mardi 29 mai 2012

Ivresse de Chèvrefeuille




 Hier matin , au début d’une radieuse matinée , j’ai décidé d’y croire, au beau temps. Tant de fois il nous a bercé cette année de ses mirages de soleil que j’étais tentée par le scepticisme et le laisser aller . les terrasses étaient poisseuses et tachées par la trace des  feuilles hachées par la pluie et des prunes massacrées par le vent …
J’ai donc pris mon lave-pont pour effacer les traces du gros temps mais, comme chacun sait, les lave-pont c’est pour les jeunes moussaillons, et je m’y serais vite fatiguée si peu à peu l’odeur du chèvrefeuille ne m’avait pris le nez et la tête …J’aime cette odeur à la fois fine et entêtante , et ce printemps, profitant de mon laissez faire, les tiges  ténues et obstinées du chèvrefeuille ont progressé, envahi la haie, s’emmêlant, triomphantes, aux rosiers , à la vigne vierge,  et même au vigoureux jasmin…
Et dans ce triomphe olfactif et végétal, je me suis sentie toute « requinquée.. ».


Le parfum, c’est un peu comme la musique, ou la mer ? …ou encore…les fleurs ? Ou….les mots…ou….
Et justement je suis tombée, il y a quelques jours, sur un poème bien célèbre pourtant, mais que j’avais oublié, et qui me parle …de chèvrefeuille ? Non !

Enivrez-vous
Il faut être toujours ivre. Tout est là : c’est l’unique question. Pour ne pas sentir l’horrible fardeau du temps qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut vous enivrer sans trêve.
Mais de quoi ? de vin, de poésie ou de vertu, à votre guise. Mais enivrez-vous.
Et si quelquefois , sur les marches d’un palais, sur l’herbe verte d’un fossé, dans la solitude morne de votre chambre, vous vous réveillez, l’ivresse déjà diminuée ou disparue, demandez au vent, à la vague, à l’étoile, à l’oiseau, à l’horloge , à tout ce qui fuit, à tout ce qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce qui parle, demandez quelle heure il est ; et le vent , la vague , l’étoile, l’oiseau, l’horloge, vous répondront : « Il est l’heure de s’enivrer ! Pour ne pas être les esclaves martyrisés du Temps, enivrez-vous ; enivrez-vous sans cesse ! De vin, de poésie, ou de vertu à votre guise. »
Petits poèmes en prose, Charles Baudelaire





« Ma guise » ajouterait à coup sûr "de musique, de musique !  de chants et      de parfums", au vin et à la poésie …
Quant à la vertu ????





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