dimanche 3 novembre 2013

AVEC LE TEMPS …David Venitucci, et Annick Cisaruk…


Je n’aimais pas Léo Ferré .
Il était lié à la représentation que j’en avais quand j’étais gamine…Deux amies de mes parents ne juraient que par lui .Il représentait pour elles  le  poète  dissident , la remise en question  du conformisme esthétique et des valeurs sociales …le chanteur intello…
Je ne sais ce qu’en pensait ma mère qui aimait les romans  romanesques, les chansons sentimentales et l’opéra, les belles voix claires et timbrées…elle n’en  disait rien ...c’est tout dire .
Quant à moi, vaguement choquée,  je n’aimais ni la voix ni les paroles, et du coup je n’entendais guère la mélodie…
Et puis il y eut un accordéon, celui de David , David Venitucci
J’ai souvent raconté « les toiles » de la culture, toile d’araignée en étoile…fils qui s’accrochent et s’attachent les uns aux autres pour un tissu aérien parfois résistant malgré sa légèreté.
Comment pour moi il y a la culture ordonnée , organisée , celle de la littérature, celle de l’histoire ancienne ou contemporaine , celle de l’histoire de la peinture. Celle qu’on acquiert à l’école, à l’université, avec des « mentors »,  des profs, des enseignants, des livres. Parfois la culture familiale est de cet ordre, transmise, sinon organisée rigoureusement.
Et puis il y a la culture personnelle, celle que nous ouvrent, dans des domaines inconnus  les chemins de la curiosité et du hasard des rencontres. Ce pourrait être un fil  d’Ariane qu’on déroule et suit, sauf qu’il n’est pas unique mais s’entrecroise avec une pluralité d’autres fils.
L‘accordéon , pour nous et pour moi, est un de ces fils précieux qui conduit à d’autre fils…car d’accordéon, il n’y eut pas dans ma culture transmise, familiale ou scolaire . S’il y eut de  la musique,  elle me fut de tout temps proche et inconnue, apprentie pianiste médiocre, chanteuse de chorale par obligation, danseuse de bals publics  passionnée mais sans génie et sans apprentissages.
L’accordéon, ce fut une découverte tardive, le désir de partager avec Michel une découverte pour lui aussi récente , une curiosité intellectuelle et fascinée pour cet instrument mal aimé…l’accordéon est devenu toute une aventure….
« L’accordéon y a pas que »…mais il nous ouvre des chemins de musiques multiples qui parfois retrouvent  et recroisent des chemins anciens …

Et donc nous découvrons David Venitucci et « Cascade »….

En plage 10, une mélodie prégnante , de celles qu’on n’oublie pas . Qu’on écoute avec obstination des fois et des fois… :  « Tiens, je me dis avec u peu d’étonnement  c’est de Léo Ferré !!! » (presque : c’est pourtant de Léo Ferré !)
ET c’était « Avec le temps …. »

Puis le fil se perd en croisant d’autres fils, la rencontre magique de Garcia Fons par exemple …

Avec le temps …qui passe…et tant de musiques qui nous attachent au passage….
Et puis vient « Trio »(il sera enregistré en Janvier !) et toujours sur ma même superbe introduction de David, notes égrenées en plan multiples dont la montée émotionnelle  prépare la mélodie que déroule, ligne claire et prenante , le trombone « aérien [1]» de Denis Leloup, et le charme agit …



Et puis, quand nous le rencontrons, David chaque fois nous parle d’ Annick Cisaruk, sa compagne qu’il accompagne pour  chanter Léo Ferré …
Et le temps passe …Michel, curieux impénitent, ne résiste pas à l’achat de « Léo Ferré, l’âge d’or ». Il me dit : « C’est beau ! tu sais … »
Moi, depuis que je me suis prise de passion pour le son de l’accordéon, et que j’ai perdu « les voix chères qui se sont tues » ( sans même parler de Brassens) celles de  Barbara, Nougaro ,Jean Ferrat, et même de France Gall et Michel Berger, je ne m’intéresse plus aux chansons, toute absorbée par les instrumentaux … Le scat à la rigueur … !


Mais on ne résiste pas l’appel de l’accordéon de David
Je me suis mise à écouter leur disque, avec obstination, comme tout ce que j’écoute, et je ne le regrette pas !!!
D’abord la voix d’Annick Cisaruk est magnifique, de nuances, de souplesse, de puissance,  agile et ronde …
Et le choix des chansons me ravit…
Car, outre des chansons très connues de Léo Ferré :
Joli Môme
La vie moderne
…je découvre des musiques qu’il a composées sur des textes que j’ai toujours adorées :
Sépulture, sombre Baudelaire
O triste de Verlaine
L’étrange et surréaliste Marizibill , d’Apollinaire
Et deux précieux textes d’Aragon :
L’Etrangère
L’Affiche Rouge

Toutes superbement « orchestrées» et interprétées par David.
 Et d’une écoute à l’autre  je m’éprends de Léo Ferré :
Les Albatros ,dérision exquise,
Le bonheur,
La lune,
Et sommet du plaisir , conclusion suprême, voilà encore le merveilleux Avec le temps, où la belle voix d’Annick interprète remarquablement, la mélodie qui me hante …..


Avec le temps:





[1] Le terme est emprunté à un article qui me parait  remarquable , trouvé dans Citizen jazz du 21/11/2012 .Olivier Acosta.
http://www.citizenjazz.com/David-Venitucci-Trio-a-L.html





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