C’était à Castres il y a huit
jours
Et au théâtre , il y avait
Frédéric Viale
Ecouter Frédéric fut d’abord
l’écouter, en une sorte de master class informelle parler de sa musique…
Je sais , je le dis souvent , je me satisfais
des textes sans explication de textes, des tableaux sans visites guidées, du
plaisir de conduire sans compréhension de la mécanique…et de la musique sans
l’éclaircissement du solfège…
Mais , parfois je l’avoue, je me
laisse au prendre au plaisir de l’explicitation par les musiciens de certains
aspects techniques simples,( mais à mon niveau, nouveaux), par l’éclairage
soudain qu’ils donnent aux œuvres jouées et appréciées…
Il faut à cet exercice beaucoup
de simplicité et de clarté, de discrétion , toutes qualités qu’a eues Frédéric
dans cet après midi, où entraient en jeu aussi une sorte d’intimité , de
détente, dans un lieu harmonieux et lumineux.
J’ai retenu ce qui m’intéressait
particulièrement ,
Par exemple le rôle imparti
par Frédéric dans la formation aux autres musiciens :
..Evidemment le rythme, qui ne de réduit pas à assurer la « rythmique » ,
mais auquel Frédéric demande me semble-t-il
d’être différent, d’être un élément de diversification , par leur coloration brésilienne, d’ ouvrir
en quelque sorte dans sa musique des espaces de liberté, j’imagine comme le fait
la variation métrique des vers d’un poème.
..A ses compagnons aussi le rôle
de la variation, et de l’improvisation une fois le thème posé.
J’ai mieux compris
parce que Frédéric nous l’a donné à entendre le principe, la structure, et l’intérêt des basses composées , et aussi parce
que cette compréhension technique débouche dans les explications de Frédéric sur une implication de style et
d’esthétique : en effet il nous dit y trouver un appui d’accompagnement précieux,
mais aussi ne pas en faire un usage trop systématique de peur de tomber dans la lourdeur et la rigidité d’un répétitif tout fait.
J’ai bien reconnu parce que bien entendu « le son musette » »démontré »,
et, presque ! , bien compris ce qui le produit…
Ô la merveille d’Indifférence jouée musette et moins
musette….mais toujours merveille…
Nous avons souvent souhaité, lors
des festivals auxquels nous assistons, de pouvoir bénéficier ainsi de quelques
moments où les musiciens nous
expliqueraient ou nous parleraient simplement de leur musique. Alors que les
master classe ne sont destinées généralement qu’aux praticiens dont nous ne
sommes pas !
Et samedi à Castres , il y eut
des « mots » en toute simplicité,
pleins d’intérêt…. mais il faut bien avouer que le plus délicieux fut
que Frédéric les illustra ou bien plus simplement nous joua des moments de son
programme « L a Belle chose »
Et le moindre plaisir de l’après midi ne fut pas
d’entendre comme un précieux(quasi royal !!!)privilège, Frédéric en solo comme un en concert privé…
Je pense que c’est un grand plaisir
d’écouter des musiciens solo.
Cela ne contredit pas bien sûr le
grand plaisir des formations , où se croisent, se fondent , s’unissent et se
désunissent, les sons des instruments, les jeux des musiciens…
Mais il y a dans le solo comme un dialogue tendu , fragile
, et périlleux, entre le musicien et son public , l’impression qu’il joue pour
nous , seul exposé au danger de l’erreur mais aussi à la liberté de
l’interprétation
Le solo est certes un exercice
singulier et saisissant …
« Plus qu’un chanteur que l’orchestre
ou un instrumentiste accompagne, cet homme seul en scène avec son accordéon
embrassé, semble nous inviter à un face à face intime et tendu…
C’est un concert singulier sans doute pour
lui, mais aussi pour nous, écouteurs passionnés qui concentrons toutes nos
attentes sur celui( ou celle) qui va jouer pour nous . »
Merci donc à Frédéric pour ces lumineuses
explications et pour ce solo .
On ne peut
que souhaiter qu’il en offre à d’autres publics le grand plaisir !
Et puis le soir le Concert !
Pour le
compte rendu, je me contenterai de vous inviter à le lire dans le blog de Michel:
Je dirai seulement que je l’ai
vécu comme intense ,dans l’implication des musiciens , la tension de Frédéric à
l’accordéon et la réactivité,
chaleureuse, pertinente, du public , enchanté et connaisseur.
Je dirai aussi une impression
personnelle quant à la composition du concert
qui, comme on dirait en tauromachie(Castres est un lieu de
peinture,hispanique !) est allé
« a mas », « en montée » de l’émotion, de l’énergie, du
plaisir musical, jusqu’au chaleureux enthousiasme final !
Peut-être l’émotion initiale d’Iguaçu d’abord, puis la musicalité de La Belle Chose, l’énergie et le rythme
enlevé de Little Kevin, la douceur
mélodique de Valsa som nome avec une
subtilité du rythme complexe par décalages des différents rythmes..Et puis en
final ,Locomotango , dont je ne dirai
rien sinon que pour moi , c’est un chef-d’oeuvre et qu’il entraîne tout le
monde, et les musiciens, dans une Alegria déchaînée !!!
Je dirai encore comme Michel, que
le concert nous amène à repenser à la « non-directivité » revendiquée
par Frédéric Viale (et sans doute à la notion de non directivité en général !).
Certes il ouvre à ses compagnons
de grands et réels espaces de liberté, mais c’est avec une grande maîtrise de
l’ensemble, une présence évidente et remarquablement assumée, une vigilance tendue
au jeu de chacun, une
« direction » non-directive en somme , mais efficace et claire … !
Je dirai encore que LA BELLE
CHOSE est un superbe CD qui ouvre des
attentes et que le concert passe la promesse du CD !!!
Le moment d’entretien-
explicitation de Frédéric m’a inspiré un petit retour personnel sur un problème
qui m’a toujours préoccupée personnellement, en tant qu’enseignante, sur le
rôle de l’explication dans la compréhension et le plaisir esthétique de l’œuvre
d’art… :
(…Et je sais, je le dis souvent , je me satisfais
des textes sans explication de textes, des tableaux sans visites guidées, du
plaisir de conduire sans compréhension de la mécanique…et de la musique sans
l’éclaircissement du solfège.
Mais , parfois je l’avoue je me
laisse au prendre au plaisir de l’explicitation par certains musiciens de
certains aspects techniques simples, mais à mon niveau nouveaux, par
l’éclairage soudain qu’ls donnent aux œuvres jouées et appréciées…)
Je me souviens avec émotion d’une
notion que j’étais amenée à utiliser pour mon travail , celle de systèmes de
personnages, et parfois je me laissais prendre au plaisir de l’ordonner en
tableaux d’où par comparaisons et
différences, ressortaient des indices significatifs lumineux . J’en étais un
peu embarrassée parfois, craignant de rebuter mes apprentis lecteurs
d’histoires , me disant que leur intuition suffisait largement, dans la simple
lecture, à saisir dans la trame du texte la subtile construction les fils
ténus et signifiants .
Jusqu’au jour où l’une de mes
élèves de terminale me dit en sortant : « pourquoi, mais
pourquoi ne nous dit-on pas ces choses là plus tôt, comme le rapport des
personnages m’apparait plus évident et complexe
et plus intéressant maintenant » !!!!
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire