lundi 27 février 2017

Richard Galliano : LILI, un fil rouge sentimental

Nous admirons et aimons Richard Galliano…
…Pour le son de son Victoria, sa virtuosité si accomplie qu’elle semble naturelle , la pureté des lignes mélodiques qu’il nous offre et nous a toujours  offertes depuis que nous l’avons découvert . Car toujours il nous semble penser à nous le public, non pour nous nous payer de facilité mais  pour nous ménager l’accès à la Musique dans tous ses états.
…Parce qu’il est un explorateur allègre de tous les mondes où vit l’Accordéon, et un créateur infatigable de mélodies nouvelles, de musiques qui chantent, car dit-il , « il est un homme de la chanson,  tous ses morceaux sont chantables »
…Moi qui suis à jamais envoûtée par la Mélodie qui émeut , celle qui fait pleurer Margot,  ou qui nous fait parfois sourire de bonheur, par le second degré de complexité qui se joue  dans les « arrangements » voire les partages orchestraux    de Richard Galliano, J’aime cette alchimie d’interprétation , voire  de transformation , qu’il met en œuvre à chaque nouvelle création ou reprise d’œuvre , qu’il s’agisse des siennes, que nous finissons par bien reconnaître, ou des opus de grands compositeurs , l’adagio du concerto pour flûte de Mozart, le saisons de Vivaldi , les « tubes » (j’ose le terme que je lui emprunte !) de Bach, de Piazzolla, de Piaf, de  Murena et Colombo…
Si passionnés que nous soyons de ses explorations infatigables de ses compositeurs d’élection, ou des pays de son cher instrument, nous aimons à  suivre les fils de ses mélodies personnelles, d’une formation à l’autre, d’un concert à l’autre, et même d’un jour à l’autre…Le tango pour Claude , Chat Pitre , Giselle , Habanerando , La Javanaise « et l’on se quitte… », Opale concerto ou New York tango ou PJ, la valse à Margaux (effacera-t-elle Perles de Cristal ?)etc…. !

ET aujourd’hui je suis avec émotion, une émotion toute personnelle peut-être, la mélodie délicieuse qu’il « Chante » pour sa petite fille LILI !


Sentimentale  en fut la première écoute, » le premier morceau enregistré pour donner à la session son état d’âme spécifique », auquel  vient  s’accorder ensuite la Ballade pour Marion …
 Et au final, dans le cd (comme dans le Temps ?)Lili viendra en dernier morceau…
Duo comme intime et presque nostalgique, en tout cas « sentimental », avec la guitare d’Anthony Wilson…







Mare Nostrum 2, nous le propose ensuite aussi, en duo avec le piano de Jan Lundgren, dont  j’aime  la sonorité magique, qui me parle toujours de l’immensité du sable et de l’eau …




Et voilà que la troisième fois le trouve enregistré dans le dernier CD de Richard G, New Jazz Musette qu’il nous présente comme une sorte de bilan de ses trente années d’enregistrement…
Cette fois c’est bien l’accordéon qui ouvre le morceau et sa mélodie-superbe ! Avant que la contrebasse joigne au chant  son écho profond, puis que la si belle guitare y égrène ses notes vibrantes et claires.






 Mais je dois avouer que c’est la batterie d’André Ceccarelli  qui  me frappe le plus dans cette interprétation comme  un rythme très présent et très doux de fond soyeux  .      








Je ne sais lequel je préfère de ces trois enregistrements...
Ce serait peut-etre celui que j’entendrais en live !!!!HIHIHI, comme disent mes petites filles à moi !









LILI, « sentimental » standard…
                               ...D’un grand-père qui n’a rien de standard !!!!!                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                  

mercredi 22 février 2017

L'Etranger et L'Arabe : "Mersault , contre-enquête"


Meursault , contre-enquête
Kamel Daoud,Babel (Actes Sud)









J’ai  aimé ce livre étrange et dérangeant …
Quoique je n’ai jamais aimé L’étranger, cet étranger qui justement a nom Meursault…
Ni  non plus parce que je ne l’ai pas aimé…
Je ne l’ai jamais aimé parce qu’incapable quand je l’ai lu d’accepter ce scandale de l’absurde, dont la Peste m’a guérie et soignée, parce que même son écriture me choquait, ce « je » absent et vide, alors que celle de La Peste m’enchantait de simplicité et de poésie.
Je aime ce récit de Kamel Daoud pour l’idée créative de nommer le sans nom tué par Meursault : « L’Arabe », mort, parce que le soleil écrasait la plage ! C’est une entreprise remarquable dont tous les lecteurs rêvent : achever une histoire inachevée ou mal terminée.
Tous les lecteurs je n’en suis pas sûre. Mais moi, oui !

