Ma mère n’aimait pas les
bains de mer…ni se mettre en maillot, ni la plage , ni le sable qui colle aux
pieds , ni s’asseoir par terre qui est si malcommode …
Sans doute aimait-elle la Mer
pour son spectacle, pour les connotations poétiques qui lui sont attachées
et qui chantaient en Elle par toutes les
« poésies » qu’elle avait apprises au cours de sa propre
scolarité, et celles qu’elle sut choisir pour ses élèves à qui elle tâchait de faire aimer la musique
de notre langue. Elle gardait en mémoire nombre de ces poèmes et aimait à les réciter,
parfois à les chanter, de sa voix qu’elle avait belle et juste…
Pourtant elle consentait à
nous accompagner au bord de la mer, à Hossegor certains après-midis d’été :
mon père sortait son auto, car lui aimait la mer,et lui aimait conduire…
De ces après-midis de plage je
garde un souvenir à la fois tendre et
amusé, car il est vrai que c’était un moment désiré, agréable et délicieux,
mais aussi chargé de frustrations : trop tard, on partait trop tard, il
fallait attendre que la digestion fût terminée pour se mettre à l’eau ; et
l’on rentrait trop tôt pour dîner à l’heure !
seule compensation : quand ils eurent un peu plus d’aisance financière, on
s’arrêtait avant de partir d’Hossegor manger des huitres chez Lamouliate,
délice qui a forgé mon goût irrémédiable pour cette chair résistante, froide, humide, et salée .
Ce goût- là nous le partagions
ma mère et moi, mon père et ma sœur ne faisaient que nous accompagner du bout
des lèvres !
Sans doute ce mélange de
bonheur et de frustration a-t-il produit mon attachement profond à la mer. Sa
simple présence vient parfois à me
manquer les mois d’hiver. Et je la recherche, maintenant que nous allons presque
tout l’été au bord de la mer, à maintes reprises de la journée : Tous, je
les fais sourire :«Je vais voir la mer » « Je n’ai pas encore vu
la mer ! » « Il faut que j’aille voir la mer » « Je
vais voir le coucher du soleil »
(Rite païen dont je constate
que je le partage avec bien des gens
assez différents qui se rassemble sur la jetée le soir …)
Amour que j’ai transmis à ma fille,
je crois, et elle à ses filles. Et
souvent je dis donc aussi : « Qui vient voir la mer avec moi… ? »Et
j’ai le plaisir d’être accompagnée pour ce rituel incontournable ».
C’est ainsi qu’un jour, Camille m’a dit :
« Pourquoi as-tu/ a-t-on besoin d’aller voir la mer ? »
-Parce que le poète a dit :
« La mer, la vaste mer, console nos labeurs »
(et d’expliquer le sens de labeurs ici, et d’en rire, et de presser
la petite main dans la mienne..
Petite main est devenue
grande…Mais demeure notre passion magique !
Et pourtant si ma Mérotte
n’aimait pas la mer , c’est en grande partie à elle que je dois, que nous
devons, cette modeste maison qu’ils firent construire à Hossegor, à sa patience, à son insistance, à son talent à
choisir avec discernement les emplacements propices ..
Elle consentit à le faire ,
elle y contribua activement, certes, pour ne pas « gaspiller » le
modeste pécule que rapporta à mon père et à son frère la vente de la maison
paternelle, pour en tirer un petit revenu pour leurs voyages à deux , parce qu’elle
avait l’intuition que mon père aussi aimait la mer, mais je le crois
profondément, en même temps pour nous offrir un accès à ce plaisir qu’elle ne put jamais
vraiment partager, mais dont elle
devinait la profondeur…
Et jouir avec amour et par
procuration de notre passion…
Merci ma Mérotte …
Tu sais notre petite maison
est devenue un peu plus grande aussi…le nombre des aficionados ayant augmenté !
Merci…
2 commentaires:
Un bien bel hommage à ta maman, Françoise...et à la mer!
Merci Francine ...Oui oui c"est vrai...Bises
Enregistrer un commentaire