Curieusement, la guerre
de 1914-18 pour des gens de notre âge,
et pour nos parents, et peut être à cause d’eux, a toujours été présente dans notre culture historique et
familiale. Pourtant nos parents avaient subi la guerre de 1940, et nous mêmes avons vécu l’appréhension
de la guerre d’Algérie . Mais la Grande Guerre, c’était celle de 14-18 , et ses
images très présentes faisaient partie intégrante de notre histoire de France telle que nous nous
la représentions .
Nos deux grand pères , dont nous imaginions difficilement qu’ils aient
pu être de fringants jeunes hommes,
paysans ou étudiants, amoureux, danseurs endiablés ou romantiques
lecteurs, furent de ces poilus mobilisés .
Mon grand père, dernier enfant d’une très modeste métairie, devenu de ce fait cheminot de fraîche date, déjà trop vieux pour être de la classe 14, n’échappa néanmoins pas à la mobilisation générale , destination Salonique… ! et « Parrain », le grand-père de Michel, petit coiffeur de la rive droite de la Garonne, participa à l’interminable campagne de Verdun…
Mon grand père, dernier enfant d’une très modeste métairie, devenu de ce fait cheminot de fraîche date, déjà trop vieux pour être de la classe 14, n’échappa néanmoins pas à la mobilisation générale , destination Salonique… ! et « Parrain », le grand-père de Michel, petit coiffeur de la rive droite de la Garonne, participa à l’interminable campagne de Verdun…
Tous deux demeurèrent toujours
pudiques et discrets et se racontaient peu .
De mon grand père « Lexou »,
j’ai entendu plutôt ses récits de garde républicain, des souffrances occasionnés par la selle du
cheval, de son travail d’ordonnance pour nettoyer les jupes de la colonelle ou
pour cirer les bottes du colonel , ou pour faire la soupe, fines pelures de
pomme de terre obligées, ce dont il garda toujours un savoir faire domestique ,
sans doute mi ordonnance/ mi paysan !!!
Mais nous ne pouvions ignorer
les sagas familiales, parfois spectaculaires, que nous racontèrent leurs femmes
et nos parents, pour l’un le long trajet
pour le front de Salonique, la « Grippe » qui affecte durablement les
oreilles...
Et pour l’autre l’aventure de Verdun, vécue de bout en bout , où il fut enseveli par un bombardement lors d’une attaque, et dégagé in extremis par les camarades grâce à la pointe de sa baïonnette qui affleurait , les gaz redoutés, et parfois respirés, et qui lui laissèrent une atteinte pulmonaire durable, et puis, toute sa vie, l’attente de la légion d’honneur promise , qui n’arrivait jamais, et qui ne lui fut remise que peu de temps avant sa mort….
Et pour l’autre l’aventure de Verdun, vécue de bout en bout , où il fut enseveli par un bombardement lors d’une attaque, et dégagé in extremis par les camarades grâce à la pointe de sa baïonnette qui affleurait , les gaz redoutés, et parfois respirés, et qui lui laissèrent une atteinte pulmonaire durable, et puis, toute sa vie, l’attente de la légion d’honneur promise , qui n’arrivait jamais, et qui ne lui fut remise que peu de temps avant sa mort….
Pour moi, à ces récits familiaux
marquants viennent se joindre des histoires de personnages fictifs ou célèbres, dont romans
ou biographies romancées retracent le
vécu dans la « grande » guerre !
J’aime les récits, je ne peux
me déprendre de l’idée que la fiction peut révéler certains aspects
fondamentaux de la réalité, comme
d’ailleurs la Poésie peut en « donner à voir » des beautés voire un sens caché…
Sans doute ai-je hérité cette conviction de mon père,
historien riche de savoirs et de sagacité, et prof, qui toujours prétendait que
Victor Hugo et Alexandre Dumas avaient fait plus que lui pour la connaissance
de l’histoire par ses élèves et le public en général...
Bref , j’aime l’Histoire, j aime les histoires, et… les
histoires de l’Histoire.
