Les jardins de Le Nôtre
Je viens de relire Portrait d’un homme heureux (Eric Orsenna,Folio)
Eric Orsenna y présente le jardinier créateur du parc de Versailles et « compagnon » de Louis XIV auquel il voue l’amour de toute une vie.
Je viens de relire Portrait d’un homme heureux (Eric Orsenna,Folio)
Eric Orsenna y présente le jardinier créateur du parc de Versailles et « compagnon » de Louis XIV auquel il voue l’amour de toute une vie.
J’y découvre sur le Nôtre et sur le siècle, bien des aspects qui échappaient à mes représentations stéréotypées du temps du roi Soleil. Je pensais l’époque classique asservie à la rectitude des lignes .
Certes, mais je découvre que comme celle du Parthénon, cette rectitude est rectifiée pour l’œil. Les volées d‘escaliers « adoucies » par des paliers aux proportions calculées pour le plaisir du regard. « Ici le nombre d’or s’applique. Là, Le Nôtre s’en libère pour répondre à telle ou telle contrainte du site »
Je pensais Versailles de pierre et d’or, la splendeur de ses jardins comme un somptueux écrin de verdure, massifs festonnés au premier plan, lignées d’arbres régulières au deuxième, puis la profondeur des bois comme ligne d’horizon.
Certes mais je découvre aussi l’omniprésence centrale de l’eau, des fontaines, des cascades, du grand canal….
Je pensais au grand canal comme à une vaste perspective de 23 hectares imposant sa géométrie grandiose et géométrique entre les masses des bois…
Et je découvre :
« Vingt trois hectares, aussi, du ciel d’Ile de France puisque le canal sert d’abord à refléter .Il capte le soleil pour faire plaisir au roi. Mais le soleil ne se montre pas toujours sous nos climats. Alors, faute de réalité plus noble, le canal réfléchit les nuages, la lumière, tout ce qui passe plus ou moins vite selon les vents, le pur éphémère. »
Je découvre « l’amour fou de l’eau » de ce siècle de pierres :
« Dans le jaillissement des fontaines et des cascades, il voit un reflet du bouillonnement des passions de la vie. Dans les images reflétées à la surface des étangs et des canaux et que soudain brouille le vent, il aime à se rappeler la fragilité des choses. Epris de lignes et de perspectives, rien ne le distrait mieux que ces fantaisies optiques. »
Le roi soleil veut de l’eau, de l’eau toujours plus d’eau, pour « contenter » ses fontaines ; il détourne les ruisseaux, capte les sources, détourne les rivières, recueille toutes les eaux de pluies, construit des machineries monstrueuses pour capturer les rivières.
Cette démesure, cette « ubris » dévastatrice d’un roi de droit divin, n’a rien à envier à celle que le 20ème siècle naissant mettra à « dominer » la nature.
Et je me dis que le rapport des hommes avec l’eau exprime à travers les siècles quelque chose de leur conception de la vie et du monde.
J’ai été une enfant qui ne connaissait pas l’eau courante. Un seul robinet au dessus de l’évier en pierre de cuisine fournissait l’eau de boisson et de toilette. Non, sous l’auvent, il y avait le puits où l’on puisait pour l’arrosage et les tâches domestiques, et qui trop souvent se désamorçait. Plus tard, vers 18 ans encore, dans le vieil appartement de ma grand- mère on versait de l’eau pour sa toilette dans un beau pot de faïence.
Certes, mais je découvre que comme celle du Parthénon, cette rectitude est rectifiée pour l’œil. Les volées d‘escaliers « adoucies » par des paliers aux proportions calculées pour le plaisir du regard. « Ici le nombre d’or s’applique. Là, Le Nôtre s’en libère pour répondre à telle ou telle contrainte du site »
Je pensais Versailles de pierre et d’or, la splendeur de ses jardins comme un somptueux écrin de verdure, massifs festonnés au premier plan, lignées d’arbres régulières au deuxième, puis la profondeur des bois comme ligne d’horizon.
