Le canal d’Hossegor demeure pour
nous depuis mon enfance un lieu constant de baignade. Nos goûts pour les différentes
plages ont fluctué suivant les âges. Plage centrale, ou plage sud, où la mer
demeure presque toujours plus calme relativement ; à de rares moments , plage dite Notre Dame dont les
vagues nous attirèrent pendant quelques années,
La Gravière
que nous appelions les Sauvages, creusée, vite profonde , à la mer vite forte, et
pour cette raison parfois peu fréquentée,
Plage du « blockhaus », à la baignade interdite, et où toutefois je fis baigner dans ses premières années Nadja, dans mes bras, au bord
où j’avais largement pied, plages du lac
qui firent les délices, à midi, quand la marée était haute et l’eau claire, de
Nadja enfant, avec ses bateaux gonflables successifs, que nous appelions « Matelot »
, Matelots 1 et 2 que nous traînions au bout d’un longue corde , Matelot3 « un
adulte et un enfant » que j’appris à manœuvrer à la rame pour des
cabotages aventureux sans risques …
Mais dans ces fluctuations diverses,
je ne sais pourquoi, ou parce qu’il m’est toujours apparu comme une énorme
piscine d’eau de mer vivant au rythme du
flux et du reflux, notre attachement au Canal est demeuré constant , comme
le fil rouge de la baignade à Hossegor.
Quand j’étais gamine , le port de
plaisance n’existait pas, ni le pont de Capbreton. Le canal était barré à son
entrée par un enrochement de retenue. Si bien que des alluvions sableuses formaient
une étroite plage de sable fin sur sa rive gauche dont nous adorions profiter jusqu’à l’heure de la
marée haute . La rive gauche demeurant en eau profonde constamment. A mes yeux
d’enfants, cette rive du canal était réservée aux grands nageurs, (un certain
Pierre en particulier , figure locale qui y nageait chaque jour, par tous les
temps sous mes yeux admiratifs) et je ne fus pas peu fière quand je pus changer
de rive, descendre moi aussi directement l’escalier de béton érodé par les ans
et nager sans reprendre pied ma petite brasse obstinée…
Puis se construisirent le port ,
le pont , et le canal mieux drainé perdit plage et baigneurs. Devint lieu de
promenade ou de jogging sur des chemins de halages bien entretenus. S’y baigner
devint sinon interdit du moins incongru, rien ne s’y faisant plus pour en
faciliter l’accès aux baigneurs, escaliers devenant moussus et de plus en plus
délabrés.
Seuls des obstinés dont nous
étions, continuèrent d’y guetter la haute dont le courant montant vous emporte
sans effort d’un escalier à l’autre…en évitant les lignes des pécheurs
désormais maîtres du lieu. Je me souviens de baignades délicieuses dans la fraîcheur
du vent qui s’engouffre depuis le fond du lac
et suit la voie largement ouverte du canal, et d’autres bien plus délicieuses
encore de la marée du soir par temps caniculaire, où Nadja et moi, nous ne nous
décidions pas à renoncer à remonter puis descendre d’un escalier à l’autre , en
évitant cailloux moussus et coquilles d’huitres tranchantes comme
rasoirs, longeant, traversant , retraversant, dans cette eau à la fraîcheur
salée et bienfaisante dans la tiédeur du soir .
Nous rentrions tard, sous la
désapprobation générale des autres qui nous attendaient devant le souper qui refroidissait.
Puis petit à petit il reprit vie...
Ce furent d’abord les gamins qui
s’y intéressèrent. Rendez-vous à la haute, ils commencèrent à sauter du pont
tous les soirs . Interdictions furent affichées, la police municipale passant à
heure fixe pour les avertir du danger. Depuis les panneaux ont disparu. Le
rendez-vous est presque aussi couru que l’heure des surfeurs à la plage nord.
Puis, petit à petit, les vieux
hossegorois riverains ont recommencé à venir prendre leur bain en voisins…
Puis, symptôme de la
tendance il y a eu la « traversée à
la nage" du canal d’hossegor organisé par les « Coureurs d’écume »…
Et depuis un ou deux ans, se
retrouvent au rendez-vous de la marée,
des habitués éclectiques : des pécheurs, des familles équipées de bouées,
planches, frites, « matelots » gonflables de toutes tailles, récemment de paddles, des nageurs tout temps, de niveau divers, tranquilles et
courtois, de gamins bruyants et joyeux, de chiens qui sautent et nagent à la
poursuite des pommes de pins qu’on leur lance…
Si nous y avons perdu la
tranquillité un peu sauvage et solitaire des années passées, on y a gagné
l’animation d’une vie de gens de tous âges
et de classes sociales diverses …
Et je me réjouis, voire
m’enorgueillis, que mon Canal revive et
que notre amour pour ce lieu soit désormais si diversement partagé …
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