mercredi 22 mars 2017

DELTA Y MAR Juanjo Mosalini et Vicente Bögeholz


A force d’écouter Chamuyo en boucle et de feuilleter son livret, je ne pouvais pas échapper à la double attirance de Delta y Mar : la mer, et le bandonéon de Juanjo Mosalini …




Le voilà acheté, et comme pour Chamuyo , dans son livret, Juanjo nous parle :
De leur projet,
De leur duo, son bandonéon et la guitare de Vicente Bögeholz…
De leur musique…
De leurs pays…
J’avoue, j’ai dû chercher sur l’Atlas, ce delta et ces fleuves,  le Paraná, le Tigre… pour comprendre la belle image des deux miroirs où… :
«  Le delta du Paraná et l’océan de Concepcion […] sont pour moi deux miroirs , l’un où se contemplent nos deux villes natales , l’autre où se reflètent nos histoires parallèles de fils d’Européens que leurs famille ramènent en Europe lors de la triste décennie qu’ont connue nos deux pays.. »


Juanjo et Vicente racontent, et leur musique enchante :
   Par les deux sons qui dialoguent la continuité virtuose et claire du bando, les notes limpides de la guitare, qui fusent ..
  Par leurs deux styles qui mêlent  sans se confondre…
  Par la variété de leur inspiration…
J’ai pour l’écoute rompu parfois la continuité de l’œuvre, pour scruter le style de Juanjo, ou le style de Vicente Bögeholz, et si j’ai tout aimé,  je me suis attachée à réécouter des moments de prédilection qui suscitent en moi  de subjectives connotations :

-Delta y Mar l’éponyme du titre : une écume de vagues, mélodieuse dans sa légèreté, bando tout aussi mélodieux, mais parfois grave et puissant comme roches ….la montée en puissance des deux sons mêlés en un rythme accéléré…parfois tangueando…. ?

-Le remarquable Tango inside, remarquable par son thème , la scansion de son rythme, la mélancolie  de son beau thème, joyeuse ou alanguie , le contraste des deux sons en clair obscur…

-Là rêverie d’une balade au bord du Tigre, un goût de soleil et de printemps , tout à coup s’assombrissant …

-La milonga de la tierra
J’ai cherché en vain , même si nous avons un certain nombre de CD de Mosalini Juan José et son grand orchestre son interprétation de cette  composition dont il est l’auteur: j’aime vraiment beaucoup cette milonga mélancolique avec son magnifique prélude mouvant comme  mer à la frange de la tierra, puis, la mélodie  égrenée à la guitare, entraînant le bandonéon dans un thème bouleversant …Jeu plein de virtuosité, parfois même de fantaisie , de variations mélodiques, et une fin comme abrupte  , écoutez le silence !



-Une Cumparsita sans complexe,  quoique d’une fine complexité de variations, où Juanjo manifeste une créativité innovante et libre…


Il me reste à explorer les créations de Wolfgang Bartsch et à rencontrer Rüdiger Blömer…
Je remets mon casque  à bonheurs et…

A suivre




mercredi 15 mars 2017

OSTINATO…un style ???



Ma culture «  ? » musicale, comme les amitiés , comme mon jardin, s’est constituée au hasard des rencontres de la vie . Pas d’école, pas de collège, pas de lycée, pas de Fac pour en organiser la construction .
 Hasards… mais comme on le sait, je crois au « hasard objectif »
 « C’est la vieille croyance en la rencontre entre le désir humain et les forces mystérieuses qui agissent en vue de sa réalisation... Mais dépourvue à mes yeux de tout fondement mystique.

