vendredi 29 juillet 2011

Splendeurs et misère…

A Barcelone, à la fondation Miro

Depuis plusieurs fêtes, anniversaire, ou fête des mères ma petite( !) Nad, tout en m’offrant une petite « bricole » en cadeau pour « marquer le coup » me disait :
« Ma Françou, je vais t’amener à Barcelone, ce sera mon cadeau »

Elle sait la fine mouche combien j’ai de regret de ne pas connaitre certains lieux, dont Barcelone…

Nous avons beaucoup remis, beaucoup tergiversé : trouver une date dans son emploi du temps, prendre la décision de laisser les autres, même s’ils ne sont pas motivés par le projet…c’est compliqué !!!
Charlotte a demandé qu’on l’emmène, Camille a refusé qu’on le fasse, préférant « rester avec son Papou ». Lequel gentiment a accepté cette flatteuse mais stressante responsabilité !!!

Nous voilà donc parties trois filles à l’avant du « Multipla » des jeunes …

Barcelone est un lieu de merveilles que nous avons couru jusqu’à épuisement …de Mamou, les filles se ravigotant magiquement aux tapas , toujours prêtes à repartir une fois restaurées…






Le dernier matin nous avons visité la fondation Miro… tout le lieu , les tableaux , la présentation des contextes des créations du peintre laissent ravi…


Le moindre plaisir n’était pas l’extraordinaire disponibilité de Charlotte, à contempler toutes, mais vraiment toutes, les œuvres exposées, et à écouter toutes, mais vraiment toutes, les explications que connaissait Mamou qui essayait d’être concise et pas trop pédante…

Que le temps lui conserve cette faculté à s’émerveiller devant ou à l’écoute des œuvres d’art, faculté précieuse qui permet d’échapper souvent aux grisailles de la vie !!!

Dans l’une des plus belles salles, alors que nous errions comme nous aimons, sans logique autre que notre fantaisie, à notre « guise », comme aime dire Michel, d’un tableau à l’autre, une jeune ado, de l’âge de Charlotte traversa la salle, elle aussi attentive et contemplative, apparemment émerveillée…et en fauteuil roulant !

Un instant, son regard se détourna des tableaux pour fixer ma Charlotte. Je ne sais dire ce que ce regard exprimait. Seule son intensité, une sorte de profondeur terrible me saisit, avant qu’elle ne se détourne pour regarder à nouveau Miro.
Une seconde alors nos yeux s’accrochèrent .Il me semble qu’un échange s’y passa, je ne saurais dire lequel, sauf qu’il me toucha au cœur……



jeudi 21 juillet 2011

L’art éphémère…


La beauté d’une peinture, d’une photo, de certaines sculptures relève pour moi d’un sentiment très fort d’évidence, d’une existence incontestable. L’analyse peut décrire, commenter, connoter…mais ne dira jamais tout à fait la raison de cette évidence…

S’y ajoute toujours le plaisir du sentiment de sa permanence, l’assurance que l’instant décisif a fixé à jamais dans l’espace cette présence et permettra de revivre à chaque rencontre le bonheur de cette évidence…

De même le bonheur des mots porte en lui la promesse du recommencement indéfini…

Bien différent m’apparaît le bonheur de la musique jouée en direct, en concert. Ephémère…Ce plaisir esthétique et émotionnel s’inscrit avec intensité dans le temps qui passe. On voudrait que cette musique ne s’arrête jamais …ce désir très fort et le sentiment de manque qui s’installe à peine le concert terminé est pour moi la manifestation de sa beauté. Les concerts qui ne nous paraissent pas trop courts, peuvent être « intéressants » et intellectuellement satisfaire notre curiosité mais ne me procurent pas une véritable émotion esthétique….


L’autre jour sur la plage au bord du lac d’Hossegor, où le sable st très fin un peu dur, mais moins doré que celui de la plage du bord de mer, un peu foncé par un fond de vase , un homme nous a offert au ras de l’eau qui montait rapidement le plaisir d’une œuvre éphémère…



Ce fut un plaisir comme celui des châteaux de sable de nos enfants que voir prendre forme en direct sous ses mains habiles un énorme nageur de sable brun qui s’en allait vers le lac …qui l’atteignit finalement, et dans lequel il devait inexorablement se dissoudre et se fondre…


L’émotion tenait à une certaine perfection de la réalisation alliée à la certitude de son absolue fragilité…



Ephémère et intense, ainsi je qualifierais certains instants de bonheur : sur la plage, en jouant cette fin d’après midi, où le soleil revenu chasse les angoisses du vent et de la tempête, j’ai oublié mes sandales..

