Rosa est notre prof d’espagnol
Outre sa fine compétence,
souriante et indulgente, à nous enseigner cette langue, elle nous fait part de ce qu’elle aime de la culture de Son pays et
de l’Amérique Latine . Et discute ainsi
avec l’une de son voyage en Andalousie, avec l’autre du Pays basque, avec
toutes des textes documentaires du manuel…
De mon côté, l’accordéon, le
bandonéon, Richard Galliano, m’ont sensibilisée au Chamamé, à Chango Spaziuk, à
Raul Barboza , et aussi à Astor Piazzolla
, à la musique argentine et au tango.
Il y a quelques soirs, j’ai revu
Volver, que j’adore ! Et bien sûr écouté encore et encore la belle chanson
de Carlos Cardel et Alfredo le Pera interprétée par Estrella Morente…
Je suis fascinée par la vision du
monde de Pedro Almodovar , l’intime mélange de réalisme et de fiction, ses situations invraisemblables qui
s’imposent avec évidence comme
véridiques , les relations entre les personnages saisissantes,
émouvantes, mélodramatiques , tendres et cruelles .
Et par-dessus tout je suis
toujours touchée profondément par les femmes de Pedro : leur énergie, leur
créativité à surmonter les situations critiques, la relation des mères et de
leurs filles, leur solidarité de femmes pour aborder un monde
quasi tragique dans les couleurs flamboyantes du technicolor, où frappent la mort et la maladie, où sévissent l’inceste et
les crimes de sang, à « l’Antique »… !
Avec un humour allègre et désespéré , une force vitale , une vitalité et un optimisme volontaristes,
Penelope Cruz en tête, elles inventent des solutions macabres, poétiques et
efficaces aux pires avatars…
Nous avons donc réécouté Volver avec Rosa et
lu le texte d’Alfredo Le Pera .
Comme nous parlions de ce regard
positif qu’il porte sur les femmes, elle
nous a apporté un beau texte d’Almodovar écrit pour El Pais le 14
septembre1999, après la mort de sa mère
El último sueño
Ce dernier songe, c’est, par ce
vendredi ensoleillé dont la lumière entrait par la fenêtre, c’est celui de
l’orage que sa mère rêve et sur lequel elle les interroge et sur lequel s’interroge
aussi Pedro…
« A quel orage ma mère
faisait-elle allusion dans son rêve
ultime ? »
Il me semble que cette
interrogation, après le récit des derniers moments de sa mère, s’informant de
leur travail, de leur déplacements , de savoir qui allait garder les garçons si
Agustin accompagnait son frère comme à
l’accoutumée, et si les courses étaient faites pour cette fin de semaine où les
enfants se trouveraient chez leur père, cette intrusion de « l’imaginé »
dans ces moments de grande lucidité pratique, est à l’image qu’il nous présente
de sa mère, qui lui apprit une chose
précieuse pour sa vie et son métier, « la différence entre la fiction et
la réalité et que le réalité doit être
complétée par la fiction pour être
complète , plus agréable, plus vivable… »
Ainsi « écrivain public »
pour ses voisines, lisait-elle les lettres reçues par celles-ci en en
complétant les manques par des détails bien choisis, en adéquation avec leurs
vies, que les auteurs avaient sans doute oubliés mais que sûrement ils auraient
signés volontiers, et qui laissaient leurs destinatrices si heureuses…
Outre cet enseignement
fondamental et précieux qu’il reçut d’elle , nul doute qu’il ait trouvé en elle l’image des femmes pleines d’énergie
et de créativité de ses films , de celles qui ont le pouvoir de « faire jaillir du lait d’une jarre à huile »,
l’image des mères qui « sans rien
faire de spécial sont le recours, le principe
de réalité des choses »…
Cette mère se dessine en filigrane dans tous ces personnages splendides et bouleversants
de femmes qu’il a inventés, ces superbes actrices, Pénélope Cruz , Carmen
Maura , Victoria Abril …
Pour moi désormais je sens la
présence de cette femme, qui se fâchait qu’il n’ait pas inclus son
patronyme dans son nom public, « C’est quoi, cet Almodovar tout court ? !!!! » Je l’imagine sur la toile de fond d’un pauvre
village entre l’Estramadura et la
Mancha …« un village qui avait surgi sur un terrain
d’ardoises escarpées et tranchantes » où les talons aiguilles
des filles n’auraient pas pu marcher…
Et de cette réalité la fiction a
bâti ses enchantements…
Les enchantements de Pedro Almodovar
Caballero !!!
2 commentaires:
Je partage avec toi la passion pour Almodovar, et bien que je n'aie pas appris l'espagnol, j'aime voir ses films en VO - sous titrée, faut rien exagérer!! - car autrement on perd l'ambiance du film. Et j'aime beaucoup les musiques qu'il choisit... Sylvie m'a sœur m'a d'ailleurs fait une copie d'un double CD de musiques de ses films, qu'elle avait acheté à La Villette, où nous sommes allées voir l'expo " Musique et Cinéma"; j'ai découvert des musiques dont je ne savais pas qu'elles avaient été utilisées dans ses films. Sinon, mon coup de cœur "toutes catégories" c'est "Parle avec elle"... Mon mari n'a jamais voulu le voir....
Je ne connais pas si bien Almodovar que toi en particulier "Parle avec elle..."Je partage ta remarque sur les merveilleuses musiques qu'il choisit ...je vais me procurer "Parle avec elle"...Amitiés... bonsoir, bises
Enregistrer un commentaire