lundi 28 novembre 2011

La Femme de César.

Danièle Mitterrand est morte...
 A ma connaissance, celle qui fut tant d’années, et depuis qu’elle avait vingt ans, la « femme de César » réussit à garder son individualité, tant politique, qu’intellectuelle et sociale…
Je l’en admire, comme d’ailleurs j’admire l’indépendance d’esprit qui fut la sienne dans tous les domaines, la conduite de sa vie en particulier...

Quelques temps avant, la première dame de France actuelle, autrefois star reconnue de la chanson, a mis au monde une petite fille avec, malgré le siège obstiné des photographes à proximité de la clinique d’accouchement, une discrétion que je respecte, quelle que soit par ailleurs mon opinion sur la politique de son amoureux …

Et ces évènements réactivent …..une question qui titille mon féminisme, une question que je me pose de manière récurrente : qu’est-ce, « à vivre », qu'être la femme de César ?
De Sissi Impératrice à Carla Bruni, en passant par Bibiche Pompidou, Bernadette Chirac ou Danièle Mitterrand, et tant d’autres …quand devient-on (seulement ?) « la femme de… » ?

Je fais un effort pour supposer, même si j’ai du mal au fond à admettre que le problème est réversible, que même chose sans doute advient au mari d’Angela Merckel ou à l’époux de Simone Weil ???

Je repense alors à cette découverte d’une jolie notation de Richard Galliano dans le livret de New York Tango que j’ai rouvert récemment pour en réécouter la musique

Perle
Perle…ma petite Muse…
ma Compagne…ma Femme.

….J’en fus émue et repensai à cette occasion, à ce morceau très beau et infiniment touchant écrit par lui à la mémoire de Piazzolla, Laura et Astor, dans lequel il associe indissolublement les deux, parce qu’ils étaient pour son amitié un couple …

Vu l’admiration que nous portons à Richard et à sa musique, on est tenté de penser: «Quelle chance de vivre à l’ombre bénéfique de sa musique, et de vivre par procuration le bonheur d’un tel talent artistique ….d’y modestement contribuer… »….
Un très délicieux petit film de Danièle Thomson « Fauteuil d’orchestre » qui met en scène un pianiste reconnu, incarné avec talent par Albert Dupontel, et la femme de ce pianiste, exprime avec, à mon avis, une grande délicatesse, ce rapport ambigu…

Le film me semble d’ailleurs, plus généralement, à travers les personnages de la caissière du théâtre ou du collectionneur de tableaux, élargir la question au rapport que les amateurs d’art, ont avec ceux qui ont… le Talent !!! Qui leur permettent de vivre en les côtoyant, la création esthétique par procuration.

Et sans doute le rapport avec ceux qui ont…le Pouvoir! n’est-il pas moins ambigu… !


Et je me demande parfois si c’est si simple, si facile, si heureux sans partage ou sans ombre, d’être la femme de César ?

… ou d’ailleurs le fils ou la fille de César ?

mercredi 23 novembre 2011

La Mixtuur de Tuur Florizoone.

La mixture de Tuur Florizoone est un sacré élixir !


AVEC :
Les mélodies mélodieuses dont il sait le secret, qui sont de celles qu’on garde en tête et dans le cœur, Queskia… Kwa heri………

...Les vocals de Tutu Pudane ,c’est la voix d’un peuple en quête de son identité* , appel touchant, mélancolique et toutefois joyeux avec les chœurs de Nabindibo………Surgissent des images de ciels africains et d’horizons sans limites …

Ajoutons les grains de sel indispensables, les ingredients de l’amitié et de la complicité musicale Michel Massot, Marine Horbaczewski

Des rythmes qui me parlent des Gnawas de ma jeunesse et de la sentimentale musique de Out of Africa dont je fus durablement touchée…

Trompette , double bass , percussions, et balafon pour un somptueux mélange qui clame la richesse du métissage en musique …et pour la civilisation !…

Le tout enveloppé de l’odeur délicieuse de la cuisine de maman Greet…



Mixtuur is a tribute to mixed people…by mixed musiciens….

