mercredi 25 avril 2012

Henri Chenuet à « Ça va Jazzer »



Dans cette petite heure d’un agréable partage avec  Mathieu et Henri  Chenuet, poly instrumentiste et producteur de « musique vivante » à Cholet, le plaisir premier était bien sûr d’écouter  quelques bien jolies musiques…Surprise poétique des titres : « Instant Transparent » tiré du disque de même nom, « Drôle d’ idée », et bien sûr « Cœur de Trèfle »,en deux versions, et avec petit bonsoir d’amitié de Mathieu (délice !) et de son invité (la classe !!!)…Mélodies mélodieuses, très belle trompette de Roger Guérin, batterie remarquable d'Henri Chenuet sur la deuxième version de Cœur de Trèfle.
Des morceaux finement commentés au passage, par  une image qui explicite joliment  leur  double processus de création :   « les musiques  que j’ai laissé faire et les  musiques que j’ai faites » et j’ai pensé: "comme les textes en fait : il y a ceux pour lesquels les doigts courent tout seuls sur le clavier ou la feuille ; il y a ceux dont la construction se remanie, tâtonne en phrases et ratures enchevêtrées…"
Intéressante aussi la réflexion sur le rapport aux « modèles », aux « maîtres » admirés :
" passer son temps à   chercher à ne pas les imiter."  En somme construire sans doute son imitation pour en dégager une voie (ou voix ?) personnelle ? là encore, thème familier et passionnant, de la littérature : « in-nutrition » de l’imitation de nos classiques, ou « En finir avec les chefs d’œuvre !!! » d’A. Arthaud
Sans compter que dans le cas de sa musique, Henri Chenuet  souligne qu’étant toujours produite pour être enregistrée, la  réécoute permet de prendre du recul nécessaire pou réguler  la prégnance du modèle…
Par ailleurs ce qui m’a particulièrement intéressée c’est que,  parce qu’il est poly-instrumentiste  et producteur de spectacles  il exprime un point de vue différent sur le travail musical, la musique « vivante » des musiciens qui collaborent pour la produire
Plus qu’un  point de vue sur le  rapport privilégié, parfois quasi passionnel, avec un instrument,  que les interviews de Mathieu nous ont souvent permis d’explorer , il présente  l’instrument comme un rôle dans un groupe musical…en somme, encore une fois comme dans un roman, les personnages ont à se définir certes par un caractère  propre mais doivent aussi participer à un système interactif de personnages, par leur rôle dynamique mais aussi  par un rôle esthétique , une esthétique des complémentarités  ou des contrastes, des harmonies ou des ruptures, …Il y a la Brune et la blonde, Pierrot qui écrit le nuit et Arlequin qui danse et chante au soleil , le héros et ses adjuvants, ou ses opposants divers qui déterminent notre plaisir esthétique. Ainsi pour les instruments, il y a le soliste et l’accompagnateur, et ces rôles se complètent ou s’inversent tour à tour… Deux mots clés  expriment dans le prolongement de cette idée  ce qui caractérise le jazz pour lui:"le partage  et  l’improvisation" « temps où chacun s’exprime et dit ce qu’il est , si on a quelque chose à dire, bien sûr » !!!
Noté aussi un  certain éclairage personnel sur l’histoire du jazz, "pas si américain que ça,  mais au carrefour de divers horizons , l’Italie pour la mélodie, l’Afrique pour le rythme, ou  l’Irlande, ou la France celle de Django et de Gus."...
Refus comme c’est maintenant habituel à  "Ça va jazzer" (merci Mathieu et ses invités !!!) des catégorisations, petit coup de patte (qui me réjouit !) au puristes spécialistes, qui  rajoutent classifications  aux classifications..(Cf Jazz ou pas jazz)
 Encore souligné la nécessité d’écouter encore et encore, et selon les moments de notre vie des choses diverses, d’ aller au concert « qui  n’est chaque fois ni tout à fait le même et ni tout à fait un autre"
Et au détour de la réflexion, de délicieux   petits échos de choses que nous avons aimées à un moment de notre vie justement, et un peu oubliées…
A propos de Bach, Jacques Loussier et son « play Bach » …
Et le merveilleux Orfeu Negro de Marcel Camus, dont le souvenir éveille  la vision fugitive du beau visage de Marpessa Dawn… Emotion de son thème si beau…joué à la scie musicale … !!!
Ce moment de discussion fut à la fois pour moi un plaisir lié à la musique , son écoute d'abord,  et aussi  une approche de la compréhension du travail musical, et le plaisir, par l’occasion donnée par ces propos, de divaguer à mon habitude vers ma réflexion familière sur l’écriture, la littérature, la création artistique…
 Pour mes rêveries divagatrices,  vous pouvez…(oui ! s’il vous plaît !) continuer de lire un peu mon blog !

