En feuilletant mon recueil de Charmes à la recherche d’un autre poème, j’ai redécouvert ce petit poème –ci :
Les Pas
Tes pas, enfants de mon silence,
Saintement, lentement placés
Vers le lit de ma vigilance
Procèdent muets et glacés
Personne pure, ombre divine,
Qu’ils sont doux, tes pas retenus !
Dieux !...tous les dons que je devine
Viennent à moi sur ces pieds nus !
Si de tes lèvres avancées,
Tu prépares pour l’apaiser,
A l’habitant de mes pensées
La nourriture d’un baiser,
Ne hâte pas cet acte tendre,
Douceur d’être et de n’être pas
Car j’ai vécu de vous attendre
Et mon cœur n’était que vos pas.
S’autorisant de la conception poétique revendiquée par l’auteur : « Mes vers ont le sens qu’on leur prête », je me rappelle que certains commentateurs voyaient là une subtile métaphore de L’INSPIRATION !!!
La jugeant trop intellectuelle et un peu réductrice, et profitant de la liberté d’interprétation consentie par maître Paul à ses lecteurs, je m’étais toujours contentée de le ressentir comme un tendre et intimiste poème d’amour, dont j’aimais le rythme de pas retenus, « rythme aux pieds nus » disait Alain…J’en aimais aussi la préciosité étymologique de certains mots qui, se souvenant du latin, font procéder les pas au lieu de les faire marcher et rendent vigilante la veille de l’insomnie...
Mais cette fois en le relisant mon interprétation se fait divagatrice.
Est-ce l’influence contextuelle du beau concert de Daniel Mille dont j’ai déjà dit tout le bien que j’en pensais, « L’ATTENTE » ? Est-ce ce mois de Nouvel An placé sous le signe de l'attente de la remontée du soleil dans le ciel et de la sève dans les arbres ? Cette fois j’ai été plutôt sensible à l’expression de ces états de transition, délicieux et un peu douloureux à la fois, états d’attente, états d’ « Avent »…
« Douceur d’être et de n’être pas »
Je me suis alors rappelé une demande de mon Payou. Il vivait seul après la mort de ma mère et nous allions le voir souvent, et parfois par surprise, quand l’occasion se présentait…Loin de faire fi de ces surprises, il me dit un jour : « C’est bien aussi quand tu m’annonces bien en avance que tu vas venir…En plus de vous voir, j’ai aussi tout le plaisir de vous attendre… »
Comme, enfants, nous avions le plaisir de l’attente de Noël, et plus tard le bonheur des jours précédant les vacances…
J’ajouterai, dans le contexte actuel de ces derniers jours, où l’insomnie est assez souvent au rendez-vous de mes nuits, et où parfois au lieu de compter des moutons ou des nuages, j’essaie d’attraper le sommeil en me disant –mentalement, je vous rassure !!!!- des poèmes appris dans mon enfance ou mes années d’enseignement, des poèmes bien aimés….
J’ajouterai donc une plus triviale interprétation : ce poème pourrait bien avoir pour thème et pour titre
INSOMNIE, INSOMNIE CHERIE…
1 commentaire:
J'avoue que je ne connaissais pas ce poème et je me contente de le savourer avant de l'analyser... Ce que tu écris du plaisir de l'attente, plaisir décuplé par l'attente, est tellement vrai.
Edith
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