Cette mixture est un philtre d’amitié généreuse et de bonheur musical !!!Ecoutez!!!







*La thématique aborde le métissage (‘mixus’ en latin) et ses différentes perceptions. Si aujourd’hui en Belgique, le métissage est plutôt bien accueilli, il a longtemps été synonyme de souffrance pour des enfants ‘oubliés’ de tous. Voici donc un concert qui sert le propos en faisant la part belle aux meilleurs musiciens belges et africains pour un métissage de couleurs sonores des plus intéressants.
A côté des virtuoses Michel Massot (tuba), Nicolas Thys à (basse), Laurent Blondiau (trompette), Marine Horbaczewski (violoncelle) et Chris Joris (percussions), trônent également des artistes de la trempe de Wednlavi Zabsonré (batterie) - l’excellente découverte du Burkina Fasso - et d’Aly Keita, le balaphoniste camerounais de référence.
Le tout est accompagné par Nabindimbo, une chorale congolaise polyphonique dirigée par Bernadette, la maman de Marie Daulne (Zap mama). Ce groupe inédit viendra présenter son premier cd ‘Ode au peuple métisse’ (De Werf)


Blog « Musique.arabe »


Pour un autre récit ,voir Michel...















dimanche 20 novembre 2011

Il faut que les fenêtres soient ouvertes ou fermées…

Variation sur un proverbe…








Dis moi comment tu ouvres tes fenêtres, et je te dirai…qui tu es !


Par exemple il y a la fille aînée des voisins d’en face. Ils ne sont pas là, elle est seule à la maison. Elle a ouvert les petits volets d’une fenêtre du haut, sa chambre ?Ouverts, poussés , pas fixés, battront au vent s’il y en a…au rez- de- chaussée une seule fenêtre ouverte…mal ouverte d'ailleurs...

Quand c’est sa mère qui est là… : pas de volets ouverts en haut ou une seule fenêtre …moitié ouverte…?
Volets du séjour, grand ouverts. Pas ceux de la pièce du coin droit…le bureau de monsieur sans doute ?

Quand c’est son père, tout est ouvert, nickel, volets bien ouverts , fixés.!!!

La maison voisine, c'est celle de Robert. C'est un peu notre ami, assez souvent  il nous invite à aller l'écouter jouer de l'accordéon...Parfois les doigts de sa main droite refusent  le doigté , alors il secoue la tête d'un air désolé, et puis en change !!! Nous admirons sa jeunesse de 90 automnes et un peu plus.  Il ouvre bien régulièrement les fenêtres de sa très grande maison, où il vit maintenant tout seul. Le matin , nous sommes contents quand ces fenêtres s'ouvrent et guettons inquiets quand elles ne s'ouvrent pas. Parfois le soir, elles restent longtemps ouvertes, sans que s'allume la lumière de son salon. Mais on a tort de s'inquiéter, il est comme moi , il aime voir la nuit tomber...



Il y a encore la maison de ma sœur, notre maison d’enfance, que ma mère avait voulu pleine de lumière et donc de fenêtres, au sud sur la façade principale, à l’ouest pour le soleil du soir, à l’est pour celui du matin .
A la mort de mes parents, ma sœur a décidé de venir y vivre. Souvent elle m’étonnait. Je l’admirais, car alors qu’elle vivait seule, les soirs d’été, elle laissait tous les volets et fenêtres ouverts. Elle aimait voir le soir tomber et s’allumer les unes après les autres, les fenêtres des voisins dans la nuit. Leur présence l’accompagnait.
-Peur ? Non pourquoi ? De quoi aurais-je peur ?

Mais il y eut l’arrivée du Chat ! Et les fenêtres se fermèrent. S’il allait s’échapper, ce filou, ce « nâtre » ! Les fenêtres... Pas les volets, toutefois..