Pour le plaisir de la musique, penser à qu’elle est, mais  avant tout l’écouter :


 Pour « Instant transparent » et « Cœur de Trèfle » et beaucoup d’autres jolis moments du disque,...







lundi 23 avril 2012

Hossegor, notre Arche dans la tempête...


Cette maison a été construite pour s’y retrouver en  famille et avec des amis…
Enfant, j’ai participé à l’espoir et aux efforts de mes parents pour construire le modeste bungalow initial. Michel s’y est joint à nous plus tard . Nadia dès ses premiers mois. Sébastien est arrivé. Puis Charlotte à un mois et  Camille à quinze jours ! (c’était  « l’année de la canicule, le pédiatre avait  conseillé de l’y abriter de la chaleur, elle a dormi tout l’été dans le jardin sous un tulle qui l’abritait des abeilles..)
Puis ce fut bien petit pour tout ce monde, et nous, qui n’avions jamais  eu d’ambition  de propriété foncière, nous nous sommes étourdiment engagés dans un agrandissement …
On a manqué d’un maçon, on a manqué de finance, on a manqué d’étanchéité sur  la terrasse, on a eu un architecte désintéressé et dévoué, un charpentier remarquable , on a essayé de garder les arbres alentour , on a eu le talent des jeunes et leur énergie ,ils ont fait les finitions des finitions… Contre vents et marées, on l’a l’eu enfin notre maison au bord de notre Océan..!
On a tremblé quand Klaus a dévasté nos Landes (ô les arbres !!!) ! Avec obstination on a fait réparer et encore réparer, la terrasse (ô la pluie !!)…Dès que nous le pouvons nous nous y retrouvons…Comme ces derniers jours…
Mais nous sommes, Michel et moi, je crois à jamais marqués de tous les avatars vécus…Le moindre vent qui d’aventure fait rider la face de l’eau nous prend la tête et le sommeil…
La semaine dernière, du vent, il y en avait, des embellies, pas beaucoup, de la pluie presque sans arrêt, et en bourrasques, qui s’en donnaient à cœur joie le soir sur notre toit, faisant frotter les branches des chênes lièges sur les tuiles….

Certes, le jour, nous étions bien, là ensemble …Nous avions même convié ma sœur pour fêter les anniversaires d’avril, assisté au remarquable spectacle de Hip Hop conçu par les filles, consulté assidûment blogs et copains de FB,  bu un merveilleux Sainte Croix du Mont, légué  par notre papa, et embaumé notre demeure des odeurs délicates des premières asperges achetées sur la route , et des champignons de paris de la sauce pour le bœuf à la bordelaise…

Certes le jour, nous allions voir la mer, fastueuse, et toujours elle reprenait sur moi son pouvoir magique de fascination.


Nous sommes aussi allés voir aussi la  délicieuse expo d’un artiste surfeur qui fait surgir pour nos  yeux intrigués des pays imaginés, et sait nous parler de l’Hossegor Spleen…
Hossegor  Spleen, Pablo Ugartetxea

Mais la nuit, quand on entendait la mer gronder, le vent souffler, la pluie crépiter, les hantises d’ouragans  nous reprenaient...