Je cours pour les retrouver sur la vaste étendue de sable, tout à fait insouciante, prise d’un grand fou rire intérieur, et je vois mes deux petites qui accourent à ma rencontre en brandissant chacune une des sandales retrouvées et riant…


Instant léger, éphémère , parfait…

samedi 16 juillet 2011

Retraite, variations

J’ai déjà évoqué la perplexité que le mot retraite provoquait en moi.
J’essaie de réfléchir à son emploi dans différentes expressions pour comprendre cette perplexité …


Prendre sa retraite ? Voilà un geste actif, qui suggère une décision énergique déterminée, un destin pris en mains….
Je croise souvent de ces amis actifs chantant la vie nouvelle et désormais choisie dont cette action a marqué le début : je les rangerais toutefois en deux catégories, les voyageurs globe-trotters, ou montagnards vadrouilleurs, ou sportifs entraînés aux rendez-vous énergiquement programmés…versus les bénévoles militants contre le faim, l’illettrisme, ou l’inculture…
Non trois catégories plutôt, la troisième étant celle des « grands parents » qui attendent à la sortie de l’école, ou à l’entrée des vacances, leurs petits enfants, avec lesquels ils revivent différemment, mais avec non moins d’investissement, de fatigue, et de bonheur l’éducation de leurs enfants …

Je ne pense pas avoir pris ma retraite…c’est la retraite qui m’est arrivée…Je ne saurais chanter sur le mode majeur le bonheur triomphant et la jeunesse persistante…J’ai quitté à regret un métier que j’aimais et qui me rendait heureuse…

Même si je reconnais avoir la chance que la liberté du temps offert nous ait ouvert celle de courir la musique à notre fantaisie, et d’accourir auprès de nos petits enfants à notre guise, ou selon la leur, et de découvrir ainsi un rapport unique et délicieux à leur enfance …

Battre en retraite ?
Quitter avec soulagement un métier qui épuise ou que l’on ressent comme se dégradant, se libérer de ses soucis et des angoisses inhérentes…?
Jamais je n’ai éprouvé ce besoin, ni un soulagement de cet ordre…
Non ! Mon optimisme un peu naïf sans doute, s’il perçoit les dégradations du travail d’enseignant, garde la conviction profonde qu’il ne s’agit que d’un passage et que pour peu qu’on lutte ou résiste, l’école sortira de cette crise là comme de tant d’autres…
Mais, et c’est là plutôt ce qui m’afflige, je souffre de ne plus être en position de participer à cette lutte, d’être désormais en retrait….


Faire retraite ?
Se faire ermite ou jardinier, retiré de l’urgence du monde, prendre du recul, aller moins vite et réfléchir avec lenteur, écrire sans urgence …
Serait plutôt positif …

Mais ce retrait est aussi un lent chemin vers les renoncements de tous poils, renoncer à voir Capri, à trouver le chemin qui mène à Rome, à courir vite, à skier bien …
Et c’est là le combat, ne pas renoncer à comprendre, à apprendre encore et encore, à écouter du nouveau…

Tant qu’une autre expression ne s’imposera pas à nous …
Maison de retraite!!!!!!!!

Tant que Ronsard ne nous fera pas dire :
" Il faut laisser maisons et jardins et vergers
"Vaisselles et vaisseaux que l’artisan burine…
"Et… »

jeudi 14 juillet 2011

DE PETITES ENVELOPPES

Aujourd’hui, 14 juillet, ste Camille, et sainte révolution française comme dirait la susdite Camille, nous avons fêté cette fête à Hossegor.
Mamou de bonne heure (relativement) a pris son vélo (avec le petit cageot fixé au porte bagage) pour aller au marché. Elle nous a rapporté plein de bonnes choses pour manger : des rillettes d’oie, du saumon, et des fruits rouges,  groseilles, framboises et  fraises Charlotte (les meilleures !!! comme je dis toujours!).
Papou et moi, avons mis le couvert sur la table sur la grande terrasse en disant : « S’il fait trop froid, nous mettrons nos pulls over...(En fait il a fait très bon).
Puis un peu avant midi tatie Chris, ma grand-tatie, est arrivée dans sa belle auto Twingo à la fois émue et fière d’avoir fait ces 33 km à son âge. Elle est arrivée chargée comme si elle venait passer 3 mois chez nous. De son grand sac à congélation elle a tiré son flacon de champagne qu’elle avait préalablement bien fait refroidir (zut ! on en avait mis dans le frigo, on le boira plus tard). Mais le plus tendre, le plus gentil, le plus mystérieux, fut les trois petites enveloppes qu’elle cachait dans son dos et qu’elle nous distribua triomphalement au moment de passer à table. Trois jolies cartes !mais les plus jolies images étaient glissées dedans!. De quoi nous offrir chacune un petit plaisir rêvé, et elle ajouta : « J’ai tenu compte de l’inflation. »



