Dans ma rue passent peu de voitures
Car ma rue n’est pas vraiment une rue mais pas tout à fait une impasse non plus
Elle se boucle sur elle-même, comme un rond point…
Notre maison est sur la courbe intérieure droite du rond point
Mon voisin du 9 promène ses deux chiens assez tôt le matin, car un jardin c’est bien pour les chiens, mais rien ne vaut la sortie dans la rue qui se souvient du passage des autres chiens et des chats …
Ma rue, dès le beau temps, les enfants en prennent possession ,ils jouent , font du skate et du vélo
Les deux belles ados du 5 et du 25 s’accompagnent et de raccompagnent chez l’une, chez l’autre, chez l’une…. en devisant interminablement…
Car notre rue s’est rajeunie : mon voisin d’en face défie les années qui passent en jouant de l’accordéon ; il nous invite souvent à passer un moment ; nos l’écoutons, nous discutons, avant de nous quitter nous buvons un petit banyuls, parfois un thé pour la galette des rois, conversations anodines mais pleines d’intérêt, riches de sagacité.
A côte de chez lui, son voisin immédiat, un peu plus jeune, cultive son jardin tout au long du jour ; à se pencher sur ses fleurs, il a fini par être tout cassé. Mais quand il relève la tête son sourire est chaleureux et amical.
Notre voisin de gauche aussi jardine au fil des saisons, on parle au- dessus de la haie, on partage les fruits de nos arbres…
Mais tous les trois sont les derniers des fondateurs du quartier : eux, ont fait construire leurs maisons, dans cet îlot alors nouvellement loti ; ils racontent qu’autour c’étaient des champs et des prairies que le printemps couvraient de fleurs, « l’avenue » proche n’était qu’un chemin empierré.
Les autres anciens sont tous « partis « decederunt » !!! Ils sont décédés, ou ils se sont retirés près de leurs enfants ou dans des maisons de retraite , certains viennent parfois visiter ceux qui sont restés…
Leur départ nous a privés de leur sourire courtois, mais on y a gagné l’arrivée de jeunes enfants, leurs rires, leurs cris et leurs chamailleries, leurs vélos et leurs ballons….
Notre rue, les trois chats blancs la traversent furtivement
Le blanc et noir aime défier la chienne d’en face, il est le seul à la faire aboyer , un petit aboi sec et rageur….
Les jardins sont bordés de rosiers ou de cyprès, le chèvrefeuille et le jasmin escalade les lauriers de notre troisième voisin.
Dans notre rue, notre jardin se clôt d’une haute haie , et son portail rétrécit d’année en année , il nous faut lutter contre les cyprès dorés qui prospèrent…
Dans notre jardin, règnent les chats et les oiseaux, coexistence fragile mais assez réussie : ils se partagent les pots de fleurs riches en graines, et qu’on abrite parfois du gel par une toile… pour le plus grand bonheur du chat blanc qui s’ y blottit, casse nos plantes, et croît surprendre les oiseaux !
Ce gros matou grimpe à l’arbre avec l’aisance et l’élégance du félin, mais à notre connaissance n’a jamais réussi à se faire les mésanges, ni les rouges gorges, et les tourterelles donc !!!.
Dans notre rue parfois, aux alentours de la Saint Jean, on fait un repas de quartier, mais le printemps béarnais pluvieux ne nous a jamais permis de dresser sur la rue même la longue tablée du dîner, et notre voisin musicien a renoncé à l’animer de sa musique, inquiet de sa fatigue et de ne pas être à la hauteur….