Et je me disais, tous, là ensemble, on se croirait réfugiés dans une nef fragile, qui craque au vent et sous la houle … on se penserait sur une Arche dans la tempête… 

samedi 21 avril 2012

Renaud Garcia Fons, le pèlerin de Marcevol


AQÂJÂN (pièce pour contrebasse seule) par Koalaprod

 SOLO, the Marcevol Concert



A Marcevol, Renaud Garcia Fons revisite des lieux d’enfance, où sans doute il s’est promené jadis…
Il a choisi aussi, lui qui jusque là n’a enregistré qu’en studio, un lieu à l’acoustique remarquable, qui devienne «  le prolongement de son instrument et lui ouvre des espaces sonores… ».
Un lieu de Spiritualité aussi, pour la Musique, qui est comme le « langage de l’esprit », et exprime,  au delà des mots « des sentiments si intraduisibles qu’il faut la musique pour les suggérer ».
Et c’est bien d’un pèlerinage dans la musique de sa vie qu’il s’agit, d’un parcours dans les musiques qu’il aime, travaille, célèbre, et finalement fait siennes.
En Méditerranée, mais aussi « Ailleurs »,  dans le monde et le temps.
Un voyage érudit et inspiré…La buleria du Flamenco (Bajo de guia) la ballade irlandaise (Far Ballad) , Palerme (Palermo Notturno), la musique baroque (Hacia Compostela), la musique catalane  du Moyen Age (Marcevol), l’Argentine des campesinos qui inspira le chant et la guitare d’Atahualpa Yupanqui, Le Rock (Rock Wandering)…la culture jazz qui ménage dans le programme « prévu et écrit » du concert, des plages à improviser...et d’autres trdtitions encore que je ne sais identifier.
Et c’est chaque fois ni « tout à fait le même » rythme « et le même » son… ni tout à fait un autre…
Car la variété du parcours, si elle enchante  l’oreille de ses variations, conserve une  continuité qui s’impose avec évidence : le style Garcia Fons.


Un style évident pour moi  comme sont  certaines œuvres d’art, même si je  peine à le définir : il tient à la perfection d’une technique maitrisée qui entrelace avec créativité les possibles de l’instrument. Il tient à la beauté  de mélodies déchirantes qui s’imposent à l’évidence comme siennes. Il tient pour moi à une connotation avec une sorte de mélancolie profonde, qui s’apparente aux chants sacrés…
Méditerranée certes, ou Línea del Sur, mais l’Enéide, mystique et géorgique, ou un Orient aux accords insolites, plutôt que la mer scintillante de « mille diamants d’imperceptible écume » sous le soleil de midi !!!  .
La pochette du disque situe bien la lumière de son chant, crépuscule et aube lumineuse, sur une terre un peu  sauvage…

Et c’est un voyage SOLO
Comme un temps de recueillement…
Bien sûr, le DVD en témoigne, il y a là un  public, chaleureux et plus encore fasciné, qui le regarde, à la fin de chaque morceau,  quand s’éteint la vibration de la dernière note, sortir de son voyage intérieur, et les regarder sans sourire…
Mais bien sûr, c’est en fait un DUO, un duo fusionnel avec sa contrebasse, qu’il ne cesse d’embrasser étroitement depuis l’âge de 16 ans. Comme un Pygmalion touché par le coup de foudre, il a rêvé de faire  oublier qu’elle n’était que contrebasse, rêvé pour elle d’une voie soliste (ou voix soliste ?) « à la croisée de toutes les techniques de jeu des instruments à cordes ». De la transformer  en un instrument universel, l’instrument de tous les instruments, et de toutes les musiques …


« Pour jouer, pour chanter, pour raconter des histoires aux gens, leur ouvrir des étendues » pour des voyages imaginés…
Et il a réussi : c’est, tout simplement, une musique magique que ce Marcevol Solo !