Puis le Chat s’habitua à la maison, ou ma sœur à sa présence, et elle lui laissa champ libre et fenêtres ouvertes, et l’on put à nouveau goûter le soleil du jour et le déclin de la lumière du soir.

Mais survinrent les rumeurs, de vols, d’agression, de jour, de nuit, propriétaires présents ou propriétaires absents… et se fermèrent fenêtres et volets, de jour, de nuit. Les fenêtres quand nous étions à la maison, les volets dès que nous sortions !

Il y a le cas de mon beau père ! Leur grande maison aux nombreuses portes-fenêtres à volets de bois. Tant qu’ils y vécurent avec ma belle mère la question de fenêtres occupa tous leurs débuts de soirées, lui les fermant dès sept heures l’été, et quatre heures l’hiver, « pour que ce soit fait » et elle récriminant, se plaignant de cet enferment prématuré et « pas normal » ! Le matin en revanche, dès six heures, été comme hiver, il ouvrait, « pour que ce soit fait » avec un soin systématique, toutes les pièces une à une, rabattant à grand bruit les volets contre la façade….Les voisins protestaient mais en vain … « Faut quand même bien qu’on les ouvre !!! »

Plus tard, obligé à la solitude, sa femme étant en maison de retraite, il put en toute liberté, « pour que ce soit fait » tout clore dès 4 heures l’après midi quelle que soit la saison…et tout déclore avant l’aube…



Et il y a nous…
Ce que j’aime depuis toujours, et avec obstination, c’est profiter de la lumière du jour jusqu'au dernier moment… en revanche, je vous l’avoue, peu me chaut d’assister à la naissance de l’aube et à l’arrivée de l’aurore « aux doigts de rose… »


Nous ne fermons donc que la nuit tombée…
Et encore que j’aime l’été voir la nuit, sentir les odeurs qui s’exhalent mieux une fois la nuit tombée, la glycine, le prunier, le chèvrefeuille, et le jasmin…
Michel demande avec un soupçon d’ironie : « Fait-il assez nuit, ou y a-t-il encore une lueur ? » » Dois-je te laisser ouverte la fenêtre de ton bureau, ou puis-je la fermer ? » Mais il se plie avec gentillesse et patience à cette exigence vitale (!!!) de lumière et d’été…


En contrepartie, c’est moi qui le matin ouvre les fenêtres dans un ordre bien établi qui me permet de m’éveiller et de constater fenêtre par fenêtre, la vie du jardin et celle du quartier...Et lui permet de descendre dans une maison ouverte au jour…

Mais voilà que, est ce la venue de l’hiver, ou un certain ramollissement de l’âge, voilà que ce serait presque moi ces jours-ci, qui, dépitée de voir la nuit tomber si tôt, si vite, si sombre, entreprends parfois de fermer les volets, de les refermer sur l’épaisseur du soir …

Pourtant autrefois j’aimais bien, plus jeune, arriver le matin dans la nuit et entrer dans le lycée tout bruissant des bruits des voix, de la chaleur des lumières ; j’aimais les soirs d’hiver, voir la ville s’éclairer, surtout aux approches de Noël, et, venant du crépuscule des rues, entrer dans les lumières dorées et chaudes des magasins …
Espérons, avec Noël peut-être ?

Comme quoi, je vous le dis,  la question des fenêtres, est une grande question métaphysique…



samedi 19 novembre 2011

HEU…reux !!!


Une journée de la Saint-Martin…

Ce matin -vers dix heures- il fait encore une douceur plus qu’automnale. Bien sûr, vers cinq heures , le soleil sera si oblique que pour peu que les nuages aient gaqné du terrain, on aura une impression de nuit qui tombe…C’était ainsi à Marrakech le bref passage à la nuit des beaux soirs d’hiver !
Mais ce matin, le soleil est brillant et l’air vif sans mièvrerie !
Je décide donc d’aller chercher notre pain à pied à la jolie boulangerie K…
En m’engageant avenue Péboué, une belle rue bordée de platanes des deux côtés, je découvre que les arbres se sont en un rien de temps dépouillés …
Peu importe, je marche sur un tapis musical qui craque au rythme de mes pas…
Je croise des gens qui disent bonjour, et ont l’air un peu pompette de l’air pétillant du matin.

