mardi 24 juin 2014

Bruno Maurice, un concertiste admirable…

Bruno Maurice, un concertiste admirable…
Ainsi l’écrit Françoise Jallot dans l’article d’Accordéons Accordéonistes qu’elle lui consacre.

«D’emblée, j’ai beaucoup aimé son jeu brillant et très expressif. Comme on dit , « il joue avec ses tripes » …De plus, c’est un vrai passionné de toute la musique , avec une grande culture et une vraie gentillesse »
Ainsi s’exprime François-Henri  Houbart, orgnaniste qui accompagne Bruno Maurice depuis près de vingt-cinq ans…


Ainsi s’exprime Bruno :
« Je fais évoluer à volonté mes compostions et improvisations, au plus près de mes convictions musicales. Dans le son et l’émotion du moment. »

Que dire après eux ?
Sinon que nous suivons avec une grande admiration, une puissante émotion, et-privilège précieux dont nous sommes conscients-avec une amitié véritable, le chemin de sa musique.
Quelques merveilleux  moments ont jalonné  ce chemin de rencontres, plein de mélodies sensibles, de surprises ravies, de plénitude d’écoute…
La première rencontre, l’envoi de son premier disque …


Puis la découverte de Cris de Lames, une grande émotion renouvelée soir après soir à l’heure où le calme de la nuit apaise et inquiète,… et incline à écouter une voix qui parle à l’âme.
Ainsi en sera-t-il  bien plus tard de l’écoute du soir de Die Junge Nonne , rencontrée par hasard dans le film touchant  et drôle , La peau sur la table, au détour du portrait filmé de Bernard Cavanna, le chant magique de Isa Lagarde,  et l’accompagnement magique de l’accordéon  de Bruno…
Un concert avec Mieko Miyasaki dans un superbe lieu qui parle de sérénité et abrita pourtant l’inquiétude tragique « d’un adolescent d’autrefois » Mauriac , à Malagar.


Concert lumineux ,où l’Appassionata rencontre pour une création originale  le Koto de Mieko, le violon de Manuel Solans, émotions entrecroisées du chant de Mieko et de la voix de l’accordéon.. rencontre qui se renouvellera pour nous  plusieurs fois…



Un solo d’été dans la petite Eglise romane de Nogaro, où la simplicité du lieu et du public offrent un écrin aussi dépouillé que chaleureux,  au jeu concentré et inspiré de Bruno, entre improvisation et musique écrite.


La fantaisie et l’émotion d’une évocation de Barbara au Pont Tournant.


La joie et la créativité, l’improvisation sur des thèmes aux noms évocateurs et poétiques,  dans un duo aussi inspiré que complice avec le merveilleux Jacques di Donato, talent fou, humour et gentillesse !



Un soir à Marmande, l’entreprise audacieuse et réussie de leur double concerto aux Turbulences aussi harmonieusement concertées  que divagatrices. Avec  Les Concertistes d’Aquitaine où on a le plaisir d’entendre aussi le violoncelle de Pierre-François Dufour.


Un soir à Bordeaux l’invite à partager leur double fantaisie avec un magicien fou des mots André Minvielle…

Au festival de Trentels , dans la petite église de Ladignac, les lieder partagés de Schubert , adaptés par Cavanna :  plaisir rare et attendu, chance dégustée avec gourmandise  que de les entendre en live !


Et enfin dans les marbres imposants de l’Eglise baroque Saint Paul de Bordeaux,  seul avec son appassionata , Mitango , un « récital » de son œuvre dédié à toutes ses inspirations , le rythme et la « voix » de Piazzola, la douleur de la mort du père , l’amitié de Monsignore Agostino Da Costa Borges, le matin d’Hanoï, le soleil levant, le nuage d’orage,   la chanson française , le partage avec le public-nous ?-et…
la source de son chant, le « Petit Orgue » qui se fait si grand par la vertu de  sa virtuosité et de sa sensibilité,  son Appasionata aussi aimé que maîtrisé.

ET toujours ce son somptueux et délicat,  toujours pour l’accompagner  ces «  mots qui sonnent, aux sens énigmatiques et ambigus, qui laissent la porte ouverte à plusieurs interprétations possibles… » 




                                                               "MI…TANGO "

Bruno,  quel bonheur de suivre le chemin musical de ta vie… !