Et je passe la parole à Mamou pour une autre petite histoire…

Chacha



En voyant ma petite grande sœur distribuer précieusement ses petites enveloppes, précis, émouvant, et lointain m’est revenu le souvenir d’un Noël d’autrefois…Je revois la salle à manger, l’arbre de Noël éclairé, les papiers déchirés des cadeaux sur la table …à l’arbre restèrent en dernier trois petits sachets de bonbons La Pie qui chante. De bonbons, point du tout ! Eux aussi contenaient des images magiques de Richelieu, Pasteur ou autres, je ne me souviens plus : ma grand mère toute rose de confusion déclara alors nous offrir ce dont elle n’avait plus besoin, vivant désormais avec nous : toutes ses économies, les économies de toute une vie, je crois bien…

Nous demeurâmes saisis, émus, bouleversés…Mon père en pleura d’émotion…et nous aussi !!!

Françou

Retraites , "Vivace"…

Nous avons été invités récemment à « fêter » le départ à la retraite de on amie Régine. Bien sûr, pas question de ne pas être là…mais j’appréhendais beaucoup ces retrouvailles avec nos anciens collègues, parfois amis.
Car, il faut que je l’avoue, depuis que je suis partie, j’évite soigneusement les lieux où j’ai particulièrement aimé travailler…
Bien sûr , parfois le hasard nous ménage d’agréables rencontres, les allées du Leclerc, la librairie, les manifs…Mais là , ce moment était en quelque sorte plus intimement mêlé à notre vie « antérieure »…

En fait, ce fut un moment agréable, d’une qualité douce de spleen, à la Daniel Mille… ?
Petit discours amical d’une Régine qui comme son amie Françou, ne chanta pas sur le monde allègre le chant du départ, mais célébra plutôt les liens avec ceux qu’elle aima croiser…et parla de changement de chemin, et d’un mélange complexe de sérénité et de regret…
Collègues rencontrés en a parte doux amers, anciens élèves devenus eux-mêmes formateurs et finalement collègues directs. Beaucoup, ceux qui vinrent nous parler, nous firent l’amitié de prétendre que nous avions compté pour eux comme formateurs et qu’ils nous regrettaient.
On parla du passé de l’école, que sans doute nous idéalisions, d’un présent assombri par la conjoncture, d’un avenir menacé par un pouvoir qui sape le service public et tâche d’affaiblir au mieux son école….
Je remarquais -sans doute n’est-ce pas un scoop !!!- comme les personnalités demeurent fondamentalement permanentes dans les épreuves du temps : douceur sereine et quasi inaltérée de N., esprit chagrin à jamais frustré de reconnaissance de JP, angoisse d’enfant de ne pas réussir de P.,mêlé d’ humour sceptique , enthousiasme dans la marginalité des enseignants en AIS,…

Et quelques moments de partage plus intimes entre Jurançon et foie gras , tous deux délicieux …
Avec ma belle passionaria V. musicienne et chanteuse , brillante élève autrefois puis remarquable enseignante ; nous pûmes un moment parler d’Annie , elle chanta des années à son côté, enseigna près d’elle , et a pris la suite de son CP…(Beau parcours dans un métier , où trop souvent l’excellence conduit immanquablement à aller enseigner au niveau supérieur, que celui qui conduit à revenir aux apprentissages premiers…) et de cette tendre communion du regret infini d’avoir perdu notre Annie…nous glissâmes à nos goûts musicaux et, merveille du hasard objectif, nous avons découvert notre passion commune pour Richard et d’ailleurs Piazzolla, et croisé les récits de nos expériences de ses concerts et de sa musique …ô Vie Violence !!!
IL y eut aussi au moment du départ un échange poignant avec une collègue « fraichement » retraitée dont j’avais noté le sourire inchangé dans un petit visage étréci comme amenuisé : elle s’écria d’un coup !: « la retraite !!!, on nous abuse ou l’on s’abuse … » Elle a perdu son mari brutalement à peine venait-elle de prendre sa retraite pour rester davantage à ses côtés…Avec elle aussi nous parlons musique, et de Bordeaux que nous aimons, et où elle envisage de se retirer, pleine de désarroi dans sa vie nouvelle…

En la quittant je demeure songeuse moi-même encore une fois sur ce mot étrange qui traverse nos vies , lourd de l’ambigüité de ses résonnances multiples

RETRAITE….



Sur ce mot, je n’ai pas fini de ruminer …

A suivre donc !