Le CD, pour écouter cette musique …
Le DVD, pour entendre et voir le concert dans le Prieuré, et pour écouter dans les collines sauvages de Marcevol, Renaud Garcia Fons en parler « SOLO »…
Car c’est une interview sans intervieweur…un monologue pensif…un voyage intérieur !!!!








lundi 16 avril 2012

A Réécouter : Tommy Luke à « Ça va jazzer »!!!




Pour qui n’est pas musicienne, mais simple amateur de musique, moi en l’occurrence , la batterie est un mystère de la musique . J’en perçois la présence , je dirais même une fondamentale présence dans les compositions que j’écoute…et la nécessité de pallier son absence le cas échéant par d’autres expressions rythmiques. Je saïs bien dire si je l’aime ou non, et même lui associer quelque connotation exprimant l’effet que j’en ressens : légèreté, voire délicatesse, vibration douce ou énervante , force, virtuosité, basse ou claire…

Mais je me pose souvent des questions sur la musique qu’elle est, simple rythme ou réellement « son »/ « sons » ???
Enfin je m’en posais…
Je n’ai pas écouté « Ça va jazzer » jeudi, pour raisons diverses, dont la moins avouée était peut-être qu’écouter un batteur ne m’intéressait pas vraiment. Mais Mathieu est mon ami, et j’ai grande confiance en ses choix musicaux et admire sa détermination à approfondir la question fondamentale: pour quoi l’on fait de la musique (de jazz en l’occurrence), ou même plus difficile, et pour moi plus pertinent, pour quoi on choisit d’aimer et d’écouter celle-ci ou celle-là ?
J’ai donc finalement écouté en podcast son interview de Tommy Luke et je ne regrette pas … !!!
Car si les extraits de musique choisis mettaient remarquablement bien en évidence divers aspects de l’instrument , ce qui m’a vivement intéressée, c’est que Tommy Luke , avec netteté et précision, y a exprimé sans détours, la manière personnelle dont il conçoit ce qu’est pour lui la musique (de jazz entre autres mais pas seulement ) et jouer de la batterie …
Et il a répondu à certaines questions que je me posais (et évidemment comme c’est toujours le cas, ce faisant en a soulevé d’autres !!!)
Je retiendrais dans ses propos ce qui m’a éclairée, sans doute parce qu’il s’exprime comme je le fais et le comprends par des images…
Que la batterie a un aspect mélodique et un aspect rythmique…
Que son travail, sa recherche, son cheminement avait été en particulier de faire sonner mélodiquement sa batterie, faire surgir des images …
Car pour lui faire de la musique, c’est produire des images…des images pour les autres…le rôle de la batterie dans ces images c’est de découper le temps et les différents éléments …Il cherche à apporter des « couleurs » mais en fidélité, en accord avec le contexte…et c’est là la difficulté !

Toujours aussi net et sans détours : qu’il aime le jazz qui l’emporte et lui donne des émotions.. Mais il lui faut un fil conducteur : il n’aime pas le free jazz…il lui faut une super mélodie à l’intérieur, après tout est possible !
Quant aux émotions , chacun les nourrit différemment : allant pour la même tristesse vers telle ou telle musique, telle ou telle mélodie ! Chacun a sa propre musique qui peut faire fi des étiquettes et classifications et se construire par des mélanges …

Pourquoi ai-je apprécié et aimé ces remarques : comme je le disais , elles donnaient réponse à ma question sur le son de la batterie. Et par ailleurs sur musique , images (que j’appelle souvent connotations) émotion, jazz or no jazz ! peu importe,elles correspondaient à ce que je ressens …
En outre elles n’étaient pas seulement remarques d’un musicien qui fait la musique mais exprimaient une sorte de décentration vers le point de vue de celui qui écoute.
Et l’ encourageant aussi au passage à communiquer avec les musiciens ( « hyperheureux de ces échanges, de partager avec ceux qui les ont écoutés… »)
Ceci me conforte, moi pour qui c’est un énorme effort d’aller à la rencontre des musiciens après le concert, surtout ceux qui m’impressionnent le plus, peur que ça leur pèse ou les dérange !