Les deux serveuses boulangères sont jeunes, accortes, et souriantes .
-Comment allez-vous ? disent-elles à la jene femme qui me précède dans la file
-Bien, bien ! il fait si beau on est heureux , comment ne pas être heureux avec ce temps ?
Et toute la file d’approuver…

Et je médite sur le chemin du retour à cette espèce d’insouciance. Ou inconscience ? Je repense à la question récurrente de Michel : « Comment ça se fait ? c’est la Crise! et il y a foule dans les bistrots, les restaurants, au cinéma »

Il y a le long de la plage des promeneurs flânant tout au long des journées qu’elles soient chômées ou pas…
Sur la place Clémenceau de Pau, dont l’architecture contestable a au moins le mérite de permettre aux rares cafés qui se sont maintenus d’étendre leurs terrasses de plus en plus avant…dès qu’il fait soleil affluent des jeunes, des familles , des retraités…
Faut-il les avertir comme mon grand père Lexou que ça ne durera pas, hi ho !!! ni le soleil , ni l’insouciance, ne la douceur des choses .!

Je pense à C’est dans l’air !!! à LCI !!!! and tutti quanti…tété analyse, télé prédiction, télé ragots, télé catastrophe, télé guignol politique…
Je pense Crise, Réchauffement Climatique, Pénuries...d'eau, de carburant ...

Et puis je regarde cette femme, qui n’a pas l’air bien « bourge », et tous ces gens qui se promènent et qui s’amusent.Ou discutent musique ...

Evidement je sais bien que le XVIIIème siècle s’étourdit aussi tout entier , extrêmes riches et extrêmes pauvres, dans la fête et l’insouciance et que cela n’a pas très bien fini , je sais bien que la guerre elle-même a pu générer des oasis de divertissement…

Mais je me demande aussi si on est pas en train d’ apprendre un autre mode de vie qui « profite », du beau temps , des spectacles gratuits, qui mange au restaurant, et se prive dans son intérieur… « Circenses » et (un peu) de pain…et de soleil … !!!

Un autre mode de penser, plus individualiste, sans projet social, moins concerné par le devenir collectif, vivant la cassure sociale et s’en consolant en s’occupant des siens … ?



Cet après midi nous irons nous aussi nous balader dans la forêt du Bager pour profiter des derniers feuillages des hêtres, nous croiserons dans un bar bondé le retour de l’équipe de rugby locale et leur superbe chant « Hégoak », nous grimperons le col de Marie Blanque pour voir l’ombre envahir la vallée …




Et nous ne serons pas les seuls !!!




vendredi 11 novembre 2011

Tomi Ungerer, Allumette


Une « Allumette » selon mon cœur…




Enfant, je n’ai jamais beaucoup aimé la Petite fille aux allumettes. Le froid, le manque de lumière, la faim, le ciel vide.. trop de maux accumulés jusqu’au mal ultime, la mort….

Elle faisait partie de ces personnages féminins angoissants auxquels je refusais de m’attacher, de peur d’en souffrir.
La petite Sirène et son sacrifice d’amour aussi tragique qu’’inutile, Le petit Chaperon si mignonne et si mal protégée par sa mère, et surtout La petite Chèvre de monsieur Seguin,( ah, qu'elle était jolie pourtant !), si courageuse, si décidée à vivre et dont le père , pardon , le maître !, resta si absurdement sourd à ses appels…

Bref, avec l’opiniâtre optimisme qui était déjà le mien et qui le demeure malgré l’âge, sur le mode mineur il est vrai, j’ignorai froidement ces tragiques destins de filles,(!!!) (car le chasseur à point survenu, pour ouvrir le ventre du loup , bernique !) Je refusai catégoriquement de relire ces histoires et plus tard, je ne les racontai que le moins possible à mes enfants , y compris les enfants de mes classes…Pas de Petite sirène, pas de Petite chèvre, pas de Petit Chaperon …sauf nécessité scolaire absolue !



