Depuis plusieurs années , il
s’est trouvé que nous sommes allés écouter Richard Galliano en janvier- février .
Il y longtemps maintenant, c’était au New
Morning pour la sortie de Luz Negra. Rue des Petites écuries sombre et gelée , découverte
au bout du froid du New Morning et de Tangaria.
Souvent nous profitons d’un voyage d’hiver de Richard
Galliano dans notre sud – sud-ouest.
Il y a eu la Halle aux grains à Toulouse
en janvier. L’année dernière c’était avec Bireli Lagrène et Didier Lockwood le 4 février à Colomiers, cette
année, après l’automne à Arcachon, nous sommes allés à Carmaux, la semaine
dernière, pour l’écouter dans son concert « Hommage à Nino Rota »…
Dans nos pays, somme toute
cléments de réputation, nous sommes
justement tombés sur les périodes de froidure !
Il résulte de ces conditions climatiques
une atmosphère particulière…
D’abord un doute … l’année
dernière froid et verglacé : « Pourrons nous faire la route …bah
c’est de l’autoroute ! » « Eux-mêmes, les musiciens,
seront-ils au rendez-vous ? »
La salle était froide et ventilée,
mais ils étaient là.. En revanche,
pas de Biréli Lagrène, « enrhumé », c’est
Stochelo Rosenberg qui le remplaçait…
Cette année, notre route
d’arrivée fut clémente, mais les aéroports parisiens connaissaient de multiples
difficultés …et c’était la venue des musiciens qui était incertaine .
Puis, si le concert eut lieu, le
froid régnait sur Carmaux…
Etrange ville que cette cité
minière encore sous le signe de la terre noire des mineurs et le culte de Jaurès,
où le bassin minier n’est plus qu’un musée, et qui semble se débattre pour rebondir. Des
travaux énormes éventraient la rue principale pour installer sans doute le tout
à l’égout et préparer à la ville un avenir, qui à nos yeux étrangers, apparaît
bien incertain. Vent froid et pluie sur la tête, glaise sur les souliers..Le
soir quoique la salle Mitterrand ne soit qu’ à un petit km on irait en voiture… ! Parce que, se garer,
à Carmaux on peut !
Ces circonstances rendent particulier
l’abord des concerts. Rues un peu déshéritées,
en tout cas désertées, en raison du froid. Nuit venteuse et déjà profonde à
l’heure du concert, et puis une sorte d’îlot de chaleur et de lumière, dont la
scène est le cœur…En général, un sas entre les deux , une longue attente dans
une file qui s’allonge , où le bruissement des conversations monte peu à peu,
mesurant le temps qui passe comme sable dans le sablier.
Dans ces salles un peu polyvalentes,
l’installation se fait an mieux grâce au volontarisme des bénévoles, mais souvent il y a des ajustements
qui leur échappent . Ainsi un couple avec deux petites filles, s’installe près de nous, quatre pour une seule
chaise, important deux chaises, et imposant leurs petites à nos pieds, il
serait plus juste de dire sur nos pieds. Nous sommes partagés entre agacement
et attendrissement…
Et c’est le concert …
L’entrée de Richard Galliano,
seul à l’accordina, sur le thème du Parrain,
belle et saisissante, demeure un peu surréelle, et l’attention comme suspendue,
en attente….
ET puis, une fois encore, la
magie prend..
J’ai beaucoup rêvé et je rêve
encore d’avoir un jour la chance d’écouter Dave Douglas en « vrai ».
Bien sûr je savais qu’il ne serait pas là, que la formation actuelle réunie par
Galliano n’était pas la formation initiale, nous l’avions toujours su, et que seul Marciac
nous aurait permis de l’écouter …Je m’étais renseignée, du moins le croyais-je,
sur les nouveaux musiciens, italiens, me
semblait-t-il.. Eh non c’était une formation franco –italienne que Galliano nous a
présentée :
Mauro Negri à la clarinette,
Nicolas Folmer à la trompette, Sylvain le Provost à la contrebasse, Mattia
Barbieri à la batterie et aux percus…
J’ai tellement aimé et écouté le
CD, que j’ai peur d’être déçue…
Eh bien ! Non, c’est autre
chose ! Le concert du CD est
parfait, la composition remarquablement orchestrée, dosée, équilibrée, les sons
extraordinaires, la trompette de Douglas bien sûr mais le saxo aussi, et
Clarence Penn toujours aussi aérien…
Mais ce soir, la présence de Galliano
est plus forte, plus sensible, Ses
propres chorus, plus longs, me donnent l’impression d’être comme plus libres et
improvisés. Il semble organiser
« naturellement « les fils de l’ensemble, les duos, avec la clarinette,
puis avec la contrebasse, les chorus de trompette et de batterie, se
déplaçant sur l’espace de la scène comme « l’âme »
de la musique.
J’apprécie énormément le son et
la virtuosité de la clarinette de Mauro Negri, et le jeu de la contrebasse …
En fait on a une impression forte
de Jazz…l’impression d’une musique
vivante qui se produit « ici et maintenant », en notre présence,
avec une force de communication intense…
La musique de Nino Rota, peut-être parce qu’elle
nous évoque les films de Fellini, a pour moi à la fois une tendresse mélodique
forte ( Gelsomina sans doute !) ,
et une connotation déchirante de Tragique . J’avoue d’ailleurs que je
préfère la musique de Nino Rota aux films de Fellini, La Strada et Juliette des
Esprits exceptés…
Heureusement le « Nino »
de Richard nous emporte dans la vitalité ryhtmée d’un swing de bonheur.
Une fois de plus, je bade le
talent de Richard Galliano. Je n’ose plus parler du son de son accordéon et de
son jeu, de peur de passer pour une laudatrice
inconditionnelle. Mais je
parlerai encore de son talent à composer,
à intégrer l’esprit de la musique qu’il célèbre, pour en faire une création marquée de son style, et aussi de sa capacité extraordinaire à jouer en empathie avec les musiciens dont il
s’entoure..
Et le bonheur qui en résulte est
énorme…
Nous en oublions les mouflets qui
nous agacent les pieds , le froid du dehors ,les soucis qui nous tracassent …le
seul souci qui nous demeure dans l’instant, c’est le temps qui passe trop vite , c’est Richard
qui se donne et se fatigue , c’est que le concert devra s’arrêter…. !
Nous commencerons alors à penser
à notre Galliano de printemps, notre Galliano
de Mai, à Trentels….et à Toulouse…
Le lendemain, la neige tombait drue sur la route du retour !
2 commentaires:
merci pour votre post
Tu nous racontes l'avant concert, c'est assez rare et cela met encore plus de sel. Tu deviens une experte en Galliano que je n'ai jamais vu en concert. C'est vrai qu'en hiver on prend un risque aussi bien de notre côté spectateur et du côté de l'artiste qui peut être bloqué quelque part et ne pas arriver sur le lieu du concert, quand ce n'est pas un problème de sante. Bon week end.
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