J’ose faire depuis quelque temps ce petit pas vers eux car très modestement bien sûr je me souviens dans mon travail avoir été tellement été heureuse des échanges avec ceux qui furent en quelque sorte mon public, et plus encore quand l’effort de la tâche avait été dur, heureuse qu’on me dise que oui c’était bien parce que….J’en ai tiré force et souvent enseignement, que ce geste soit venu de stagiaires adultes aguerris et impressionnants ou de petits gamins et gamines non moins sagaces!
J’ose le faire, et souvent je constate qu’ils en semblent heureux, si grands soient-ils à mes yeux profanes…

Pour terminer, bien aimé aussi quelque chose de direct dans sa personnalité !!! Qui, en un temps où il est de bon ton d’être voyageur tous azimuts, ne craint pas de dire qu’il ne bouge pas, qu’il vit très refermé en sa ville de Nantes…

Merci Mathieu de l'avoir invité!




dimanche 15 avril 2012

Supplique pour qu’on n’enterre pas les textes à l’école !



Cela a commencé par une conversation devant le portail du collège. Depuis que je suis passée de l’autre côté du portail, je continue pourtant d’écouter les échos de l’Ecole.
Ma voisine et son mari - quatre enfants auxquels ils sont très attentifs, l’aînée en 3ème - étaient là à attendre la sortie. Nous voisinions en attendant nos enfants…

Elle : Ils ne lisent plus de livres au collège…Enfin on vient d’acheter Candide , c’est bien, mais c’est tout petit..(l’air déçu)
Moi : C’est un texte plein de sens, et plus complexe qu’il n’en a l’air…
Elle : Oui, mais…c’est court !
Spontanément, je sens bien que « de l’autre côté », ce sont toujours mes collègues, que je suis toujours de leur côté…
Son mari : Au lieu de lire des textes, on leur fait des cours pour apprendre des notions linguistiques d’analyse littéraire, dont ils n’auront nul besoin…
Elle (à nouveau) : c’est comme les rédactions, on n’en fait plus…on n’écrit plus jamais d’histoires, de résumés…qu’on corrige…
J’essaie mollement, solidairement, d’arguer que la « rédaction » est un exercice désuet …que l’on peut écrire autre chose…que le résumé on en fait, même si on ne l ‘appelle pas résumé..
Elle : Non ! Non !....ils n’écrivent pas !

Les enfants sortent, on se sépare, amicalement…



« Rentre en toi-même, Françou ! » Arrête la mauvaise foi !
Je commence à repenser à Charlotte, en 6ème , qui apprend le présent de l’indicatif…qui copie –très joliment- des cours sur la grammaire du récit, les héros de l’Odyssée, l’épopée, la métaphore…c’est vrai qu’elle n’a pas grand chose à rédiger vraiment ?
-L’Odyssée, vous avez lu quels passages ?
Très peu en fait…

Et je dois bien m’avouer que les textes manquent..

Je repense avec contrition avoir critiqué Lagarde et Michard ("Lamerde et Guichard", insolents que nous étions!!!)…et je me rends compte que dans l’histoire de l'enseignement du français,  c’était pourtant un net progrès, par les textes, même fragmentés, même triés, qu’ils introduisaient dans le cours de littérature…

Les textes manquent ?