C’est donc avec ravissement que je découvris tardivement, en explorant pour mon travail les trésors de la littérature enfantine, Tomi Ungerer. Un prodigieux coup de crayon et une palette « expressionniste » saisissante. Une insolente irrévérence. Je fus séduite. Avec la légèreté qui "sied" à des livres pour enfants, il égratigne joyeusement l’ordre social, et n’épargne aucun représentant de l’ordre, de la bonne morale , de l’armée, du fric roi, de la bêtise bien pensante.
Et c’est au nom d’une autre morale, anti conventionnelle, généreuse et altruiste.

Mais , plus que tout,  ce que j’aime particulièrement chez lui c’est le formidable espoir qui se dégage de ses histoires, bien qu’elles n’édulcorent jamais malheurs, vexations, méchancetés, et mesquineries de la condition humaine .
Pour avoir traversé enfant les souffrances de la guerre, les déchirements de l’Alsace, et les malheurs du nazisme, il ne demeure pas moins fondamentalement optimiste, amoureux de la vie et du monde tel qu’il est ….
Alors bien sûr sa Zéralda, dont le père ne vaut pas mieux que le Père Seguin, qui l’envoie inconsidérément au marché par un chemin isolé, cette petite Zéralda nous fait un petit chaperon rouge bien attachant et énergique, qui apprivoise son Ogre, à coup de génie culinaire .Son affreux poulpe a nom Emile et grâce à ses dispositions physiques spéciales, fait carrière de sauveteur en mer. Ses Trois Brigands sont des Robins des bois bienfaisants aux enfants.
C’est que ces personnages souvent marginaux, sont dotés de la faculté d’évoluer, de se transformer au cours de leur histoire, de changer en déterminations positives leurs données initiales.

L’une des plus délicieuses est Allumette

Conforme au départ à celle d’Andersen, tonalités sombres, froid et pauvre lumière d’hiver, faim, misère, et méchants et mesquins à l’horizon…

Mais sa foi ( dont l’a dotée Tomi, à mon avis, grand Mécréant ) a une vigueur désespérée mais efficace, et obtient du ciel abondance de biens de tous ordres et de tous calibres, qu’elle gère par la distribution avec pragmatisme et bon sens : goût du bonheur, du partage, et refus de la misère, sont ses valeurs, comme pour nombre des personnages de Tomi….et reconnaissance envers le beau ciel d’orage qui lui a déversé ces biens hétéroclites et précieux .



Un joli conte de Noël que celui-là…

Merci à Tomi pour sa formidable force de bonheur…

jeudi 10 novembre 2011

Au temps des rédacs…

Des rédactions, c’est ce que nous faisions dans notre enfance, puis au collège.

C’est ce qu’on faisait encore quand je fus prof et puis formateur de prof…époque où la rédac devint « production d’écrit »…

Je ne débattrais pas de ce qu’impliquait sans doute ce changement de terminologie..

« Rédaction » gardera toujours pour moi un petit parfum d’enfance à la Colette, évoquera toujours des images de pages à écrire, de cahier Sieyès, de crayon à papier , et de stylo plume, des idées de choses à inventer ou à décrire, puis à brouillonner pour les « rédiger » ensuite, à recopier, à mettre en page…à rendre à son destinataire et juge, le prof !

