Bordeaux change 2ème : Enfermements
A Caudéran, comme au couvent…
Entre enfance et adolescence, je n’ai plus grand souvenir de la ville.
Nous grandissons, il est moins souvent nécessaire de nous confier à la garde de nos grands parents qui viennent plutôt et plus souvent nous voir à Dax.
Et puis dans ma quiète adolescence survient un petit séisme. Pour des raisons un peu obscures, contre l’envie de tous et avec l’accord de chacun, nous décidons que j’irai à l’Ecole Normale de Caudéran finir ma scolarité .
J’ai détesté d’autant plus ces années que je n’avais pas prévu ce qu’elles me coûteraient : libre dans ma petite ville, forte de toute la confiance de mes parents, me voilà désormais exilée de ma maison. Je me trouvai enserrée, prisonnière dans ce couvent laïque à l’austère morale républicaine, privée de sortie (les dimanches seulement !!!)
Nul doute que Bordeaux ne pouvait me consoler en ces moments ! Une ville froide et venteuse arpentée pendant de brèves permission de sortie sur mes talons aiguilles dans ma redingote trop élégante et trop mince…
Quelques surboums dans des « caves ». Dans l’entrée on croise les parents, un peu « gourmés ». Quelques après midis de danse au Santa (boîte branchée, en sous sol). Etranges moments pour une habituée des bals de quartiers en plein air et des musiques festives de son pays landais. Un concert au grand théâtre pour une symphonie de Mozart…
Survient l’embellie : rencontre avec Michel, dans la majesté feutrée des boiseries de la « Municipale » (bibli) ; moments d’inimité dérobés dans des bistrots, dans les « cinémas d’exclusivité » où les films passent en boucle. Une photo de mariage sur le beau perron de l’hôtel Rohan…
A l’ombre de la « Faculté des lettres »
Le petit appart plein centre loué à deux, l’amphi boisé et solennel du Cours Pasteur, les pressions du travail et de la famille, cette ville –où la pluie ,des toits aux murs de pierre et aux goudrons des trottoirs, ne touche jamais la terre- nous enserre et nous étouffe .
On s’échappe en Dauphine le dimanche pour aller voir des rhododendrons dans un parc de Pessac, parfois pour un déjeuner chic et cher (invités par les parents) à « Robinson » sur la rive droite, herbeuse et sauvage, où abondent les « carrelets ».
Nous assistons émerveillés à la construction du Pont d’Aquitaine, auquel les piétons accèdent encore pour admirer le vue grandiose sur l’estuaire. Nous assistons consternés au remplacement du marché aux puces fascinant de Mériadec en un énorme complexe de cubes années 60…
Mai 68, c’est la liberté ! Un vent de campagne entré dans la ville, les diplômes obtenus et bouclés juste à temps ! Le Maroc et ses espaces ! Plus tard, la campagne et ses montagnes, de longtemps, libérés, nous ne revenons plus à Bordeaux !!!
« Retour à L’institut »
L’ironie du travail nous y ramène un jour ; l’Ecole Normale de Pau (où nous sommes devenus formateurs) est annexée à L’iufm d’Aquitaine et nous avec. La ville a changé, gratté ses murs, refait son Marché des grands hommes, entrepris de restaurer la cathédrale.
Quelques délicieux soupers Place du Parlement, désormais « trop bien » famée, suivis de retours à pied dans de tièdes soirées par la rue Porte Dijeau, la descente de la rue Vital Carles le matin au printemps, quand les marronniers mettent leur vert tendre…
Las !!!pour être devenue « institut », l’Ecole Normale de jeunes filles de Caudéran ne s’est pas pour autant ouverte aux vents de la mer ; en passer le grand portail au nez du concierge est toujours aussi difficultueux, et nous tâchons de déserter autant que faire se peut ces lieux oppressants et aussi malaisés que la nationale 134 qui y conduit.
« La pyrénéenne »
En quelques années l’autoroute se construit vers Toulouse, et nous ouvre un beau chemin vers nos affections, les musées, les opéras au Capitole…
Bordeaux s’éclipse de nos vies…
A suivre...
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