dimanche 28 août 2011

A propos de Bach, de Gorka Hermosa , et de Richard Galliano

Gorka et José luis Monton ont décliné flamenca, buleria, et jota des thèmes de Bach.
Peu auparavant Richard Galliano avait réalisé avec son sextet à cordes, son rêve de jeunesse de transcrire Bach pour son accordéon et son bandonéon ...

En même temps et par ailleurs je découvrais les transcriptions pour accordéon, violon, violoncelle par B. Cavanna des lieder de Schubert et écoutai X. Gagnepain et Cavanna en débattre dans l’émission « le matin des musiciens »

Cependant que ma Charlotte lisait « les histoires tirées de l’Iliade » et réclamait une « édition » des Misérables .

Et que le soir aussi nous nous régalions à savourer dans le texte la belle écriture de Daniel Pennac dans Cabot Caboche

Tous ces projets se bousculent dans ma tête pour mieux secouer la question de l’adaptation, en littérature et ailleurs…

Richard Galliano dit ne jouer que les notes de Bach :
« Je prends le matériel original de Bach… Ses partitions sont souvent en quatre parties..pour les cordes , et pour les solos l’accordéon…Bach semble-t-il ne se posait pas le problème d’instrumentation, c’est de la musique pure, l’art d’une mélodie » (qu'on me pardonne l'aproximation de la citation)

Mais ailleurs,

Il dit chercher la même chose que dans le jazz : le swing. Puis l’équilibre musical, l’écoute. "Et quand le son est beau on peut installer une certaine émotion »..
Xavier Gagnepain avoue avoir d’abord été rétif à l’idée d’une transcription de Schubert par respect pout l’œuvre originale, au point que B. Cavanna avait renoncé à en enregistrer les concerts.
Gorka en revanche affiche la transposition : Bachlerana buleria, Ciaconna flamenca

Et pourtant, pour être différent le plaisir d’écoute n’est pas moindre de l’un à l’autre. Quel plaisir je retire de l’écoute du Bach de Galliano. Dois-je l’avouer, pour une profane comme moi, c’est une redécouverte qui s’apparente à la découverte…La pureté de la ligne mélodique crée un enchantement qui efface l’angoisse existentielle…!!!
Et quelle émotion la Chaconne selon Gorka, quand le contrepoint accordéon, voix , crée une sorte de montée vers l’allégresse, qui m’émeut profondément. On l’écoute encore et encore …!!!

Et j’en reviens à ma littérature :

Qui lirait l’Iliade si elle n’était d’abord traduite et ensuite adaptée. ? Qui connaît vraiment l’intégralité des Misérables et les méditations sociologiques et philosophiques qui viennent s’intercaler dans l’histoire de Jean Valjean, de Cosette et de Marius… la merveilleuse histoire de Jean Valjean, de Cosette et de Marius.

La merveilleuse histoire qui mérite d’être connue parce que, elle aussi, comme la merveilleuse voix de Bach elle rend heureux, restitue à chacun un peu de sa force vitale….

Il y a une distinction en littérature du récit, que j’aime particulièrement, entre histoire et narration : l’histoire c’est l’essence du récit, sa ligne claire, le système de ses personnages, l’enchaînement des évènements créés par le démiurge-auteur ; la narration c’est la manière de la raconter…bien sûr le style est dans la narration, le goût des mots et la saveur qu’on en goûte aussi …
Mais la ligne du récit ne recèle pas moins de créativité et de magie esthétique : il y a des histoires insipides quelle que narration qu’on en fasse ; il y a des histoires puissantes dont la force subsiste et demeure de transcription en adaptations, et s’enrichit des narrations successives…se métamorphose, tout en demeurant elle-même dans toutes les transcriptions qu’on en crée.

Mais toutes les transcriptions ne se valent pas, n’ont pas le même pouvoir : l’adaptation, la transcription demandent un vrai talent de création…

Galliano y apporte outre sa virtuosité magique, son génie mélodique, et le swing qui l’habite depuis toujours, Gorka son âme basque et le son triomphant de son accordéon , J.Luis Monton son chant flamenca et le rythme de la buleria, tandis que Cavanna apporte à Schubert son intuition créatrice de déconstruction/ reconstruction, et la distribution inspirée de la partition entre accordéon, violon et violoncelle…

C’est la Fontaine racontant les fables d’Esope et Molière réinventant les comédies de Plaute….
Il y a des traductions qui sont à elles seules de vraies écritures …

Qu’est-ce que la fidélité à une œuvre ?

Le lecteur, qui dévore son livre, qui se bâtit un monde entre les lignes en évoquant ses propres images et en choisissant les mots, les phrases, les pages qu’il savoure en particulier et particulièrement…qui reconstruit dans son imaginaire les blancs du récit, est déjà un traducteur et donc un traditore !!!




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