ET merci à Françoise Jallot pour ces propos si judicieusement recueillis, pour Accordéons Accordéonistes n° 142 Juin 2014



dimanche 22 juin 2014

Bipolaire….c’est tendance !!!


Ma mère disait (au féminin d’ailleurs, hum ???) : » Elle est journalière »
L’épithète pouvait  concerner  l’humeur,  mais aussi l’éclat du teint, le contour des yeux , la fraîcheur du visage…
Dans ce cas, elle s’associait à : « Elle serait jolie, mais … »
S’il s’agissait de l’humeur, elle ajoutait « Elle a ses jours ! »
 Plus tard j’ai adopté l’idée de « cyclothymie », l’image d’un cycle dont je n’étais pas  forcément maîtresse, convenait à ce que je ressentais …
Plus le temps a passé plus ma sensibilité aux météores s’est accentuée, le passage à  l’hiver le lent et inexorable déclin des jours, la chute des feuilles  donnant aux paysages un aspect pourrissant puis terne,  la pluviosité interminable du printemps qui occulte l’allongement des jours, tout cela cyclique, ou non, a commencé à me peser !
 Seul l’hiver finalement me convenait qui dégage magiquement la structure des arbres s’élevant vers le ciel, et qui parfois offre les métamorphoses de la neige…

Puis l’été… avec la mer, elle était retrouvée, quoi l’éternité ? « C’est la mer allée avec le soleil ! »





C’était classique, c’était païen, c’était Vertumne, le Dieu aux deux visages , c’était Démeter et Chorée…
Et puis voilà qu’au fil des ans, s’installe en moi une humeur « journalière »…
Devrais- je me réinstaller dans l’épithète maternelle ?
 Non ! non ! heureusement on a découvert… la bipolarité !!!!
Dans les conversations, les médias, les polars, les revues plus ou moins « psy »  court le …bipolaire !
Bipolaire suis-je  donc ? sensible aux météores, plus dynamique quand j’ouvre mes fenêtres au soleil du matin, ravie de contempler le ciel du soir de solstice…
A tous les vents des émotions balancée, un sms de Chacha ,  le partage d’une analyse littéraire , ou d’une émotion musicale , la danse de Camille , un coup de fil dialogue riche de cette philosophie qu’ont parfois les enfants, une blague complice avec ceux que j’aime, , un petit chat du soir avec Nadja,  une fugue à deux avec Michel vers un concert,  un concert parfait, une rencontre d’après concert, un message amical , une belle histoire lue ou relue , vue ou revue, un beau texte, un tableau saisissant…
….Et au vents contraires de l’angoisse du temps qui passe, de la peur de la maladie , de l’anxiété pour les autres et de l’autre, perçue et ressentie comme  ce petit vide au creux de l’estomac qu’on appelle inquiétude…
Et voilà que c’est une vraie maladie pandémique !
L’humeur sociale est bipolaire, les gens fêtent la musique, 

...et mangent mangent …sortent au soleil , se ruent dans les cafés et les restaurants et mangent mangent , filent  se balader dès le WE venu, et mangent mangent, sous l’ironie de Michel , «  c’est la crise ! »
Les infos politiques ramassent à la pelle les exactions, financières, les trahisons fratricides, les fermetures d’entreprises, les impuissances du pouvoir…
Et si les Bleus gagnent s’élève une allégresse,  candidement orchestrée par les medias qui avaient pourtant  du même élan analysé, pronostiqué le ratage, le sombre cynisme, le scandaleux, le pire…

 Et voilà que le climat lui-même, le climat de nos régions tempérées, se met à l’unisson, à son tour bipolaire ! pluies froides et serrées,  froids brusques de Saints de glaces à toutes  dates, soudain jours chauds, lumineux, presque caniculaires… on range les doudounes pour les ressortir, les filles sortent leurs jolies jambes pour les revêtir en hâte…
Vertumne est à  nouveau le Roi de la météo du temps et des humeurs…
Doit-on le honnir ? « Qu’il se casse ! » ou le vénérer pour  qu’il se nuance …. ?

Ou s’accommoder nous mêmes de l’Incertitude, qui, si elle marque nos jours du sentiment de la précarité du bonheur, peut nous promettre peut-être  en revanche la précarité du malheur ?


lundi 16 juin 2014

Les bonnes blagues de mon père


Mon père avait une sorte d’humour qui découlait d’une espèce  de détachement, de doux scepticisme à l’égard de la vie. Bien que  très impliqué dans son travail, très passionné par l’étude de l’histoire et la géographie de notre pays, très  convaincu des valeurs de la république, très soucieux de ses deux filles et de sa femme, il était toujours sensible au doute,  enclin  à ce détachement qui lui conférait une aimable indulgence à l’égard de chacun, et un pessimisme sans amertume, un agnosticisme général….
Mais s’il était ainsi animé d’un certain  humour, il était totalement nul en blagues ! On dit parfois : « Elle est nulle, ta blague ! » mais c’est après avoir rigolé, gêné qu’on est en fait d’avoir ri !
Tandis que les blagues de Payou, si elles nous émouvaient par son côté gamin à les faire, ne nous faisaient jamais, mais  jamais rire vraiment …
La quasi absurdité de l’affaire, c’est qu’alors que nous nous n’y pensions jamais, il était attaché  je ne sais pourquoi au rite du  Premier Avril et ne manquait jamais de nous  fabriquer une bonne blague à cette occasion!
A laquelle on ne croyait jamais !

Et pourtant il y en eut une qui fonctionna pour moi extrêmement bien, trop bien !!!!
C’était la blague, sans malice ni originalité, du LION D’OR !
C’était  à l’époque de la première enfance, j’étais remuante, adorais la fête, les sorties, en famille ou avec des amis, surtout celles du soir, surtout celles des superbes soirées, tièdes et rosées du solstice, quand par chance il fait beau et chaud…
Et alors qu’il rentrait du travail, et se disposait à se livrer à d’autres occupations passionnantes, lire, écrire par exemple, ou jardiner, je les harcelais, ma mère et lui :
 « On va promener ?, on va quelque part ? »
Ma mère, fermement et patiemment, expliquait qu’il était temps de se reposer, de se coucher de bonne heure, ….mon père éludait en général, courageusement !, courait se réfugier dans le site protégé de son « bureau », la plus belle pièce de la maison… !

Sauf un jour, un jour où il eut ce petit plissement des yeux dont il convient de se défier. Il finit par dire :
 «Eh bien Oui ! On va y aller !
­-Où ? ­
­ ­-Au Lion d’Or ! »
Et  je ne me défiai pas, et, plissement des yeux ou pas, je marchai ! 
Ce fut une aventure cruelle quand les préparatifs, l’attente excitée, me firent peu à peu comprendre la traitrise de la blague…Je crois bien que j’en pleurai !!!

Et qu’Au Lit, je ne Dormis pas tout de suite !
Nous en avons souvent parlé et ri ensuite, avec de ma part toujours une ombre  de rancune, et, de la sienne, un soupçon de confusion, de l’avoir trop bien réussi cette fois, sa BLAGUE !!!
Cette envie des soirs d’été, je l’ai toujours, je comprends mes « Petites » qui l’ont, et  je leur raconte parfois la traîtrise de mon Payou…. !


mardi 10 juin 2014

Richard GALLIANO à Foix, un époustouflant SOLO…


Le solo est certes un exercice  singulier et saisissant …
Plus qu’un chanteur que l’orchestre ou un instrumentiste accompagne, cet homme seul en scène avec son accordéon embrassé, semble nous inviter à un face à face intime et tendu…
C’est un concert singulier sans doute pour lui, mais aussi pour nous, écouteurs passionnés qui concentrons toutes nos attentes sur celui( ou celle) qui va jouer pour nous .
 Il se trouve, mais est-ce un hasard, que les solos  finalement assez  nombreux auxquels nous avons  assisté, l’étaient toujours  de musiciens qui nous sont particulièrement chers, Bruno Maurice, Philippe de Ezcurra, Renaud Garcia- Fons,  et bien sûr Richard Galliano.
 Et chaque fois à notre impatiente attente, se mêle comme une implication personnelle, un peu d’angoisse ou d’anxiété, la peur que ce ne soit pas aussi bien qu’on l’attend, aussi bien que la dernière fois, aussi bien que notre mémoire en garde le prégnant souvenir…
Et c’est sans doute aussi un exercice singulier, périlleux et fragile,  pour l’artiste qui porte seul  tout le poids de ces attentes …

