtre ouverte sur un soleil d’été !
Il n’en était pas de même il y a dix jours, jeudi 12 septembre, pour l’ouverture des Nuits de Nacre .
Le temps avait été annoncé plutôt frais mais beau
 Mais il fut plutôt frais et variable tendance crachin. Et nous pensions qu’il fallait faire notre deuil de l’été !
Nous en étions attristés, car la soirée d’ouverture c’était, pour nous prélude « d’élection », SONIA REKIS, dans Sa nouvelle formation KISS& BYE avec YANN DEJARDIN à la basse, avec Sonia et Yann , aux voix et percussions .
Nous aimons la musique de Sonia, le son de son accordéon à la fois sonore , chaleureux , allègre… et toutefois un peu mélancolique, et les mélodies dont elle a le génie. Nous adorons Quai de Bourbon, Circul' Circus , Musique pour  trotteuse, Roz des sables …
Nous aimons aussi Sonia et le projet de Sonia, sa détermination à jouer, sa capacité à créer de nouvelles mélodies, à  inventer de nouvelles façons de jouer, à former  de nouveaux groupes  où  être elle-même mais aussi différente…
Et ce soir du 12 septembre à Tulle, malgré la petite « brousine » des balances, sous l’ éclaircie précaire, devant un public d’abord clairsemé mais qui se laissa peu à peu  capter par ce  son attirant et beau…nous avons eu KISS&BYE ….




Et nous n’avons pas été déçus !

Car toujours la mélodie, toujours le son «Sonia », mais la basse de Yann pour donner de la profondeur et les percus-jouées aux pieds- pour donner du relief aux morceaux, les voix, les remarquables voix, parfois  un peu "scat" mais aussi quasi oniriques et étranges, ou chantées ,comme dans le remarquable « J’ai deux amours » qui a marqué mon enfance, et qui, par la voix de Sonia, rend sensible le décalage poétique des univers suggérés par Kiss & bye…

Non nous n’avons pas été déçus !!!!



 Que vive  Kiss & Bye !






dimanche 8 septembre 2013

Entre Verlaine et Jan Lundgren , un vol de mouette…




Jan Lundgren vient de publier un CD solo au poétique nom…Man in the fog fog…



Et écoutant le teaser, j’ai revécu l’impression forte d’une évocation de la mer ...






Impression que j’avais déjà éprouvée en  écoutant Jan Lundgren dans Mare Nostrum, et qui se mêle dans mon esprit  à la profondeur rêveuse de son jeu et de son regard bleu…
C’était Seagull ! La mouette…

Et cette mouette a frôlé dans ma mémoire une autre mouette, que j’aime et n’oublie pas parce que ses mots musiquent  en moi, celle Verlaine…

 Je ne sais pourquoi
                        Mon esprit amer
D’une aile inquiète et folle vole sur la mer.
                        Tout ce qui m’est cher,
                        D’une aile d’effroi
Mon amour le couve au ras des flots. Pourquoi, pourquoi
 ?

            Mouette à l’essor mélancolique,
            Elle suit la vague, ma pensée,
            À tous les vents du ciel balancée,
            Et biaisant quand la marée oblique,
            Mouette à l’essor mélancolique.

                        Ivre de soleil
                        Et de liberté,
Un instinct la guide à travers cette immensité.
                        La brise d’été
                        Sur le flot vermeil
Doucement la porte en un tiède demi-sommeil.

            Parfois si tristement elle crie
            Qu’elle alarme au loin le pilote,
            Puis au gré du vent se livre et flotte
            Et plonge, et l’aile toute meurtrie
            Revole, et puis si tristement crie
 !

                        Je ne sais pourquoi
                        Mon esprit amer
D’une aile inquiète et folle vole sur la mer.
                        Tout ce qui m’est cher,
                        D’une aile d’effroi
Mon amour le couve au ras des flots. Pourquoi, pourquoi
 ?
 Verlaine , Sagesse,III, 7


Jan lundgren


 Verlaine:
          ... Mouette à l’essor mélancolique,
            Elle suit la vague, ma pensée,
            À tous les vents du ciel balancée,
            Et biaisant quand la marée oblique,
            Mouette à l’essor mélancolique.

                        Ivre de soleil
                        Et de liberté,
Un instinct la guide à travers cette immensité.
                        La brise d’été
                        Sur le flot vermeil
Doucement la porte en un tiède demi-sommeil....


Jan Lundgren, nous l’avions rencontré en suivant le fil magique de l’accordéon de Richard Galliano…
Et il y avait aussi avec eux , la trompette enchantée de Paolo Fresu…





Comme quoi un fil magique  conduit toujours , à condition qu'on le suive, à d’autres fils magiques…