Mon père enseignait l’histoire et
géographie
En fait sa spécialité, qu’il aimait,
c’était l’ histoire…mais l’Université et
l’éducation Nationale, autrefois
comme aujourd’hui, associent l’Histoire
et la Géographie ,
l’espace et le temps des hommes, en un couple indissoluble, pour le meilleur et
pour le pire des élèves et des profs !
Sa prédilection pour l’histoire,
c’est dans ses temps périscolaires, ses jeudis, sa retraite surtout qu’il la cultiva,
et son goût pour les recherches « aux Archives » , en travaillant sur
des articles et des mémoires, pour les sociétés savantes ou la société d’ histoire
locale de Borda…Se désolant que, dans la guerre de clochers landais qui opposa Dax à Mont de Marsan, Mont de Marsan
ait emporté la préfecture, et, bien plus grave ! avec la préfecture, les Archives départementales …
« Bien beau disait ma
mère qu’il ne nous ait pas emmenés vivre
dans cette ville !!! »
Que bien sûr nous estimions
toutes trois bien moins attrayante que notre bonne ville de Dax…
Le collège classique de jeunes
filles de Dax ne m’offrit pas toujours de super profs d’histoire, l’une royaliste,
réactionnaire, nous dictait de longs cours qui racontaient la grandeur des
rois, et qu’il fallait savoir au mot
près, l’autre sympathique et intéressante racontait l’histoire sans souci de structurer
le temps et son cours d’une quelconque façon.
Mon père par solidarité et
discrétion envers des collègues se mêlait assez peu de nos devoirs du soir, sauf
quand nous lui demandions de l’ aide pour réviser. Et sans doute parce que sans
qu’il en dise rien, l’absence de mise en
ordre des évènements le traumatisait, il mettait parfois son petit grain de sel
dans notre apprentissage. C’est que ses élèves l’appelait petit a , tant ses
cours étaient structurés et hiérarchisés ! Il préparait méthodiquement et soigneusement
ses notes de cours sur des feuilles de cahier quadrillées pliées en
deux …Comme il aurait aimé l’écriture à l’ordi, comme je l’aime !, la
possibilité de revoir, effacer, nuancer , modifier, réécrire, aurait répondu à son
besoin incessant de reprendre ses analyses et ses exposés pour les rendre plus
clairs…Il collait ses rapiéçages sur des bandes de papier et c’était parfois
comme des hypertextes qu’on aurait dépliés…Jusqu’a ce qu’il se décide à tout
remettre au net pour une nouvelle version….
Ainsi j’ai de la Révolution Française
un vif souvenir attaché à ces petites
feuilles revues et corrigées, et l’idée que la manière d’ordonner les
évènements historiques avait un sens profond, selon qu’on s’appelait Soboul Mattiez et Castelot. Et aussi je ne
sais pourquoi de la peinture hollandaise du XVI°. La guerre de 14 , ce fut
autre chose tant elle était encore présente dans les récits familiaux de nos
grands parents…
Et finalement ce que j’ai gardé
de plus marquant de son influence, c’est sa géographie !
Il disait n’avoir été marqué que
par son maître Vidal de La
Blache et la « géographie physique », et c’est dans
nos balades familiales qu’elle se manifestait : il y avait la couleur d’un
sol calcaire , la glaise d’une terre argileuse , la courbe « d’un
synclinal perché », et surtout « les sables fauves » des landes,
qui au détour de la route nous arrêtaient et suscitaient ses enthousiasmes !
J’en ai gardé le goût de regarder la forme des vallées et du cours des
rivières, d’admirer les belles barthes grasses au bord des fleuves, « qui
servent de régulateur naturel des crues de printemps et d’automne » !
l’envie de dire aux enfants quand l’autoroute entaille la colline « Regardez
comme on les voit bien, les couches du calcaire »... les terrasses des cultures, et les rangs nets des vignes!!!
Et les chemins blancs de Charente, et les
fonds humides des marais D’Orx, et la couche d’alios…
Parce que peut-être, mêlés de
parfum d’enfance, ces regards s’apparentent un peu pour moi au regard de la Poésie !!!
Un petit Virgile de poche !
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