Certes mais je découvre aussi l’omniprésence centrale de l’eau, des fontaines, des cascades, du grand canal….
Je pensais au grand canal comme à une vaste perspective de 23 hectares imposant sa géométrie grandiose et géométrique entre les masses des bois…
Et je découvre :
« Vingt trois hectares, aussi, du ciel d’Ile de France puisque le canal sert d’abord à refléter .Il capte le soleil pour faire plaisir au roi. Mais le soleil ne se montre pas toujours sous nos climats. Alors, faute de réalité plus noble, le canal réfléchit les nuages, la lumière, tout ce qui passe plus ou moins vite selon les vents, le pur éphémère. »
Je découvre « l’amour fou de l’eau » de ce siècle de pierres :
« Dans le jaillissement des fontaines et des cascades, il voit un reflet du bouillonnement des passions de la vie. Dans les images reflétées à la surface des étangs et des canaux et que soudain brouille le vent, il aime à se rappeler la fragilité des choses. Epris de lignes et de perspectives, rien ne le distrait mieux que ces fantaisies optiques. »
Le roi soleil veut de l’eau, de l’eau toujours plus d’eau, pour « contenter » ses fontaines ; il détourne les ruisseaux, capte les sources, détourne les rivières, recueille toutes les eaux de pluies, construit des machineries monstrueuses pour capturer les rivières.
Cette démesure, cette « ubris » dévastatrice d’un roi de droit divin, n’a rien à envier à celle que le 20ème siècle naissant mettra à « dominer » la nature.
Et je me dis que le rapport des hommes avec l’eau exprime à travers les siècles quelque chose de leur conception de la vie et du monde.
J’ai été une enfant qui ne connaissait pas l’eau courante. Un seul robinet au dessus de l’évier en pierre de cuisine fournissait l’eau de boisson et de toilette. Non, sous l’auvent, il y avait le puits où l’on puisait pour l’arrosage et les tâches domestiques, et qui trop souvent se désamorçait. Plus tard, vers 18 ans encore, dans le vieil appartement de ma grand- mère on versait de l’eau pour sa toilette dans un beau pot de faïence.
L’installation dans notre maison neuve, vers dix ans ,m’apporta l’émerveillement des baignoires et même de l’eau courante chaude que, notre ville Dax, « Acqs ville d’eaux » nous offrait à profusion chez nous au robinet, et dans toute la ville aux bornes installées à tous les coins de rues. Pour purger les canalisations et éviter que l’eau n’arrive froide ces bornes coulaient en permanence, auréolées d’un nuage de vapeur…
Je garde le souvenir délicieux de cette abondance d’eau chaude.
Quand les composantes économiques d’abord, écologiques ensuite, réduisirent puis coupèrent cette profusion, je consentis,( et quand le 21ème siècle nous prêche l’ économie je consens chaque jour)à faire un effort sur le verre à dent ,la proscription des lessives à phosphates buveuses et pollueuses d’eau, les arrosages luxueusement intempestifs, mais je ne me résigne pas à abandonner le délice des douches à profusion, (telles que l’iconographie cinématographique nous en offre de célèbres !!!), mon Versailles en somme…
Je garde le souvenir délicieux de cette abondance d’eau chaude.
Quand les composantes économiques d’abord, écologiques ensuite, réduisirent puis coupèrent cette profusion, je consentis,( et quand le 21ème siècle nous prêche l’ économie je consens chaque jour)à faire un effort sur le verre à dent ,la proscription des lessives à phosphates buveuses et pollueuses d’eau, les arrosages luxueusement intempestifs, mais je ne me résigne pas à abandonner le délice des douches à profusion, (telles que l’iconographie cinématographique nous en offre de célèbres !!!), mon Versailles en somme…
Et un en un beau jour d’avril à Bordeaux, au pied de la superbe façade « classique » de La Bourse, cet autre plan d’eau qui est le miroir du ciel aquitain d’avril me semble un écho affaibli du grand canal, un grand canal d’aujourd’hui, modeste, provincial, embourgeoisé, où vont jouer les enfants…
Citations extraites de l'ouvrage d'E.Orsenna, dont je n'ai fait ici qu'une présentation personnelle et sélective, mais où l'on peut découvrir d'autres facettes passionnantes de "l'homme heureux", en particulier, son rapport avec le pouvoir politique...