Bien sûr pas question d’une traduction savante du texte Grec ! Trop de respect des textes tue les textes !
Une libre adaptation d’un bel épisode : le coup de folie amoureux de Pâris, une ou deux ruses d’Ulysse, une perfidie de Junon, une colère d’Achille, la douleur D’Andromaque…
Ce qu’on veut , ce qu’on aime …pourvu qu’il y ait des textes…
Un beau « Titanic » à l’ancienne qu’il soit vaisseau des grecs ou cheval de Troie…

Je tourne « vieux c… », Je me rappelle…
…Une classe assez infernale qu’apaisait la lecture, en texte adapté et encore ré-adapté des récits de l’Odyssée…
…Une classe excellente avec laquelle nous enregistrions avec un magnéto UHER . Grosses bobines, petite table de mixage. Bugs fréquents . 35 élèves . Effervescence mais silence quand on tournait…Nous enregistrions le Cid !

Le Cid !!! C’était le Cid !
Jamais je n’oublierais les Stances du Cid dites par Jean- Philippe D…
J’avais un disque, version de Sylvie Montfort, belle voix grave, et Gérard Philippe, voix chantante et mélodieuse .
Naïvement, je trouvais ça très beau !!!
A la première audition, fous rires hénaurmes !
-Qui est le mec, madame ?
-Qui est la fille ? on s’y perd…

Ils préférèrent, avec détermination, leur propre version !
Et comme ils avaient raison !!!!

Ô délices de l’Ile mystérieuse et des Misérables que pourraient côtoyer sans complexe bien des beaux textes de littérature de Jeunesse …

Pourvu qu’on les lise, ou qu’on en lise, ou qu’on les joue ou les dise, et qu’on se les raconte encore et encore…

J’espère encore avec un optimisme obstiné que nos petites sont « mal tombées », qu’une autre fois avec un autre prof, on leur fera lire, ou raconter, ou jouer, ou réécrire, bref qu’on leur fera aimer beaux textes.
….
En attendant Camille écrit quand elle s’ennuie à l’école parce qu’elle a trop tôt fini ses exos, écrit, chapitre par chapitre, sur un petit carnet un roman… vite inachevé !
Des poèmes vite ébauchés…
Ou bien elle se raconte en jouant, des histoires dialoguées dont elle se marmonne les dialogues à mi-voix mais avec le ton !!!
Charlotte illustre ses poèmes et se construit un recueil …invente pour nos jeux des personnages qu’elle met en fiches…

S’il vous plait mes collègues de l’Ecole, s’il vous plait( N’en déplaise à la Didactique de la langue) racontez- leur des histoires, faites leur dire des poèmes, raconter les livres, raconter les films, les séries , les blagues de potaches ....
Et même (n’en déplaise à la Didactique de l’Histoire !!!) les histoires de l’Histoire !!!!



lundi 9 avril 2012

Didier Ithurssary et Jean-Luc Fillon à Bourg Saint Andéol, Happy, Very Happy End !!!!

Bien sûr nous connaissions déjà Didier…

Etudes à Bayonne. Un beau nom basque. Il est presque « notre pays » . Il incarne à nos yeux comme Philippe de Ezcurra ou, « de l’autre côté » (comme ils disent), Gorka Hermosa la vitalité culturelle d’une région où la musique est par tradition omniprésente mais où la tradition, loin de se replier sur elle-même, nourrit parfois l’évasion vers les aventures musicales les plus diverses, l’Amérique latine, le rock, le jazz, la musique contemporaine…
Nous avons donc traqué le son de son accordéon dans ses divers compagnonnages musicaux avec Serge Luc, avec Jauvin et Bras, ou Jean-Marie Machado…
Je ne sais qualifier ce qui me séduit dans son jeu, une sorte de légèreté dans la continuité? l’ agilité et la finesse dans la virtuosité ? son swing tout en délicatesse avec comme un air second « de ne pas y toucher» ?
Toujours est-il que j’aime ce son qui se laisse si bien accompagner par la batterie de S.Luc, le piano de Machado ou la guitare de JP Bordier ..
Nous l’avons entendu à Tulle en septembre avec les compères du Cinquième Elément où il se frayait un trajet tout en souplesse entre la puissance de Lionel Suarez , le duende de Chango Spasiuk, la mélodie chantante de Jean Luc Amestoy, la variation inspirée de Vincent Peirani …