Ainsi d’ailleurs l’avoua avec un peu d’ humour  et beaucoup de simplicité, l’ homme modeste au bel accordéon noir , vêtu de  noir , entré sur une scène noire et sombre …
Il ne l’avoua qu’après trois morceaux très beaux, enchaînés sans un mot …trois morceaux chargés de force magique, trois morceaux que nous aimons, Habanerando, Tango pour Claude, Fou rire…
« -J’étais un peu stressé comme à chaque fois, de ne pas y arriver…mais ça va, je suis en forme, je crois … »






Et en forme, oui, il l’était !
Tout, il y eut tout, tout, tout, dans ce Solo de Richard Galliano  a Foix…

La virtuosité extrême et son aboutissement suprême, l’évidence de la simplicité…
L’art des contrastes,  puissance et la légèreté, l’émotion et l’allégresse,
Le swing et la mélodie


Et la créativité inspirée de l’ improvisation sur les thèmes familiers que l’on aime et qui chantent dans nos têtes et que l’on aime retrouver, puis perdre sur des chemins qui divergent pleins  de découvertes et de délicieuses surprises avant de  revenir chanter familièrement …

ô Indifférence ! et Libertango , et Gelsomina selon Galliano ! mais aussi les Galliano de toujours, réinventés délicieusement, New York tango, Sertao ,la valse à Margaux, Barbara, et aussi cette Javanaise traditionnellement fredonnée avant  de se résoudre à se quitter…

Et l’humanité d’un musicien qui avoue son stress à mener à bien mener son Solo, qui affirme encore une fois sa fidélité à Nougaro et à Barbara, et le dit  en musique sur un Tango pour Claude ou en3 p’tites notes, sa  fidélité à ses racines « Musette », splendidement réinventées, sa fascination pour les  musiques d’Ailleurs , qu’il avoue avec modestie ne pas pouvoir   jouer aussi  bien que les musiciens d’Ailleurs…
Tout,  même son accueil simple et chaleureux à notre égard, les « adorateurs fidèles » et obstinés,  à l’issue du concert !
 « Epoustouflant », a dit notre vieil ami Pierre, musicien modeste et inspiré, remarquablement ouvert à toutes  les formes de musique.
ET il restait là ,assis, subjugué…

Tout, Tout...! jusqu’ à l’atmosphère de cette salle de « L’Estive » , relativement grande mais encore intime, pleine, chaleureuse…à l’acoustique remarquable… Une sorte de simplicité de l’accueil, de  la présentation du concert, de l’éclairage de scène justement dosé, du son justement ajusté…
Une sorte de simplicité du personnel, un empressement à accueillir avec gentillesse.
Une sorte de simplicité dans l’enthousiasme vibrant manifesté par le public…

Tout oui tout, … peut-être ajouterai-je les échanges avec Martine C , qui accompagnait RG et qu’une responsable de l’accueil m’a permis de rencontrer ce soir, qui ne furent  pas étrangers à cette impression de communication chaleureuse, éprouvée tout au long de cette soirée,  et dont je la remercie.

Tout un contexte qui contribua encore à l’intimité du solo, l’impression de face à face, l’impression que Richard Galliano jouait  pour nous, et percevait  chacune de nos vibrations…




 Et quand je resonge à cette soirée, outre le plaisir parfait du concert, partagé de surcroît avec nos amis aficionados de Richard,  je reprends  confiance en l’existence de moments  culturels  dans notre  Province…Existence dont  parfois je doute, tant Paris et sa couronne ( !!!) et les grands show-parisiens ! - du Sud Est, me semblent attirer et concentrer tout l’art du monde…
( Et ça, depuis Molière : « Car  Il faudrait être l'antipode de la raison, pour ne pas confesser que Paris est le grand bureau des merveilles, le centre du bon goût, du bel esprit …") !!!!

Des solos, ceux de Richard Galliano en particulier, j’ aime l’attente un peu inquiète.



 Ces rendez-vous longtemps attendus, « Face to face » , sont des moments   de grands bonheurs  musicaux …

Bonheurs ambigus, parce que toujours trop courts ,et qu’on les quitte avec le seul désir qu’ils se renouvellent bientôt !!!!