4 commentaires:
Bonjour Françoise,
L'eau est un bien précieux, je commence à l'expliquer à mes petites filles et à leur faire fermer le robinet. Lorsqu'on regarde la carte du monde on est effaré de voir l'extension des zones désertiques qui est une catastrophe!
Moi aussi j'ai eu ma première baignoire à dix ans, et j'ai connu l'eau à la source chez mes grands parents dans la Creuse (comme enfant cela ne nous gênait guère, maman le voyait autrement à l'heure de la lessive!).
J'ai la chance d'habiter près de Versailles (dans la petite ville qui a donné son nom à la machine que tu qualifies de monstre et qui évidemment ne fonctionne plus de nos jours! On peut visiter les bâtiments lors des journées du patrimoine, c'est intéressant. Il y a aussi le Musée Promenade qui lui est en partie consacré).
A Versailles aujourd'huiles Grandes Eaux ont toujours un grand succès puisqu'elles permettent de voir les fontaines en fonctionnement. Mais elles sont alimentées en circuit «recyclé» pour ne pas gaspiller l'eau, et elles sont mises en route l'une après l'autre; cela fait un bon exercice de marche pour tout voir!
Tu sembles passionnée par Erik Orsenna; c'est quelqu'un que j'aime beaucoup, j'aime bien l'entendre parler et ses idées sont bien étayées. Mais je dois avouer qu'après avoir été passionnée par «Voyage au pays du coton» je me suis endormie (au sens propre) sur le «Salut au grand sud» écrit avec Isabelle Autissier. Mais cela tenait sans doute à la structure du livre à laquelle je n'ai pas «accroché».
Amicalement
Merci Sister for Ever de ton passage, et des échos que tu offres à mon texte, concernant tant ta vie personnelle, que les informations précieuses que tu ajoutes, sur "Les grandes Eaux" façon 21ème siècle, et la machine de Marly.
Quant à Eric Orsenna, je pense en fait que tu l'as plus lu que moi: en dehors de ce livre dont l'éclairage sur le 17ème siècle m'intéresse, j'ai surtout lu ses réflexions poétisées sur la grammaire,"La grammaire est une chanson douce", dont la conception , le lien étroit grammaire/sens, rencontre la mienne.J'ai beaucoup aimmé celui-ci,titre compris. J'ai en revanche seulement parcouru les deux suivants qui me paraissaient exploiter simplement la même veine...
Bien amicalement, à bientôt peut-être,
Françoise
Je n'ai pas lu ce livre d'Orsenna, mais il y a quelques années déjà, j'ai beaucoup aimé :"Deux étés". Un jeune homme a imprudemment accepté de traduire "Ada ou l'ardeur", le roman quasi intraduisible de Nabokov. Pressions de l'éditeur, caprices du génial et insupportable auteur, le pauvre ne s'en sort plus ! Le temps de deux étés à Bréhat, amis, voisins, vont essayer de lui venir en aide. Drôle et délicieux. J'ai particulièrement aimé les descriptions de cette merveilleuse île bretonne. Je me suis quelque peu ennuyée à la lecture de "la grammaire est une chanson douce", mais ton article sur "Portrait d'un homme heureux" me donne envie d'y aller voir de plus près. À bientôt.
Edith
Bonsoir Edith! très contente de ton passage...Tes commentaires me redonnent coeur à l'écriture.La grammaire est une chanson douce m'intéressait peut-être particulièrement en raison de mon travail d'alors...Mais tu me donnes bien envie de lire "Deux étés"...
A bientôt
Françoise
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