Non ce qui me donne à réfléchir aujourd’hui que je consacre tant de temps persnnel à l’écriture, c’est la question de la contrainte …

Bien sûr, c’est un vieux débat : si écrire comme parler est un prolongement de la vie comme le dit Célestin Freinet , l’écriture doit être libre , choisie quant au temps qu’on y consacre, le moment qu’on choisit, et le sujet qu’on se donne…
Et si j’ai toujours considéré comme une intuition géniale, l’ idée de Freinet de faire imprimer leurs textes par les élèves pour les publier dans un journal, j’ai toujours eu la plus grande réticence à l’égard du « texte libre».
Je connaissais trop d’enfants que paralysait l’absence de sujet et d’autres (dont j’étais bien sûr) que l’absence d’échéance imposée conduisait à l’absence de texte tout court…Libre pour libre, ça veut dire libre !!!
Alors , bien sûr,d'une part  jeune prof, je ménageais une boîte à textes effectivement libres, ou des séances de lecture libre de créations personnelles, qui d’ailleurs me créèrent en classe, à l’âge de l’adolescence, des moments délicats dont je dus me tirer plus ou moins élégamment, soit par la diplomatie, soit par une « censure » qui ne s’avouait pas comme telle…

….Et j’organisai d'autre part, comme tout le monde, et comme le préconisaient les instructions officielles, des sujets et des temps de « rédaction »

Bref je me disais qu’après tout Willie enfermait Colette pour qu’elle écrive et que sinon…
J’essayais donc de rendre « productives » les contraintes ; réflexion sur les textes lus pour écrire à la manière de.., inventions, discussions et aménagements sur les sujets de rédaction, trésor d’idées collectées et dotées de copyright …

Et pour mon propre jardin d’écriture, pendant mes années d’étude, je m’enfermais donc moi-même dans les délicieuses contraintes du sujet à traiter, mais à traiter à ma manière, tout en restant dedans.
Quant à l’échéance à respecter, pour moi ce fut toujours difficile …mais productif ?Je réfléchissais et tournais mes idées dans ma tête très longtemps, trop longtemps avant de prendre la plume…, puis les reprenant, complétant, rechangeant, je finissais au dernier moment toujours, ce qui donnait à ma production une sorte de tension, d’achèvement in extremis, qui n’était pas sans angoisse et non plus sans charme…



Mais je fais maintenant l’expérience assez délicieuse de l’écriture sans contrainte .
Pas d’échéance ! Ni de sujet d’ailleurs. Parfois c’est un peu angoissant, il me semble que je n’ai plus rien à écrire, rien à raconter, et pour peu que je ne vois pas de lecteurs signalés sur le compteur du blog, j’ai le vide en tête…
Et puis viennent des idées , quelquefois plein d’idées , des titres se bousculent, je suis débordée, je les note sur un vulgaire bloc Sténo. Beaucoup resteront à l’état de titres.

Puis je finis par me décider à commencer !!!
Et là aucune échéance à respecter, je peux (Merveille du traitement de texte) polir, rapetasser, déplacer, couper, coller, changer de mot, de structure…enregistrer jusqu’ à demain, reprendre encore et encore .


Un vrai délice...
C’est un plaisir d’écriture pur, sans projet de production ciblée.

Quoique, bien sûr, demeurent inconsciemment à l’arrière plan de ma pensée des lecteurs qui pour être fondamentalement « virtuels » n’en sont pas moins réels et même parfois existants . J’écris un peu pour eux mais beaucoup pour moi, pour écrire, pour le plaisir de « boutiquer » des mots, de créer des phrases qui me plaisent, d’exprimer des émotions, mes idées de Madame Cyclopède …(ainsi m’appelaient mes très grands élèves !!!)

De l’écriture pure…

Mais parfois je me demande si cette écriture nonchalante ne se trouverait pas améliorée par quelques contraintes. Un projet de production finalisée n’aurait-il pas plus de force ? Certes chez Rousseau, ce que j’ai toujours préféré ce sont les Rêveries du promeneur solitaire qui pour ne s’adresser qu’à lui-même m’a toujours beaucoup plus concernée que La Nouvelle Héloïse ou les Confessions …mais… ?