Mais à Bourg Saint Andéol, ce fut une heureuse redécouverte, tant le duo avec Jean Luc Fillon est une rencontre faste…
Déjà le hautbois de JL constituait pour nous une super découverte, par sa variété , sa richesse sonore, sa virtuosité éblouissante…Et sa personnalité d’une vitalité chaleureuse qui attire une sympathie immédiate…

Mais de surcroît leur dialogue est un vrai dialogue entre leurs deux musiques qui les met réciproquement en valeur…




Dans cette petite chapelle fraîche mais au son parfait, ce fut un pas de deux qui nous a réchauffé le cœur et enthousiasmés…

Et laissés, en cessant, dans le grand vide des choses trop courtes parce qu’elles sont belles …

Il nous a bien fallu pour nous en remettre une exquise dégustation de vin blanc partagé sur le parvis ensoleillé et l’espoir d’un disque pour la rentrée….

dimanche 8 avril 2012

Pâquette


En ce matin de Pâques voilà que je retrouve au coin de ma mémoire cette
Aubade de Guillaume Apollinaire (La Chanson du Mal Aimé)...




C’est le printemps viens-t-en Pâquette
Te promener au bois joli
Les poules dans la cour caquètent
L’aube au ciel fait de roses plis
L’amour chemine à ta conquête



Mars et Vénus sont revenus
Ils s’embrassent à pleine bouche
Devant des sites ingénus
Où sous des roses qui feuillolent
De beaux dieux roses dansent nus




Viens ma tendresse est la régente
De la floraison qui paraît
La nature est belle et touchante
Pan sifflote dans la forêt
Les grenouilles humides chantent






mardi 3 avril 2012

Bourg Saint Andéol : une belle journée italienne :24 mars, le soir : Claudio Jacomucci , solo


Le soir donc, après les bien prometteuses prestations de deux jeunes talents , c’est l’Italie qui continue de nous enchanter :

Sur la vaste scène de La Cascade, seul, sans sono, au centre d’un cercle de lumière, Claudio Jacomucci, assis le dos bien droit , tenant contre lui comme son enfant son imposant Pigini Nova, commence par nous jouer avec une maîtrise remarquable, une économie de gestes qui ne l’est pas moins, et une virtuosité sans ostentation une musique sans frontières celle de J.S.Bach.

Et puis comme s’en évadant soudain, demande à notre charmante interprète d’expliquer ce que je comprends comme son projet de se situer parmi « ces compositeurs qui profondément imprégnés par la musique traditonnelle, l’ont réinventée et revitalisée, en dépassant largement, « beyond » les canons de la tradition, et ont réussi à recréer, grâce à cet instrument phénoménal qui est le leur, une musique originelle à l’instar des mazurkas de Chopin, des tangos de Piazzolla ou de la musique brésilienne de Gismonti. » (traduction libre de ce qu’il a écrit dans le livret de son CD Beyond..)
Je pense à ce moment à Vincent Peirani et François Salques et au projet de leur disque Est.


Et Jacomucci nous offre des interprétations remarquables de Piazzola, de Gismonti, du Chorinho d’Hermeto Pascoal, qui nous enchantent …mais aussi , et ce que j’ai encore plus aimé,un choix d’œuvres , siennes ou empruntées à d’autres compositeurs, qui se nourrissent précisément de la culture italienne pour parler leur propre langage …et qui connotent pour moi qui ne la connais pas ou bien peu, des évocations de mon Italie imaginée :
Les migrants albanais à travers une mélodie d’Otar Marzocchi (Albanian Folk Song 1), une musique inspirée d’une collecte de thèmes traditonnels de Calabre , un Ballu remarquable, un visage de Didon d’après Purcell, et, le plus saisissant pour moi ,une Aracne de sa composition qui est une « tarantola »…




