mercredi 8 octobre 2014

Fanny Azzuro: Russian Impulse

Fanny Azzuro et Rachmanov, Porokofiev, Kapustin
Aimer , comprendre ? C’est la question que me pose ce très bel enregistrement  de Fanny…

J’aime immédiatement le disque…





 J’aime le piano de Fanny, la netteté avec laquelle se dégage la sonorité de ses notes, et en même temps, les nuances de son toucher…
J’ai l’impression  (en toute naïveté de non-musicienne )  qu’elle se  joue de la subtilité des deux plans, des graves puissants et percutants et une main légère qui détache la mélodie…
J’aime le thème de Corelli (ou pas Corelli peut-être et qu’importe,  c’est Rachmaninov  qui le dit) ce thème qui est une de ces petites musiques qui demeurent dans la tête et le cœur et que l’on a envie de chanter…Je suis à jamais, midinette au cœur tendre, esclave de la mélodie !
J’aime ce thème qui parait se cacher, et que le délice des variations complexifie et éparpille, sous le doigts précis, agiles , et subtils de Fanny..

J’aime Rachmaninov qui ouvre « un chemin vers l’irrationnel »mais demeure pour moi si romantique encore…
Bien sûr, ma culture musicale est si limitée que je connais surtout son concerto numéro 2 pour piano, délicieux cadeau que m’offrit ma grande sœur un 9 mars, interprété par Aldo Ciccolini, mon idole d’alors, et que j’ai écouté jadis encore et encore…


Et je remercie Fanny Azzuro d’avoir choisi pour ma découverte ces précieuses et subtiles variations…
Prokofiev, je l’avoue est un peu plus difficile pour moi, ma culture musicale, mon oreille sans doute imparfaite.
Mais je me laisse glisser grâce au piano de Fanny ,dans un monde sonore triste et beau, étrange voire un peu étranger, où l’on se met perpétuellement en attente de l’harmonie et de la mélodie qui ne viendra pas, la mélodie impossible, l’attente d’un récit qui ne se racontera pas, et ce « suspens » ne manque pas de charme.
Et voilà d’ailleurs que survient le Vivace du 4ème mouvement apporte un dénouement tumultueux, et l’émotion puissante d’une résolution de problème, comme un  5ème acte de tragédie ! Ouah !

Et puis je lis , je lis  la très remarquable présentation de Laetitia Le Gay : riche, précise ,savante….
J’aime  les CD, « objets »d’art véritables, où la promesse de musique est enchâssée dans des photos qui donnent visage à ceux qui jouent , et des mots qui donnent aux auditeurs à écouter autrement, voire mieux …
Le texte est fort intéressant pour situer le contexte, et éclairer peut-être la tonalité russe et le titre Russian Impulse (qui néanmoins  demeure pour moi  un peu énigmatique). Pertinent pour approcher le style de chaque compositeur et souligner entre eux parentés et contrastes…

Mais je mesure à sa lecture ce que j’appelle mon « hédonisme musical », combien je me satisfais du plaisir de l’écoute, sans chercher «  davantage » à comprendre tenants et aboutissants…
Et j’y retrouve mon éternel problème d’enseignante de littérature, et d’amateure de peinture et de photo:Le rapport ambigu entre la connaissance intellectuelle de l’œuvre d’art et l’émotion ressentie…
Entre comprendre et aimer, ça pourrait faire une dissert de philo : peut-on comprendre sans aimer et aimer sans comprendre ?

Le texte met en relief la brièveté caractéristique des pièces de Rachmaninov et  souligne que leur séquence loin d’être aléatoire comme on pourrait être tenté de le sentir, obéit à un projet structuré : ce que je n’avais pas remarqué , le vivant comme une promenade , une rêverie divagatrice, mélodieuse et rythmée…
Peut-être les écoutes prochaines en seront-elles enrichies ?
Laetitia Le Gay souligne aussi et analyse la spécificité du 4ème mouvement de la sonate de Prokofiev, dont justement  j’ai été si vivement touchée !
Comme quoi comprendre parfois s’accorde avec aimer !




En tout cas, j’aime vraiment QUAND Fanny Azzuro joue du piano , et CE qu’elle joue !


Ps :J’ai réécouté mon Ciccolini dans le 2ème concerto de Rachmaninov : il gratte et pétille mon 33 tours !



Mais je retrouve l’émotion d’alors…
Ou pour être exacte l’émotion de l’émotion d’alors !




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