A l’inverse, je me demande aussi comment l’école pourrait aménager à côté des situations contraintes ce type d’écriture sans échéance ni hors sujet. Le traitement de texte, on l’a…mais l’a-t-on vraiment ? Et sans contrainte obtiendrait-on ces relectures, reprises, modifications, polissages…. ?

Si souvent nous l’avons tenté….

Alors je vais faire une réponse de madame Cyclopède :
« Cela dépend : on peut le tenter, on peut aussi ne pas le tenter…. »



dimanche 6 novembre 2011

Richard, Nino, Astor et …les autres…

Ce qui est extraordinaire aussi chez Richard Galliano, c’est sa prodigueuse créativité multiple, sa faculté à explorer pour les animer selon son propre jeu les musiques qu’il rencontre, ou celles qu’il a toujours aimées.
Ou peut-être qu’il rencontre, parce qu’il les a toujours aimées.
Ainsi de Bach, de Nino Rota, ou du forro brésilien, du tango argentin…

C’est ainsi que tout en publiant son Nino Rota, qui voisine sur son site avec son Bach sous la houlette prestigieuse de Deutsche Grammophon, une enseigne qui représente pour lui, « le Rital toujours fidèle à sa « Fisarmonica » selon ses propres termes, une consécration patente, il republie avec Milan, la musique de El Seño de Una Noche de Verano, en 25ème anniversaire de sa première collaboration avec Astor Piazzolla…

Un bien beau disque où se rencontrent l’inimitable pulsation d’Astor , et sa non moins inimitable mélancolie, et la sonorité non moins remarquable du bandonéon de son meilleur disciple qui sait si bien le jouer, mais aussi le déborder, ayant si bien suivi son conseil de faire du neuf , de réinventer ses racines tout en leur restant fidèle…

Un bien beau disque : écoutez-y par exemple, la Milonga, la Berceuse et le Murmullo Sensuel

Ses racines, elles débordent de tout côté sa linea del Sur, multiples comme celles l’accordéon, populaires mais pas seulement, latines mais aussi musettes, et s’enrichissent de toutes ses rencontres,  compagnons d’élection, et  éditeurs divers…

Avec Dreyfus, voilà qu’il vient aussi d’éditer The Essential, la quintessence de ses collaborations, et des inédits, ce concerto n°1 de Tchaïkovski que je n’avais jamais réussi à écouter, et des extraits de Piazzolla, avec son septet de Piazzolla for ever, au festival de Montréal .

Et puis d’ailleurs, comme il nous en avait confié le projet il y a un an, voilà aussi qu’ il le reforme, son septet de Piazzolla for ever… !!!

Le voyageur à l’accordéon revisite sa vie, ses amis, ses collaborations .
Mais belle image de la maturité, ma foi ! il revisite sa vie passée, tout en ne cessant pas de réinventer l’avenir …
Que rejouera-t-il demain , ou que fera –t-il chanter de neuf pour nous ?

Nous attendons sans impatience, ayant déjà de quoi faire chanter nos veilles, nos sueños de las noches….




mercredi 2 novembre 2011

Une autorité …à la Mamou !!!

  Un des grands plaisirs que nous partageons, Charlotte, Camille, et moi, et quelquefois notre Nadja, c’est le câlin du soir. Souvent on lit des livres qu’on « feuilletonne » Mais parfois, pas de lecture : « On va parler… » disent les deux filles …Blagues, histoires de leur école, (leurs spécialités) histoires de mon enfance ou de ma jeunesse (ma spécialité !) . L’autre soir, comme je leur disais : « Mais je n’en ai plus des histoires de quand j’allais à l’école », elles eurent une réponse sans réplique: "Mais des histoires de quand tu étais prof, tu en as bien ?"

