samedi 25 juillet 2009

Richard Galliano à Montauban, contrastes


Les concerts, attentes inquiètes et jubilation
J’attends toujours les concerts de Galliano avec un mélange d’impatience et d’inquiétude.
Crainte que cette fois-ci ce soit un peu moins parfait. J’ai déjà décrit le petit malaise que me crée la photo de la pochette de son dernier DVD, un peu grave, sinon triste.
Love day est un bien bel album mais d’une tonalité intimiste , aérienne, un peu nostalgique, un peu bilan d’une vie, sans cette vitalité puissante qui caractérise pour moi sa musique…
Je n’en aurais toutefois pour autant pas manqué ce concert, dont j’attendais qu’il présente avec ce quartet le programme de Love Day avec des interprètes différents(Clarence Penn, Richard Bona, au lieu de Mino Cinelu et Charlie Haden)
En fait quel bonheur !C’était un autre concert : des pièces intimistes et rêveuses, comme dans le disque, Aurore,Love Day …mais enchaînant avec un minimum d’interruption des pièces pleines d’une intense force jubilatoire, New York Tango, la « vie violence » de Tango pour Claude. En somme un concert composé comme un concerto classique avec alternance d’andantes et d’allegros. Et en témoigne le final, la plénitude sereine de l’Aria de Bach enchaînant sans rupture avec Sertao ou Taraf (ma mémoire résiste…), époustouflant par ce quartet.

Non, si l’âge marque les traits de R.Galliano, il n’altère en rien sa musique. A sa vitalité coutumière il ajoute une sorte d’intensité puissante, une vie violente…Sa présence est toujours aussi saisissante, la rythmique de Clarence Pen à la fois vibrante et discrète, le son de R Bona a une chaude coloration des basses ; au merveilleux piano de Rubalcaba, la virtuosité et la précision ne donnent aucune sécheresse ,mais un mélange de netteté et de rondeur moelleuse du son.
OUAH !!!
Lire l’article de Michel, pour « l’émotion partagée » :
http://autrebistrotaccordion.blogspot.com/2009/07/mardi-14-juillet-jazz-montauban-le-6.html


Frustrations
Un très beau concert, à la différence d’un très beau tableau, provoque toujours ,en moi, une grande frustration, due à la conscience douloureuse qu’il va s’arrêter et laissera en nous un grand vide, un manque que ne comblera pas son enregistrement. On garde l’ illusion que le tableau sera là dans son inaltérable présence et pourra être revu,. Le concert est de l’ordre du temps et de l’éphémère et ne pourra être revécu…

Mais ces soirs- là à Montauban , d’autres frustrations se sont ajoutées à celle-là.
Le premier soir, un public que je ne trouvais pas assez enthousiaste ni vibrant , comme blasé ou gourmé, ou simplement attiré par la notoriété de Galliano plus que par sa musique.
Le deuxième soir l’interminable attente de notre guest star : sa chaise vide, sur le dossier de laquelle était posée une serviette immaculée semblait devoir rester désespérément vide. Et quand enfin, la présence de R. G donna au trio un effet magique, le plaisir en fut si bref qu’on ne parvint pas à être pleinement heureux.

Le jardin des plantes, un Eden friqué
Le jardin des plantes de Montauban offre un cadre enchanteur à la musique, c’est un merveilleux jardin où l’on s’achemine vers l’espace du concert par des allées sinueuses bordées d’ arbres magnifiques, où le fond de scène est constitué de cèdres bleus et autres splendides futaies
L’organisation est parfaite, le son excellent…

Mais on s’achemine aussi entre des allées bordées des casetas de sponsors. Vastes tables blanches, champagne et petits fours. Invités sapés façon notables. De part et d’autre des blocs de places louées, deux travées de chaises sont réservées aux invités des casetas…
Et quand nous trouvons nos places, réservées sur Internet dès la première demi heure de la location, nous découvrons avec une certaine déconvenue qu’elles sont précédées de dix rangs d’invités, qui vont s’avérer au fil du concert peu ponctuels, se déplaçant , voire s’appelant sans vergogne, …Bref venus là pour un autre projet qu’ « écouter » la musique de musiciens prodigieux…
Ajoutons des repas à 35 euros, des places à 45, : et disons simplement que ce n’est pas un festival « populaire » !!!

Ce qui demeure en dépit de tout, c’est le grand bonheur d’écouter encore une fois ce que l’on aime, magnifiquement offert…

Je me permets d’emprunter cette conclusion à M .Contat et à son article de Télérama, :
« …heureux d’avoir encore une fois connu ça. Connu quoi ? La joie d’aimer ce qu’on aime. »

Richard Galliano au zénith : http://www.telerama.fr/musique/richard-galliano-au-zenith,45513.php

lundi 13 juillet 2009

Djebel. Gilles Vincent, Timée Editions

Cela a commencé par une rencontre au centre culturel Leclerc avec un auteur en quête de ses lecteurs, Gilles Vincent. Je rôdais comme souvent à la recherche hasardeuse d’un polar nouveau. Il dédicaçait des livres, nous avons parlé polars, échangés nos idées sur Adamsberg , le personnage de Fred Vargas, nous le trouvions attachant et séduisant, je le trouvais féminin, (c’est aussi ce qui me plaît en lui), et que le film de R.Wargnier en la personne de José Garcia ne nous en donnait pas une incarnation fidèle à nos représentations, mais que Paris y était bien beau…et que nous aimions aussi Bruno Kremer et que Simenon était un monde …
Finalement, pour ces échanges, et parce que sentais chez son auteur un désir enfantin et fort d’être lu, j’ai acheté Djebel.
Il ne correspond pas aux types de polars à qui je me confie à l’heure difficile du sommeil pour leurs qualités propédeutiques à la nuit : une sorte de transposition du réel, sinon poétique du moins fantaisiste, des personnages « composés », plus vrais que des vrais, plus humains que les humains, des Maigret, des miss Marple, des Cadfaël, des Adamsberg , des Nicolas Le Floch, des C.Louise… Des morts en pagaille, mais en quelque sorte « abstraites ».
Non, les morts de Djebel sont tout sauf abstraites.
Djebel est en effet un récit bien noir, cruel par les scènes sanglantes qu’il décrit crûment, et par ce qu’il remue un passé douloureux que nous, Français ou Algériens, ne parvenons pas à enfouir dans notre mémoire collective.
Mais c’est aussi à mon sens un beau récit, d’une belle écriture, ramassée et précise, discrètement métaphorique, où au détour de la narration certaines formules frappantes viennent en quelques mots restituer la réalité des choses quotidiennes ou l’intimité de la pensée. Sa composition instaure tension dramatique, attentes, et surprises. J’aime bien son héros, puis son héroïne, mélange de réalisme et d’humanité idéalisée.
Il est vrai qu’on le lit d’affilée, avide de savoir la suite…
Bref, j’ai bien aimé ce roman…
Une petite restriction néanmoins : bien que les rebondissements, quoique classiques du genre, nous aient surpris et passionnés, je n’ai pas beaucoup aimé l’épilogue et l’utilisation du 11septembre qui y est faite…
En tout cas, Djebel mérite qu’on s’y attache…