C’était peut-être donc le désir inconscient d’une musique lancinante qui parle à mes soucis, qui m’a fait rencontrer un soir la musique de Laurent Derache:




C’est effectivement une musique envoûtante, qui  capte  l’écoute et l’ émotion, qui joue sur  les nerfs ou la sensibilité.
  D’aucuns diront, ça me prend la tête, d’autres, -moi ! – sont captivés…
 Les thèmes que Laurent introduit sont superbes, très mélodiques, plutôt mélancoliques et  lancinants...Leur  structure est  une reprise « obstinée » d’un motif qui progresse par infimes  variations et décalages . Le rôle de la rythmique, la basses de Ouriel Eller et la batterie de  Martin Wangermee, scande remarquablement cette obsession, en en soulignant  les  variations…

Un autre hasard , celui d’une amitié m’a donné de rencontrer un jour le piano de Lorenzo Naccarato et son trio :



Pour moi le  Naccarato Trio , c’est d’abord un très beau piano !
Un style à la fois très « ostinato », avec un jeu rythmique très insistant et répétitif, porteur d’une sorte d’interrogation «  obstinée », voire un peu inquiétante, et sur lequel, merveille ! viennent s’inscrire des thèmes variés dans leurs nuances…
Parfois un thème doux et mélodique au tempo lent,  comme dans Brescia, parfois des pluies de notes claires d’une très grande légèreté, toutes en précision et en finesse comme dans Heavy Rotation ou  Animal Locomotion
Si j’avais plus de culture musicale, j’oserais avouer que cela me fait penser à des Jeux d'Eau du début du vingtième siècle !!!!
La reprise des phrases répétées parfois jusqu’à ce que s éteigne  en douceur le son, participe aussi à une harmonie mélodique suggérant à ceux qui écoutent sens et évocations 

Et un soir , en parlant de « jets d’eau », et peut-être d’une envie en filigrane d’écouter du Ravel , parce que Philippe de Ezcurra joue la Pavane pour une Infante…,parce que j’ai lu un livre modeste et beau, Les forêts de Ravel,





... parce que je viens d’acheter ses œuvres pour piano.. 
Un soir donc par hasard, j’écoute rarement France Culture , Michel m’appelée, pour écouter Jean –François Zygel , qui parlait en illustrant ses propos d’écoutes choisies , de  la répétition, ou « ostinato »chez Ravel :


Sur HABANERA , Ravel , Jean françois Zygel :
« …mais aussi un ostinato, aux couleurs changeantes Ce rythme est présent tout au long du morceau, passant d’un groupe d’instruments à l’autre, à la manière d’un fil rouge. Il s’agit donc encore une fois d’un ostinato. Cet ostinato est, de plus, joué presque toujours sur la même note (un do#, plus rarement sur un mi). Il passera ainsi des violons à l’unisson (à 6:58) aux cordes graves, clarinette basse et contrebasson (à 7:13), au célesta (à 7:44 et 9:03), ou encore aux cordes graves et cors (à 8:04), aux bassons dans l’aigu, à la trompette dans le grave, aux percussions et altos dans l’aigu (à 8:28). À chaque nouvelle combinaison de sonorités, l’ostinato se colore d’une façon différente et imprime un climat particulier à l’orchestre… »


Merveille des rencontres, bonheurs du hasard (objectif ) ! je me dis oui il y a un style ostinato dans ce que j’écoute actuellement…

Et comme dirait FACEBOOK : J’aime !




mercredi 1 mars 2017

CHAMUYO , Mosalini Teruggi Cuarteto


Savez-vous ce que signifie « Chamuyo »en argot argentin ?

Juanjo Mosalini  nous l’explique dans le livret du nouveau CD du Cuarteto Mosalini Teruggi : « L’art de convaincre l’autre à tout prix où l’éloquence envoûte dans un jeu jubilatoire… »