J’en avais en effet, et je vais vous en raconter une…



J’étais jeune prof au lycée de Nay. Quand nous avions fini la semaine, souvent le vendredi après les cours, nous allions nous promener sur « le chemin du petit canal ». Il y avait Nadja, ma sœur Chriss, souvent des copines, Jacqueline, Thérèse et leurs enfants, ou M Hélène, et... courant fièrement en tête de notre troupe joyeuse, notre chien Youp. Un petit terrier à poils durs, adopté au chenil de la SPA, assez mignon, que nous, nous trouvions irrésistible. De son enfance maltraitée, il avait gardé une cote visiblement cassée, un caractère courageux et agressif contre les plus gros que lui, et une affection sans bornes pour nous qui le lui rendions bien…

Le "chemin du petit canal" qui passait entre les champs de la plaine de Nay , était bordé d’un côté par un petit canal d’irrigation que surplombait la voie ferrée, et de l’autre par de belles prairies.

Souvent quand le train passait, le conducteur saluait d’un petit coup d’avertisseur notre groupe rieur…

De l’autre côté dans les champs, il y avait souvent des vaches , de belles blondes d’Aquitaine, gardées par le mince fil d’une clôture électrique…

Or il advint un jour que le petit Youp au lieu de filer droit et fier devant nous, s’arrêta au ras de la clôture à vaches et les héla d’un bref aboi. Et se produisit un fait totalement inhabituel et saisissant : tout le troupeau des vaches, se regroupant, accourut de tout le champ, se mit à galoper, droit sur la clôture…et nous !!!

C’est alors que je me montrai héroïque, comme un bon petit prof face à sa troupe de garnements indisciplinés. Je m’avançai, déterminée, face à elles, la main tendue dans un geste dominateur d’apaisement, et m’écriai : « Eh bien ! Eh bien ! »

Le ton, je ne peux vous le décrire, sinon vous dire qu’il était plein d’autorité, sans colère, ni affolement, d’une dignité souveraine…

Et les vaches s’arrêtèrent net !!!

Le chien aussi !

Nous passâmes notre chemin, un peu raides , très dignes, chien calmé, filles se retenant de rigoler…jusqu’à ce que le champ fût dépassé… !

Et là bien sûr de rire, de rire, de moi, de nous, du chien, des vaches… nous ne nous en sommes pas privées ! Et de ce que c’est que l’Autorité !!!


Et l’autre soir encore, à bien des années de distance, mes petites, de mon "Eh bien Eh bien," elles ne s’en lassaient pas , me le faisant faire et refaire, et riant :

Oh ! Mamou…Mamou… Quelle Autorité ! LA VACHE !!!!

mardi 1 novembre 2011

Il n’y a plus de saisons !

Oui ! la lumière baisse… Oui ! on (je ne sais qui ?) a décidé qu’il fallait se mettre à l’heure d’hiver… Oui ! tombent les feuilles…Oui! il est cinq heures à peine passées, et j'ai dû allumer ma lampe de travail...

Mais il a fait encore hier une chaude et lumineuse après midi…

J’ai vu dans le quartier deux cerisiers en fleurs et dans mon jardin, c’est une délicieuse anarchie du n’importe quoi pourvu que ça fleurisse !
J’ai recueilli l’image d’un camélia programmé normalement février mars, qui tout seul sur le sommet de son arbre s’est dit : « « Il fait si doux ! Et pourquoi pas ? »…


Une rose d’automne que le poète dit « plus qu’une autre exquise »…

Un buisson de houx pour l’an neuf déjà fin prêt de peur de manquer la fête…

Des chrysanthèmes, « fleurs d’or » et d’ombre mauve, que l’on préfère aujourd’hui appeler « marguerites d’automne », bien ponctuelles à l'heure de Toussaint…



Un bégonia d’été qui n’en finit pas de splendeur, près d’une azalée qui fleurit en free lance quelle que soit la saison…


Et une coupe de pensées préparée pour penser aux parents disparus…

Il n'y a plus de saisons, tant mieux ... cette fantaisie m'enchante!!!