vendredi 21 août 2009

Démons et merveilles, vents et marées…






Marées nostrae


Chaque année, dès que nous arrivons à Hossegor, l’un des premiers soucis ou des premiers rituels est de se procurer un « calendrier des marées ». Dès lors, chaque jour nous nous attachons à une prévision de baignade qui ne se satisfait pas d’une répétition simple et systématique : « A quelle heure la pleine mer qui permet le bain dans le lac ou le canal à la marée montante, quand l’eau est claire et que le courant nous emporte ? À quelle heure la basse mer, la plus propice aux vagues « à prendre » sur les plages de l’océan ? Quelle plage aujourd’hui, la plage Sud d’ordinaire plus calme ?ou la Gravière, toujours agitée,creusée par le ressac, que nous appelions autrefois la plage « Les sauvages » ?
Encore faudra-t-il tenir compte de la force de la mer… trop forte on ne peut en savourer le plaisir, trop peu agitée non plus…
Cette alchimie quotidiennement pesée sous l’oeil amusé voire un peu moqueur de Michel nous offre un nombre variable de moments délicieux où convergent le beau temps, la force des vagues, la hauteur de l’eau et le lieu de baignade choisi…
Parfois malgré la minutie de la prévision, l’alchimie n’agit pas : trop de « noroît » qui crête les vagues et donne la chair de poule, trop de brindilles dans le canal qui troublent l’eau, trop de tout, trop peu de rien…
Parfois, il arrive qu’elle se produise contre toute attente, accidentellement en somme : une erreur de rendez-vous des copains qui nous conduit à la Gravière où la mer, sous un soleil délicieux, offre un trop gros rouleau de bord, rend la baignade moins nonchalante, demande effort pour le franchir et s’éloigner un peu vers le large, cause un petit stress de tension pour revenir au bord sans se faire aplatir par le ressac… Et ce mélange délicieux de tension et de bien-être s’avère un plaisir unique…
Ou bien c’est la survenue d’un vent de terre qui reste chaud, fait fumer le sommet de la vague qu’il nous jette au visage en brume salée…une marée plus haute qui envahit la plage de sable, gonfle le canal, pousse le courant…une tiédeur inhabituelle de l’eau qui prolonge les bains jusqu’à satiété.



Ainsi vont dans leur fragilité et leur intensité certains plaisirs de la vie dépendant si j’ose dire de leur « opportunité » : les jeux de la mer, la tauromachie, et …les concerts !
R Galliano dans une interview (Acoustic Trio, DVD Dreyfus) souligne le caractère « fragile » et aléatoire de chaque concert. Quelque bonne énergie qu’on y mette, on ne maîtrise pas l’alchimie qui se crée entre les musiciens, le public, le lieu. Lorsqu’elle se produit, survient une sorte de magie. On sent alors, dit-il, une transmission d’énergie qui nous vient du public et de son écoute…on se sent décoller…
Et c’est pour nous qui écoutons, comme un bain de pleine mer, intense, délicieux, juste un peu stressant et très exaltant, quand le rouleau de bord nous soulève juste avant de se briser avec bruit sur le sable en une chantilly
d’écume…