Ce livre donne un nom à l’Arabe,  Moussa, il lui donne un frère investi de la tâche absurde autant que sa mort, de le venger , d’enquêter sur les circonstances , de retrouver son corps même englouti dans la non -existence, le rendre à son tombeau vide.
 Un frère dévoré parce cette tâche, possédé par la mère qui l’investit totalement dans cette mission.
Ce livre raconte la quête vaine et absurde des indices de ce meurtre pour redonner une existence à cet Arabe tué par Meursault parce qu’il faisait chaud, pour témoigner de ce meurtre sans corps …
ET au frère de Moussa, pour  qu’il conte cette vaine quête, il donne une langue.
Celle-là  même de son meurtrier, ou de celui qui est son auteur : son instigateur en fait, celui qui l‘inspire, qui l’investit de son pouvoir, son « auctor » l
Et c’est cette langue-là que j’aime qui m’a fait continuer, page après page, à  lire…

Car ce n’est pas en fait  la tension dramatique conduisant au dénouement, ce dénouement comme celui de L’étranger porte en lui une absurdité immense …
Le Roumi tué par le frère de Moussa n’est pas plus responsable que n’importe quel colon, n’est même pas responsable en tant que colon…
Et son meurtre exécuté après l’Indépendance, exécuté trop tard, à contretemps,  ne se produit pas quand il faut pour venger le meurtre de Meursault : il n’a pas de sens !
Ce qui m’a bouleversée, c’est l’extraordinaire beauté, sobre, précise, lumineuse, de la langue du conteur, la nôtre, par lui reconstruite et faite sienne….
C’est la beauté de cette langue qui  fait exister cette œuvre, qui donne à Moussa, «  L’Arabe », à son frère, et à son auteur, la force de l’évidence…


« Je veux dire que c’est une histoire qui remonte à plus d’un demi-siècle. Elle a eu lieu et on en a beaucoup parlé. Les gens en parlent encore, mais n’évoquent qu’un seul mort sans honte vois-tu, alors qu’il y en avait deux, de morts. Oui, deux. La raison de cette omission ? Le premier savait raconter, au point qu’il a réussi à faire oublier son crime , alors que le second était un pauvre illettré que Dieu a créé uniquement, semble-t-il, pour qu’il reçoive une balle et retourne à la poussière, un anonyme qui n’a même pas eu le temps d’avoir un prénom.[…]
C’est d’ailleurs pour cette raison que j’ai appris à parler cette langue et à l’écrire , pour parler à la place d’un mort, continuer un peu ses phrases. Le meurtrier est devenu célèbre et  son histoire est trop bien écrite pour que j’aie dans l’idée de l’imiter. C’était sa langue à lui. C’est pourquoi je vais faire ce qu’on a fait dans ce pays après son indépendance : prendre une à une les pierres des anciennes maisons des colons et en faire une maison à moi, une langue à moi. Les mots du meurtrier et ses expressions sont mon bien vacant.

Kamel Daoud, Mersault, contre-enquête
Babel p 12



Merci à Kamel Daoud d’avoir écrit cette poignante histoire…
Merci d’avoir choisi pour bien vacant cette langue que j’aime TANT…


PS :
J’ai  vu l’interview de  Kamel Daoud à La grande librairie
Sobre, précis, sans concession, parler juste …un écrivain … !!!



mercredi 15 février 2017

LA VIE DEVANT SOI, Renaud GARCIA-FONS, de très subjectives impressions !



 Renaud Garcia-Fons , David Venitucci, Stephan Caracci

C’était à Perpignan, salle  «Grenat », c’était le 11 Octobre !
Nous avait conduits là, le désir de réécouter David Venitucci, plaisir aussi délicieux que rare ! Et notre absolue admiration pour la musique de Renaud Garcia Fons…
Et quand Renaud et David s’associent  nous ne pouvons résister à leur alchimie, à laquelle s’associe pour La vie devant soi, Stephan Caracci !
Ce soir là, a Perpignan, (en première partie, Renaud partageait la scène avec la prodigieuse virtuosité de Dorantes) le trio présentait  La vie devant soi . Ce soir-là, après le concert , nous avons eu le plaisir de parler un moment avec David et de faire signer à Renaud Garcia Fons  son CD avec Dorantes, Paseo a dos
J’admirai une fois encore et le professionnalisme plein de simplicité de Renaud Garcia-Fons, et la gentillesse de son accueil : après trois heures de concert, il signait malgré sa fatigue,  et comme je m’en excusais, il dit c’est  normal, on vous le doit un peu ! Et quand je demandais un peu timidement si la sortie du CD était bien prévue pour Février 2017 , l’ombre d’une tension passa dans son regard : « J’espère ! dit-il ,  il y a encore du travail !!! »
Eh bien ! La vie devant soi est SORTI ! à l’heure dite !
 Une Œuvre… raffinée,  justement composée entre ses moments,  entre  les partitions de ses instrumentaux, comme toutes les autres œuvres de Renaud GF . Superbe !
Comme les autres, et différente à la fois : on y reconnait le style Garcia -Fons, à la sonorité magnifique et particulière de sa contrebasse, à la perfection d’une technique maitrisée qui entrelace avec créativité les possibles de l’instrument . . . à une qualité mélodique spécifique, la  beauté  de mélodies déchirantes qui s’imposent à l’évidence comme siennes,   à  un jeu de rythmes, à une composition si complexe qu’elle a la force de l’évidence…
Et… un je ne sais quoi de différent !!!
Un parfum de ville ?multiple et nuancé ?auquel  convient bien le choix de David, si parisien,  et de Stephan,  comme lui si « finement chercheur de nuances »….
Plus encore à l’écoute du Cd, pour la médiocre musicienne que je suis, qui ne perçois pas toujours, aussi bien qu’en concert où le regard se focalise sur le musicien qui joue et l’isole,  les limites de l’intervention des instruments, j’ai l’impression d’une fusion intime entre  la contrebasse et l’accordéon.
Sur cette fusion et sa continuité, se détache la clarté pure et mélodique des notes détachées  du vibraphone…
Parfois, dans certains morceaux ,  l’accordéon se détache, pour notre plus grand plaisir  comme une insistance sur le thème parisien, Après  la pluie( je pense à Daniel mille ! et à Doisneau),Le long de  la Seine, Les écoliers  qui sautent et jouent, ou sur la légèreté et la « fantaisie » d’un Si ça te dit.. 