Mon Italie imaginée…
Car j’ai adoré L’Eneide (chose inavouable sans doute, bien plus que l’Odyssée !) et dans l’Enéide, Didon , ce beau personnage de femme, tendre et tragique, dans ce texte si « patriarcal ».
Et il y a quelques années je me suis passionnée pour la musique populaire italienne, et j’ai découvert que la Tarentelle, dont le rythme chantait en moi depuis l’adolescence (depuis je crois la musique d’un film par ailleurs médiocre dont j’ai oublié l’auteur : Et mourir de plaisir !) était une danse obsédante, quasi magique , destinée à conjurer les effets de la piqûre de la Tarentule.

De ce concert j’ai gardé l’impression d’une musique inspirée, à la fois étrange et familière...




Bourg Saint Andéol : une belle journée italienne : Mario Stefano Pietrodarchi et Luca Lucini

Dans cette région si proche de la Provincia Romana, célébrer l’Italie , patrie de la fisarmonica, qui nous a donné de si grands accordéonistes français« originaires », comme disait Marc Perrone, Perrone donc, ou Marcel Azzola, ou Richard Galliano…était une idée lumineuse..à l’instar de ce matin ensoleillé du 24 Mars…

Pour nous, tout a commencé par un petit déjeuner plein de soleil face au Rhône, dans la belle salle à manger de l’hôtel Prieuré . A la table voisine , deux hommes jeunes déjeunaient, et discutaient en italien en consultant un ordi .

Nous n’avons pas douté, intrigués et intéressés , qu’il s’agissait sans doute des musiciens prévus pour l’un des concerts.
Puis arriva une jeune femme brune, vive et très souriante, nous l’avions rencontrée la veille, qui vint leur parler …en italien !
"Ô mon père et ma mère que ne m’avez-vous fait apprendre que le grec le latin et l’anglais !"
Je suis toujours fascinée et envie ces gens qui passent avec aisance d’une langue à l’autre !
Puis survinrent pour prendre leur petit déjeuner, deux autres jeunes femmes, italiennes !Sur la terrasse on se salua, elles nous demandèrent de les prendre en photo .

Bien avant onze heures, nous étions au rendez-vous du premier concert de la journée, assis dans un joli salon XIX° de l’hôtel Pradelle, où se faisaient les derniers affichages…
Et entrèrent Mario Stefano (bandonéon) et Luca Lucini (guitare) …




J’ai beaucoup aimé leur concert :

D’Oblivion à l’Ave maria de Piazzolla, aux tangos moins connus de Canaro ou Falloni et à l’El Choclo qu’on reconnait avec bonheur , un bandonéon à la très belle résonance, un peu cuivrée, une guitare au son chaud, pur, et rythmé et surtout surtout, une gestuelle que je qualifierais d’expressionniste, un expressionnisme italien en somme, très théâtrale mais ô combien émouvante , accordée aux variations du thème et de la mélodie…






« Mario Stefano Pietrodarchi, c'est le poète inspiré du bandonéon. Il ne crée pas de la musique, c'est la musique qui l'anime. Du coup, c'est tout son corps qui est comme en transe. Je pense au duende des chanteurs de flamenco ou des toreros. La musique devient alors une sculpture vivante. Chaque morceau est comme une explosion »

C’est donc le mot « vates » au son latin, qui me vient …

Moment marquant, trop court comme toujours …

Même si le délicieux blanc du Château les Amoureuses, sur la terrasse au soleil du bord de Rhône , au léger goût ferreux, en a constitué un prolongement en harmonie…
Pourtant dans des bribes de conversation qu’on pouvait surprendre au cours de cet apéritif festif, certains parfois se disaient « dérangés » par ce son de bandonéon inaccoutumé ou plus encore par ces postures « excessives »

Toujours alors je m’interroge sur nos goûts et plus précisément sur notre goût du hors normes en musique comme ailleurs…