mercredi 18 mars 2015

Galliano et S.Luc à Eysines, Une embellie entre des nuages…


Richard Galliano, ou l’audace tranquille..! car de l’audace, il lui en a fallu pour consacrer une œuvre au musette de sa jeunesse , un hommage à Gus viseur et à Edith Piaf, à la chanson française dans ce qu’elle a de populaire et de plus mélodique, en même temps qu’il consacrait un disque « sentimental » à des enregistrements de thèmes de jazz dans un studio américain avec une formation jazzy...(avec  un livret en Anglais ! Grrr !)

De l’audace, un magnifique talent , et une énergie magique…
Artiste de la pluralité, des « contrastes » ,  ou plutôt de La Musique dans son unité …et des défis personnels sans doute !
Et c’est sans doute pour goûter en live au plaisir de ce défi-là, que nous sommes allés l’écouter  à Eyzines en ce vendredi 13….de mars.
En duo avec  Sylvain Luc,  dont  nous avions découvert la guitare  par le disque et par sa participation à la musique de Vincent Peirani et de Daniel Mille, et que nous attendions de rencontrer…

Bien sûr, Eysines n’est qu’à 250 kilomêtres de chez nous, mais ce court voyage nous a coûté plus qu’à l’accoutumée…
L’ hiver c’est l’hiver... après un printemps mensonger et délicieux de quelques jours, la pluie froide et tenace est revenue,  de celle qui colle au pare-brise et  brouille la visibilité, sous un ciel bas et lourd qui pèse…..
D’énergie, voilà que nous avons failli en manquer , avec le temps , celui des météores, celui du temps qui passe,  avec les pesanteurs de la vie,  fût-elle pour le moment préservée du regard suspicieux des dieux jaloux …
Et nous nous sommes retrouvés à Eysines , une banlieue propre, ni défavorisée, ni hostile ou inquiétante, mais inhospitalière et comme sans âme, dans l’humidité et le froid pénétrant. Nous avons fait une longue queue…comme nous en  avons l’habitude pour être bien placés …mais celle-là , peu abritée  devant les portes de la salle, grands vitrages et hall carrelé,  nous a coûté aussi…
Une salle année 60, peu chaleureuse malgré le faux espoir d’un bar ou s’alignaient quantité de verres en cristal, qui  furent enlevés sans avoir servi…
Une salle froide au double sens du terme, bien que le public soit visiblement du genre averti, à l’instar de mon voisin,  le premier arrivé, un peu âgé, qui connaissant tout des morceaux , tout de leurs auteurs, et reconnaissait des phrases de Sati et l’œuvre de Jean Sauguet…
Une salle sombre qui ne s’éclaira que pauvrement à l’entrée des musiciens …


Et ce fut le concert !




Concert étrange, presque intimiste où les deux musiciens engagent un poétique duo, et qui se regardent plus qu’ils ne nous voient…

Un poétique duo où chacun inspire à l’autre une réponse, une reprise, un développement  ou une pirouette en harmonie ou en surprise …Où chacun exprime à sa guise, avec expression , parfois expressionnisme,  son propre ressenti du thème, et nous en transmet l’émotion…
 Profonde  émotion que celle des  amants d’un jour , chanson  épurée par l’absence de mots, et la toute puissance du chant des instruments …
Je l’avais écrit à l’écoute du disque :
 "C’est le plaisir sans mélange d’écouter le « Son  Galliano », pureté de la chanson mélodique développée dans sa ligne claire, nuances délicates des intensités,  jeu des variables subtiles ou virtuoses des improvisations, … une virtuosité qui semble n’avoir pour finalité que de se faire royale simplicité…
« La technique est importante à condition d’en avoir tellement qu’elle cesse complètement exister… »P. Picasso
Et c’est un  bonheur total  qu’on pourrait comparer à celui de certains solos si ne s’y ajoutait la superbe découverte pour moi de la très belle guitare de Sylvain Luc, acoustique, vibrante,  et le plaisir des ses notes  égrenées qui dialoguent avec les notes tenues de l‘accordéon,tantôt le soutenant, tantôt au premier plan assurant la ligne mélodique, tantôt s’associant étroitement avec lui…"













Et bien sûr, la présence en direct des deux musiciens , qui créent, ou peut-être improvisent ou semblent improviser, en tout cas réinventent  une version somptueuse de la vie en rose, est un plus grand plaisir, l’impression de partager leur musique .  
Constrastes entre graves puissamment amplifiés par le soufflet, et la ligne claire pure des aigus de la mélodie déroulée par la main droite avec une simplicité virtuose...
Le choix  des œuvres, la composition du concert, ouvert avec  Paris où «  ils montèrent pour leur musique » et se refermant avec Sous le ciel de Paris  sont proches de ceux du CD .
Mention spéciale peut-être au choix de Marguerite Monnot (Paris), et des Forains de Henri Sauguet...Aux introductions raffinées et pleines de surprises, des Amants d'un jour ou de La vie en Rose, et d'autres....

Mais avec en prime le cadeau précieux  des deux solos, la modernité et l’audace du son virtuose de Sylvain Luc pour son solo, et, une petite merveille que j’aime particulièrement,  le très beau Mélodicelli de Galliano,  si rare ! , je ne l’ai écouté que dans le CD Passatori avec l’orchestre de Toscane, ou celui du Libertango à Tokyo avec l’orchestra Camerata Ducale..

Son interprétation en solo par Richard ce soir  est un moment de bonheur absolu !

Et puis après deux rappels c’est trop vite la fin, la salle se vide trop vite,  le hall est froid, trop vite vidé lui aussi…Et, comme souvent, je m’obstine et nous retournons dans la salle. Et surprise, elle est maintenant un ilôt chaleureux où bruissent encore les échos des enthousiasmes et  du son de l’accordéon et de la guitare, laissés là sur la scène, attendant leurs "maîtres" qui sont là eux aussi, détendus , après la tension du concert , s’attardant auprès des fidèles…
Sylvain Luc …puis Richard ! nous font le plaisir de quelques moments d’échange dont la dédicace des CD ne sont que le prétexte , le témoignage qu’on regardera souvent d’un signe d’amitié précieux. J’échange aussi avec Gisèle Galliano, qui est là discrète, souriante et silencieuse, regard de connivence puis poignée de main chaleureuse…
Quelques mots… beaucoup de non-dits…Difficile d’exprimer tant d’admiration, l’écrire sur ce blog, c’est tout ce que  nous  pourrons  …

Et nous voilà repartis sous les nuages, dans le froid et la nuit….

Heureusement, on peut écouter encore et encore le CD, et beaucoup d’autres que celui-là appelle …

Et « en » écrire pour essayer de capter quelque chose de la magie éphémère… !





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