En ces temps de
« commémoration » de la Grande guerre, et du centenaire de
l’Armistice, j’ ai retrouvé avec un plaisir romanesque des « petits »
livres, découverts au hasard de mes furetages dans des librairies, « Petits » livres n’étant certes pas
un terme dépréciatif, mais exprimant au contraire toute l’affection,que je
porte à ces œuvres qui sans prétention émeuvent et nous parlent, tout en étant
de surcroit souvent remarquablement bien
écrites.
Deux auteurs de moi inconnus…
Deux récits, de deux
personnages touchants :
Le premier est le héros d’une série publiée en 2005 que nous avions découverte et partagée avec ma fille Nadja , de Thierry Bourcy, et son héros , « flic et soldat » dans la guerre de14-18, Celestin Louise .
Le deuxième personnage, est le héros du roman « Les forêts de Ravel » qui a pour auteur Michel Bernard, n’est donc ni un anonyme, ni un personnage de fiction , c’est un grand personnage, un musicien célèbre , Maurice Ravel .
Tous deux ont pour
caractéristique leur obstination à participer à la guerre : Célestin
Louise en tant que policier pourrait être cantonné à un service de police sur
place à Paris même. Quant à Maurice Ravel, déjà écarté du service
militaire par son état de santé, se trouve à nouveau refusé lorsqu’il se porte
volontaire pour être enrôlé dans l’armée…
Avec une énergie désespérée, il refuse de «poursuivre son existence comme
avant alors que des millions d’hommes, riches ou humbles, humbles surtout,
avaient été mobilisés pour défendre le pays. »
C'est aussi ce que refuse
Célestin Louise …
Le récit du combat de Célestin
Louise , c’est vivre la guerre du 22ème de ligne dans la tranchée
Le récit du combat de Ravel , « ostinato »,
c’est le combat pour se faire incorporer dans les services auxiliaires.
Le récit de chacun de ces
combats est mené dans une tension dramatique bien organisée , Célestin Louise
reste policier même sur le front et la résolution d’un meurtre, donne à l’intrigue
un surplus de tension.
Pour le combat de Ravel ce
sont les obstacles rencontrés pour réussir à participer au combat général qui
créent le ressort de l’action…
Personnages complexes qui intéressent par
leur choix , peut-être historiquement situé, mais qui nous interroge, nous
qui avons tant aimé « Le Déserteur » de Boris Vian, et qui l’aimons
toujours !
Le réalisme des contextes évoqués autour d’eux est remarquable,
le talent d’écriture descriptive et documentaire,
et sans aucun doute documenté, nous « donne
à voir »les lieux , les tranchées…
Qui donc êtes vous Thierry
Bourcy ?
Le neveu d’un Joachim tué à
Verdun en 1915 , un mois après être arrivé au front… ?
Qui êtes-vous Michel
Bertrand ? Un natif de Bar-le –Duc ? Une terre que vous connaissez intimement
et où la guerre est incorporée à
jamais ?
Je convie à ma commémoration
personnelle un troisième auteur pour « Un long dimanche de
fiançailles » : Sébastien Japrisot , dont le roman a été
remarquablement mis en images et porté au cinéma par Jean -Pierre Jeunet . Le
héros en est une héroïne , Mathilde : son combat , refuser d’accepter que « Manech »
son fiancé soit mort sur le front de la
Somme…et gagner ce combat!
Ce film dont se souvient peut-être Duponcel
en créant « Au revoir
Là-haut » , est, comme Au revoir là-haut, lourd de représentations des
combats de tranchées fictives mais plus vraies que le vrai , remarquables, auxquelles on ne pourrait reprocher que leur splendide beauté :
« Dieu que la guerre est jolie » !
Bouleversant le roman,
bouleversant le film, par la tendresse
qui émane de multiples personnages à la présence évidente, et plus encore par l’extraordinaire- et enthousiasmant-
refus du malheur par l’héroïne !!
Merci à ces trois auteurs pour nous avoir offert dans l’horreur de la guerre ces visages lumineux !
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