Pour l’heure, c’est le titre de leur projet musical, « évocateur de leurs échanges créatifs et paradoxaux, deux adeptes du Chamuyo qui pratiquent  à l’excès le maniement d’une parole égocentrée »
C’est le titre d’un beau CD, bel objet , photo des quatre comparses, ô combien réputés, deux comme champions du Tango… Hoy !  et deux musiciens Chambristes parmi les plus recherchés, Romain Descharmes au piano  et Sébastien Surel, dont  nous avons appris à apprécier particulièrement le violon depuis sa collaboration avec Manu Comté et Soledad, et avec Richard Galliano dans le Galliano Septet, et le partage de ses aventures de Piazzolla forever, et de  Bach et Vivaldi….
Un  Beau CD avec deux textes superbes de Juanjo Mosalini et de Leonardo Terruggi , expression précise  et raffinée sur  papier glacé,  pour nous expliquer les racines de leur inspiration musicale , collaboration, passeports doubles , et musique d’hier et d’aujourd’hui…et rareté en livrets  CD, chose que j’apprécie particulièrement , les textes dans les trois langues …le français , l’anglais (media oblige), et l’espagnol..
Je dois l’avouer , je suis une femme des mots, aussi ignorante que passionnée en musique , j’aime ces textes qui nous prennent par la main et nous entraînent à une écoute seconde de la musique qui  avant tout nous séduit  d’emblée

Chamuyo, c’est le nom d’un morceau de Juanjo Mosalini  mais c’est aussi le titre qui donne la couleur  de toute la musique du disque, une musique exaltante , pleine de surprises et de contrastes effervescente ou alanguie , survoltée ou nostalgique , d’agitation de foire ou de méditation face au soleil sur la mer , pleine de diversité  dans ses rythmes , ses mélodies  , avec des temps mélodieux en écho avec le tango presque traditionnel , Milonga del  eco,  des audaces explosives d’aujourd’hui  et des distorsions sonores, Chamuyo, Code 18,777 !….

 Chamuyo, c’est un Mot pour notre présent…
…« Une époque où les paroles prennent bien plus de place que les actes, qui trop souvent sont en dissonance au sein d’une même personne .Un quotidien qui nous happe vers une pratique excessive du  Chamuyo, une vie virtuelle dénuée de sens une vie virtuelle dénuée de sens, une vie politique qui sonne creux . Tout autant de choses auxquelles il faut absolument tordre le cou. C’est avec force que nous nous y attelons chaque jour avec notre medium de prédilection, la Musique. »JJ Mosalini

Notre medium de prédilection , puis-je vous emprunter l’expression , Juanjo ?

Combien je partage tout votre  texte, « dissonances sociales » et « virtuelles » ,  y compris parfois la « dissonance personnelle »…
Alors savourons la beauté de l’écart poétique des dissonances musicales.
Bien des pièces de « Chamuyo » dont pour moi délectables :
L’éponyme du titre le  «Chamuyo ».
Les graves profonds des « Cuentos Graves »   de Leonardo.
Le feu d’artifice des sons harmonieusement dissonants d’une frénésie foraine (« code 18 »)
Les deux milongas belles à pleurer qui encadrent  code 18, «  l’eco » de la première m’émeut profondément.
Le soleil vibrant sur la mer de « Mar y sol » .Que tous les soirs bientôt… j’irai , j’irai, l’ « entendre » s’abîmer dans la ligne d’horizon…

En fait TOUT, écoutez-vous-mêmes ce que youtube consent à nous proposer ! ou/et achetez le CD !!!!





Mais ce que je trouve encore plus saisissant, c’est la séquence des deux styles , le code18 entre les deux milongas , l’union ou le dialogue des quatre instruments aux sons si personnels et pourtant si bien en accord , l’orchestration raffinée , sons au foisonnement enchevêtré, ou  dégageant  des lignes pures, jusqu'au solo du violon, contraste excitant Code 18 et milonga del eco,
mélodies remarquablement travaillées cheminant de l’un à l’autre avec insistance, et parfois à la limite de la dissonance , comme un vers impair…777 !!!!

Merci de ce Chamuyo ,
A Juanjo
A Leonardo
A Sébastien
A Romain

Et à un jour, peut-être, en concert !!!!