Car tout ce disque est un bel objet poétique aussi : chaque titre de morceau invite à imaginer cette ville , les rues où on vagabonde , le métro où on se perd dans le bruit et le monde, Montmartre où l’on court les rues montantes , les bords de seine , les immeubles lavés par l’averse.
Il ne s’agit pas de musique  figurative, mais connotative,  offrant  à chacun la liberté de ressentir  selon sa « fantaisie », des impressions personnelles, par le rythme , très présent ,  sautillant ou flâneur , par une insistance de l’accordéon, par les changements de jeu de la contrebasse : des impressions de foule qui se presse « je prendrai le métro » , de bruits de gens qui parlent Monsieur Taxi  , de l’ harmonieux bruissement  d’un trafic de machines (metro),  de courses rapides ,  d’ enfants à cloche pieds (Les écoliers) en noir et blanc, à la  Doisneau, et de mélancolie,( l’élégie de l’automne )ou (le long de la  Seine)…
Et, luxe de mots ,( « j’aime » !!!) : à chaque titre, un sous -titre qui fait lien avec d’ autres mots que nous aimons , Zazie et Queneau , Momo et madame Rosa qui « habitaient le sixième a pied », Prévert et son rêve,  les Shadocks … d’autres qu’on ne connait pas forcément mais « on se renseignera » ! …hiihihi !
Une fois encore la musique, et certains  joueurs de musique d’élection,  nous tirent par un fil aérien vers d’autres arts, photos, poèmes, tableaux et…
Encore d’autres musiques … !

Ça enchante le  spleen des jours trop courts  de novembre !
J’aime l’élégiaque  dernière phrase que, provinciale invétérée,  je savoure avec un humour ….volontariste !
FLUCTUAT NEC MERGITUR



  

mercredi 8 février 2017

AMOUR , deux Palombes...

Sur la crête du toit voisin côté soleil, tous les débuts d’hiver il y a deux palombes…


Chaque jour ou presque, perchées sur le toit face à face, ou dos à dos, ou côte à côte, elles semblent converser, sautiller à la queue leu leu, ou s’ élancer l’une vers l’autre et se becqueter à pleins bécots .


« Les palombes, dit le Robert, ce sont des pigeons ramiers du Sud ouest de la France.. »
Et nous de dire :

«  Deux palombes s’aiment d’amour tendre »


 Mais cette année début novembre l’une d’elle est apparue, esseulée ,et me causant de ce fait, un peu  ridiculement, une certaine   tristesse :


Eh quoi ! La Fontaine , qui soit dit en médisant,  connaissait  je crois mieux les  animaux des Fables  que les  animaux réels, avait-il eu raison d’écrire pour la postérité :


«  Deux pigeons s’aimaient d’amour tendre :
« L’un d’eux, s’ennuyant au logis,
« Fut assez fou pour entreprendre
"Un voyage en lointain pays …

Et de penser ?eut être une humeur volage ? ou peut être, hélas,  ….le Chasseur ?



Tous les derniers jours de l’Avent du solstice, je  regardais souvent la cime du toit au moment de tirer les volets sur le soir précoce de décembre, guettant la  venue de l’Esseulée ou son départ !!!



Mais voilà que vers la Noël  je ne peux dire exactement quel jour ouvrant ma fenêtre,  je le vis : Il ou Elle, était revenu!!!


Leur petit ballet amoureux, amour, dépit , baisers à plein bec…a repris , nous ouvrant toute la gamme d’ hypothèses poétiques…et même l’illusion que parfois , les jours moins froids, les jours ensoleillés, deux autres plus  jeunes , en tout cas plus petites, palombes,  s’essayaient à sautiller, à la queue leu leu  à  proximité , sur le toit, leur toit !!!!!


Comme m’a dit une amie sans qu’on se soit concertées : vous avez vu les palombes ?

Quand même il y a de l’Amour !


J’en ai aimé, et conservé,  la formule…